Shyam Benegal, pionnier du mouvement du cinéma parallèle en Inde, nous a quittés le 23 décembre, à l’âge de 90 ans. En hommage à ce cinéaste pas comme les autres, revisitez sept de ses chefs-d’œuvre.
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Ankur (1974)
Shyam Benegal signe une entrée magistrale avec « Ankur », un film emblématique du cinéma parallèle indien. L’intrigue met en lumière les inégalités de caste et de genre dans l’Inde rurale, en abordant la relation illicite d’un propriétaire terrien avec une femme Dalit. Shabana Azmi livre une performance époustouflante dans le rôle principal, qui lui vaut le National Film Award de la meilleure actrice. Le film décroche également le National Award pour le meilleur film en hindi l’année suivante.
Manthan (1976)
Considéré comme l’un des films les plus marquants sur l’autonomisation des agriculteurs, « Manthan » raconte la création d’un mouvement coopératif laitier, une initiative nationale réelle qui a démontré la force des communautés marginalisées à travers l’action collective. Girish Karnad assure brillamment la tête d’affiche, et le film a été financé par les contributions de milliers de fermiers.
Zubeidaa (2001)
Basé sur la véritable histoire d’amour interreligieuse entre Zubeida Begum, actrice et chanteuse, et le Maharaja Hanwant Singh de Jodhpur, ce film de 2001, avec Karisma Kapoor, a été écrit par Khalid Mohamed, le fils de Zubeida Begum. Le film est narré du point de vue de Riyaz, l’enfant fictif de Zubeida, qui cherche à comprendre la vie complexe de sa mère en tant que personnalité royale – deuxième épouse d’un prince hindou, le Maharaja Vijayendra Singh de Fatehpur (interprété par Manoj Bajpayee), sa relation complexe avec la première femme du prince, la Maharani Mandira Devi (jouée par Rekha), et son mariage tumultueux en raison de son esprit libre.
Mandi (1983)
Avec un casting exceptionnel composé de Shabana Azmi, Naseeruddin Shah et Smita Patil, « Mandi » est une exploration satirique et percutante de l’hypocrisie sociale, qui se déroule dans un bordel – un espace où se croisent agendas politiques et moraux. Le film, qui aborde des thèmes essentiels comme l’urbanisation et l’autonomisation des femmes, remporte le National Film Award pour la meilleure direction artistique et est considéré comme l’un des films les plus subversifs de Shyam Benegal.
Kalyug (1981)
Shyam Benegal réinvente l’épopée du Mahabharata avec « Kalyug », en explorant des thèmes tels que la cupidité, la trahison et les conflits familiaux dans le monde des affaires. À travers le prisme de deux familles industrielles composées de personnages humains confrontés à des dilemmes moraux et des luttes de pouvoir, le réalisateur livre un commentaire percutant sur les conflits éthiques dans un monde moderne.
Bhumika (1977)
Avec Smita Patil dans le rôle principal, ce drame biographique est inspiré de la vie de l’actrice marathi Hansa Wadkar. « Bhumika » suit l’itinéraire d’une femme qui cherche à s’émanciper et à définir son identité dans un monde où célébrité, amour et indépendance se mêlent. Smita Patil remporte le National Film Award de la meilleure actrice, tandis que le film reçoit le Filmfare Critics Award du meilleur film.
Mammo (1994)
Le récit poignant de ce film s’inspire du traumatisme vécu par des milliers de migrants après la Partition de l’Inde en 1947. L’histoire se concentre sur Mehmooda Begum, surnommée « Mammo » (interprétée par Fareeda Jalal), née en Inde mais ayant émigré au Pakistan avec son mari. Après la mort de ce dernier, sa famille la rejette, la laissant sans foyer. Elle retourne alors en Inde, où elle vit avec sa sœur et le petit-fils de 13 ans de celle-ci.
« Mammo » fait partie d’une trilogie sur trois femmes, aux côtés de « Sardari Begum » (1996) et « Zubeidaa » (2001).
Tisseur de récits authentiques
En 1974, un jeune scénariste avec une vision créative originale décide de révolutionner le cinéma indien grand public. Son nom est Shyam Benegal et, au cours des trois décennies suivantes, il sera l’un des pionniers du mouvement du cinéma parallèle en Inde.
À travers une narration puissante, imprégnée d’un réalisme social, Shyam Benegal transcende les styles traditionnels de réalisation, créant des films au ton socialement engagé. Ce réalisateur de cinéma d’art et d’essai, parmi les premiers à viser un public panindien et à obtenir des financements de distributeurs internationaux, aura su tisser des récits résolument authentiques défiant les conventions sociales, allant de l’exploration des dynamiques de caste dans « Ankur » (1974) à l’analyse des complexités de l’ambition féminine dans une société patriarcale dans « Bhumika » (1977).
Dans les années 1980, Shyam Benegal se fait connaître au large public avec « Bharat Ek Khoj », une série télévisée emblématique de 53 épisodes adaptée du livre « Discovery of India » de Jawaharlal Nehru, le premier Premier ministre de l’Inde. Cette série retraçait le parcours difficile du pays, de l’Antiquité à la modernité. Il réalise également, en 2023, un biopic sur Sheikh Mujibur Rahman, le leader du Bangladesh qui mena la lutte de son pays contre le Pakistan dans les années 1970.
Shyam Benegal, né en décembre 1934 à Hyderabad, dans le sud de l’Inde, obtient un diplôme en économie à l’Université Osmania de Hyderabad. Il fondera la Hyderabad Film Society.
Avant de se lancer dans le cinéma, il travaillera dans la publicité, où il réalisera plus de 900 documentaires et films publicitaires sponsorisés.
Il a été un mentor pour de grands acteurs indiens, tels que Shabana Azmi, Smita Patil, Naseeruddin Shah et Om Puri, qui ont ensuite marqué de leur empreinte le cinéma populaire de Bollywood. « J’ai perdu mon père adoptif, un homme à qui je dois plus que ce que je peux exprimer », a écrit Naseeruddin Shah. « Shyam Benegal n’était pas seulement une légende, c’était un visionnaire qui a redéfini l’art de raconter des histoires et a inspiré des générations », a déclaré l’acteur Manoj Bajpayee.
Shyam Benegal laisse derrière lui son épouse Nira et sa fille Piya.
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