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Couloir aérien - Singapour: le faux jumeau de Maurice

Avec l’ouverture du couloir aérien entre Singapour et Maurice, on peut plus facilement avoir accès à la cité-État, avec désormais trois vols par semaine. Que réserve l’île à celui qui la visite pour la première fois ? Pour le visiteur mauricien, Singapour semble être le double opposé de notre pays. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"13536","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-22432","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"971","alt":"Chantier Singapour"}}]] À première vue, Singapour et Maurice, à beaucoup d’égards, se ressemblent. Les deux sont d’anciennes colonies britanniques qui ont obtenu leur indépendance dans les années 60. Les coolies ont marqué leur histoire coloniale. Les deux pays n’ont aucune ressource naturelle et jouissent d’un territoire limité, ce qui, a priori, les condamnait à la banqueroute également. Sauf que leur unique ressource, une population mixte et diverse, leur a permis de déjouer tous les pronostics. Et après la poussée initiale de développement miraculeux, les deux pays ont emprunté des trajectoires radicalement différentes. Et aujourd’hui, l’un est un bazar indescriptible où deux heures de pluie suffisent à paralyser la capitale, l’autre un modèle de planification à très long terme et de changement perpétuel. Visite guidée… Du hublot de l’avion, ce sont surtout les tours d’acier, de béton et de verre qui captivent l’œil. À la sortie d’un aéroport à la pointe de la modernité, le premier contact avec les rues est sidérant : elles sont toutes bien asphaltées, propres, ordonnées, la circulation est disciplinée et raisonnablement fluide. En bordure de route et au cœur de la cité, du vert. Partout. Le développement de la cité, c’est évident, s’est fait avec un bon goût certain. Les panneaux publicitaires n’existent que sur Orchard Road, la rue dédiée aux centres commerciaux, et, contrairement à Maurice, ne sont pas tombés sous l’emprise de pollueurs visuels. Bref, le Mauricien moyen se retrouve comme plongé dans un monde parallèle, un monde où Maurice aurait pu emprunter une voie de développement différente ! Lors d’une balade le matin, on tombe sur une promeneuse, chien en laisse, qui ramasse les crottes de son animal de compagnie dans un petit sac plastique prévu à cet effet. On ne peut s’empêcher de songer à Everything’s in its right place, morceau des Britanniques de Radiohead. Dans le centre-ville, à Chinatown notamment, c’est une autre vision qui attend le voyageur mauricien. Certes, on est toujours dans un pays discipliné à l’extrême, mais on se croirait presque à Port-Louis. Les vieux bâtiments coloniaux sont restés intacts, protégés par les autorités, et apportent un peu d’âme à la cité. Elle a vécu. Elle a une histoire à raconter. On finit par se laisser prendre par ses dédales organisés. Avec la verdure omniprésente, on commence enfin à apprécier la discipline parfaite qui avait une allure oppressante auparavant. Le grand nombre de routes à sens unique, la limite de vitesse universelle à 90 km/h, les 500 dollars d’amende si on se fait pincer à nourrir les pigeons, les routes à péage automatiques… Pour comprendre cette obsession de l’organisation, c’est à la Singapore City Gallery qu’il faut aller. Il s’agit d’une sorte de musée qui retrace l’histoire du développement urbain de Singapour. Les Singapouriens suivent en fait un Concept Plan étalé sur 50 ans qui dresse la voie à suivre pour la planification du transport et l’aménagement du territoire. Zones résidentielles, industrielles et réserves naturelles… Tout y est. Sur le moyen terme, ce concept est adapté en un plan stratégique révisé chaque décennie. Ce n’est pas pour rien qu’il existe un Ministry of National Development.

Chantier permanent

Voilà le grand secret, l’explication de l’efficacité des projets routiers. L’immense port sera déplacé vers l’Ouest du pays pour faire place au centre financier qui demande à être agrandi. Ce déménagement est prévu dans six ans au plus tôt, mais l’autoroute qui mènera au nouveau port est déjà en construction. Pas étonnant, dans ce cas, que le pays tout entier soit un chantier permanent. Il se penche en permanence sur son développement futur. On ne peut s’empêcher de songer que nos ministres sortiraient grandis d’un crash course à la Singapore City Gallery. Cet état de construction et de changement permanents n’empêchent cependant pas Singapour d’être une cité très verte. D’ailleurs, elle était autrefois appelée Garden City et les autorités veulent désormais que le pays soit reconnu comme une City in a garden. On retrouve plusieurs bâtiments avec des plantes grimpantes sur la façade. Le règlement oblige chaque promoteur à compenser tout espace vert utilisé pour la construction de son bâtiment. Les toits verts sont donc chose commune à Singapour. Le gouvernement s’y met aussi : plutôt que de bétonner l’ancien chemin de fer qui reliait la Malaisie et Singapour, il a décidé de le transformer en espace vert, le Green Corridor, à la disposition des citoyens. La planification est évidente également dans le développement économique du pays. Singapour semble avoir déjà réalisé tous les projets que promettent actuellement nos politiciens. Petroleum Hub ? Singapour, sur Jurong Island, possède la deuxième plus grosse raffinerie du monde, lourdement protégée par les militaires. Gestion saine des déchets ? À Pulau Semakau, l’île où l’on se débarrasse des déchets, la végétation a colonisé les lieux et l’île est devenue un des lieux d’attraction pour les amoureux des oiseaux. Gestion de l’eau ? Une rivière qui était polluée est devenue le principal réservoir du pays. L’eau usée est entièrement recyclée. Un barrage sera construit en pleine mer et l’eau salée sera évacuée sur une période de deux ans pour être progressivement remplacée par de l’eau potable. Singapour est actuellement autonome en ce qui concerne l’eau et peut en toute quiétude regarder venir l’expiration de son accord d’importation avec la Malaisie…

Tout cela a un prix

D’ailleurs, l’adage de la nation, c’est : Regarder l’avenir avec sérénité. L’Université travaille actuellement au développement d’une cité souterraine. Singapour est arrivée à la limite du comblement pour augmenter la superficie de son territoire et les bâtiments ne peuvent pousser beaucoup plus haut à cause de l’espace aérien de la cité-État. On ne peut agrandir la cité qu’en creusant. Mais il suffit de passer quelques minutes avec les locaux, les jeunes surtout, pour se rendre compte que tout cela a un prix : la liberté d’expression. Le People’s Action Party tient les rênes du pouvoir depuis l’indépendance en 1965. L’opposition parlementaire, une petite poignée d’élus, n’existe que depuis peu. Signe que les choses commencent à changer. Des Art Centers ont ouvert leurs portes ces cinq dernières années pour permettre aux Singapouriens de développer leur créativité, bridée par le contrôle trop strict exercé par le gouvernement. Le Speakers’ Corner, une place publique où il est permis de venir parler de tout sans tabou, sauf de la religion et des ethnies, a été inauguré il y a une dizaine d’années. Mais il faut l’autorisation de la police pour s’exprimer ou critiquer le gouvernement ! Et la presse? Il n’y a qu’un quotidien : le Straits Times, journal de l’État. On trouve bien l’édition internationale du New York Times, mais attention ! Pas un mot de travers sur Singapour, sinon la publication sera bannie…
 

 Une promesse à tenir...

Plutôt qu’un accomplissement, le couloir aérien prend l’allure d’un défi à relever pour Air Mauritius. Maintenant que le couloir existe, il s’agit avant tout de promouvoir la destination et de multiplier les vols sur l’Afrique. Outre Maputo au Mozambique et Dar es Salaam en Tanzanie, le Swaziland, le Botswana et la Zambie ont exprimé leur intérêt pour desservir la destination Maurice (voir infographie). L’objectif est de proposer plus du double des destinations actuellement desservies dans un an tout au plus. En termes de marketing, Air Mauritius et Changi Airports sont tombés d’accord pour une action commune dans l’océan Indien et la région africaine. D’ici trois semaines, la campagne de promotion débutera. D’ailleurs, elle a déjà démarré à Singapour, où des panneaux publicitaires vantant les mérites de Maurice comme destination sont déjà visibles dans les rues. Si toutes les démarches entreprises se concrétisent, le gouvernement espère augmenter le nombre de passagers à Maurice d’au moins un million en deux ans.
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