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Trois mois après la visite officielle : Agaléga otage de promesses suspendues

Photographies prises en février dernier, peu après le passage dévastateur du cyclone Chido. Ces clichés, transmis par des habitants et datés du 30 juin, montrent que le collège reste en ruines. Les enfants doivent suivre leurs cours dans une bibliothèque aménagée en salle de classe provisoire.

Sept mois après le passage du cyclone Chido et trois mois après la visite du Premier ministre adjoint Paul Bérenger, Agaléga attend toujours les réparations promises. Entre frustration et sentiment d’abandon, les habitants dénoncent l’inaction et le silence des autorités.

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En décembre 2024, le cyclone Chido balayait l’archipel d’Agaléga avec une violence inouïe. Rafales déchaînées, infrastructures réduites à néant, écoles éventrées, dispensaire endommagé, routes arrachées... L’île a été projetée dans le chaos. Et si l’espoir avait brièvement refait surface, quatre mois plus tard, lors de la visite très médiatisée du Premier ministre adjoint Paul Bérenger, il s’est depuis évanoui. Aujourd’hui, dans les sentiers sableux de l’île du Nord comme dans les habitations précaires de l’île du Sud, un mot revient sur toutes les lèvres : oubli.

En avril dernier, l’arrivée en grande pompe d’une délégation ministérielle à Agaléga avait suscité de véritables attentes. Relogement rapide des sinistrés, réparations prioritaires, réhabilitation des écoles et du dispensaire, soutien logistique renforcé… Les annonces n’avaient pas manqué. Caméras braquées, microphones tendus, promesses fermes.

Mais trois mois après cette visite officielle, la réalité rattrape les discours. Si l’acheminement des vivres s’est stabilisé, les réparations, elles, piétinent. Les familles sinistrées dorment encore sous des bâches, les enfants apprennent dans des bibliothèques reconverties, et les bâtiments publics endommagés sont toujours inutilisables.

« Les beaux discours sont loin derrière nous. Aujourd’hui, la réalité, c’est une douche froide », dit Wesley Augustin, résident de longue date de l’île. Il ne décolère pas, ayant fait partie de ceux qui croyaient au tournant. « On nous avait annoncé l’envoi de matériaux de construction pour au moins renforcer les maisons en attendant les grands travaux. On n’a rien vu venir. » Sur l’île du Sud, la situation est encore plus critique : « Tout est au point mort. »

Même son de cloche du côté de Laval Soopramanien, président de l’Association des amis d’Agaléga. Engagé depuis des années pour les droits des insulaires, il ne cache pas sa déception, lui qui pensait que la rencontre d’avril serait un tournant. « C’était un moment d’échange, d’écoute. On s’attendait à des actions concrètes dans les semaines qui allaient suivre, mais aujourd’hui encore, la situation est pénible. On ne comprend pas cette lenteur. »

L’association a récemment relancé l’Outer Islands Development Corporation (OIDC) pour demander une nouvelle réunion. Objectif : faire le point sur le suivi post-cyclonique et la gestion des réparations. « Nous sommes dans l’attente d’une réunion avec Sébastien Lamy, General Manager de l’OIDC, pour discuter du sort des Agaléens. Selon les témoignages que nous avons recueillis sur place, les réparations n’ont toujours pas commencé. Et à ce jour, il n’a jamais été question non plus de la restructuration du conseil de l’île d’Agaléga », souligne-t-il.

Juriste et médiateur engagé sur la question agaléenne, Ivor Tan Yan dresse un constat sévère, dénonçant un manque de réactivité et de volonté politique : « Il y a un oubli organisé. L’OIDC agit comme un second gouvernement sur l’île. Elle concentre des responsabilités sans jamais prendre de décisions équivoques pour améliorer la vie des résidents. »

Selon lui, aucune réforme de fond n’a été initiée depuis des années. « Pas un seul bureau de l’état civil n’a été installé depuis toutes ces années. L’accès aux soins reste limité, sans médecin permanent ni structure médicale adaptée. Et aucune réforme sérieuse n’a été initiée pour faire évoluer la qualité de vie sur l’île », fait-il ressortir. « Les Agaléens sont des citoyens mauriciens à part entière. Mais sur le terrain, ils doivent se battre pour chaque service. »

Entre-temps, depuis sept mois, les élèves du Medco Agaléga College poursuivent tant bien que mal leur scolarité. Mais le bâtiment est hors d’usage, et aucun plan officiel de reconstruction n’a été lancé.

Une lueur d’espoir se dessine néanmoins. Arvin Bhojun, secrétaire général de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE), affirme qu’une réunion récente avec la direction du collège pourrait déboucher sur une décision cruciale : la reconstruction complète de l’établissement.

« C’est une vieille recommandation de l’UPSEE. Le collège n’est plus sûr. Il faut reconstruire, pour la sécurité des élèves comme pour celle du personnel », précise-t-il.

À Agaléga, l’urgence ne s’est jamais dissipée. Elle s’est seulement éloignée des projecteurs. Derrière les murs effondrés et les toits rafistolés, une population se bat pour ne pas disparaître de l’agenda national.

Des développements attendus dans les jours à venir

Afin d’obtenir des réponses sur l’évolution des travaux éventuels à venir, nous avons envoyé une correspondance au bureau du Premier ministre adjoint. On nous a fait comprendre que des développements interviendront incessamment.

 

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