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Projet de loi : des juristes apportent un éclairage sur les amendements à l’IBA Act

Les amendements à l’Independent Broadcasting Authority (IBA) Act seraient-ils arbitraires, anticonstitutionnels, en violation avec la liberté d’expression, ou encore, un moyen de museler les « whistleblowers » ? Deux juristes livrent leurs explications. 

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Me Shameer Hussenbocus : «Une épée de Damoclès pour ceux qui détiennent un permis»

shameerMᵉ Shameer Hussenbocus évoque que ce projet de loi est comme une épée de Damoclès sur ceux qui détiennent un permis. Pour lui, il est souhaitable, dans ce cas, que tout est fait de manière transparente et dans le respect de la loi et des libertés fondamentales de notre Constitution.  

Toutefois, l’avocat explique que les amendements à cette loi ont pour but d’offrir un meilleur cadre légal à l’IBA. Cela, afin que cette dernière puisse mieux contrôler les activités de ceux qui détiennent une licence. Mᵉ Shameer Hussenbocus ajoute, par ailleurs, que ces changements donnent le pouvoir aux autorités compétentes d’imposer des sanctions administratives. « Tout détenteur d’un pouvoir a le devoir de l’utiliser avec discernement et de manière judicieuse. Le temps nous dira si c’est le cas », soutient-il. 

« Un des amendements stipule que si une personne refuse de donner des renseignements requis par le directeur de l’IBA, pour des motifs de confidentialité, l’autorité concernée peut faire une demande devant le juge en référé pour obtenir un ordre de la cour. Celui-ci sera émis seulement si le juge est satisfait que l’autorité a besoin de ces informations dans l’exercice de ses fonctions. Compte tenu des pouvoirs élargis de l’instance, il sera intéressant de voir comment la cour traitera ces demandes », avance l’homme de loi. 

Ne pensez-vous pas que l’Independent Broadcasting Review Panel agira comme un « dictateur », et que la personne qui se présentera devant lui ne bénéficiera pas d’un procès équitable ?  Mᵉ Shameer Hussenbocus est d’avis qu’il y a toujours ce risque. Surtout si le pouvoir accordé n’est pas utilisé à bon escient. 

Me Taij Dabycharun : «Ces amendements contiendraient une très importante mise en garde»

taijPourquoi ces amendements seraient-ils arbitraires ou anticonstitutionnels ? se demande l’avocat Taij Dabycharun. Car, selon lui, les nouvelles propositions contiendraient une très importante mise en garde. 

Il explique que « lorsqu’une personne refuse de témoigner, communiquer ou produire des documents ou articles, le directeur peut présenter une demande devant un juge en référé. Cela pour obliger la personne à divulguer les éléments de preuve requis, ou de communiquer ou même de produire tout enregistrement, document ou article nécessaire ». Dans ce cas précis, dit-il, le juge en référé émettra un ordre lorsqu’il est convaincu que la demande exigée par l’autorité est de bonne foi. 

Il faut comprendre, souligne l’homme de loi, que le pouvoir n’est pas donné à l’autorité, mais à un juge en référé. Ainsi, il conclut que donner à l’autorité le droit de saisir le juge en référé, ne signifie pas qu’un ordre sera émis à la suite d’une simple demande. Ou que le juge en référé agirait comme un tampon de l’autorité ou du nominé politique. Bien entendu, affirme Mᵉ Taij Dabycharun, le juge effectuera un exercice d’équilibrage.

Par ailleurs, Mᵉ Taij Dabycharun évoque que tous les permis sont normalement renouvelables sur une base annuelle. Il cite la Glambling Regulatory Authority (GRA), la Mauritius Bar Association et la Mauritius Law Society, dont les licences sont renouvelées chaque année. Cela ne signifie pas que l’État va à l’encontre d’une section particulière de la Constitution qui garantit la liberté d’expression.

« En effet, notre judiciaire est une référence pour le continent africain. Ainsi, si jamais une autorité, y compris l’IBA, transgresse l’un des principes sacro-saints de la « liberté d’expression », je suis sûr qu’une réparation appropriée peut être obtenue auprès de la Cour suprême. Dans le passé, nous avons été témoins des demandes déposées par Top FM auprès de la Cour suprême et la suspension de l’exécution de la décision de l’IBA a été accordée », rappelle Mᵉ Taij Dabycharun.

« Révision judiciaire »

L’homme de loi est d’avis qu’il faudra trouver un équilibre, avec le nouveau dispositif technologique et l’utilisation croissante des plateformes sociales et autres moyens de communication. « Nous avons été témoins d’une quantité énorme d’informations diffusées à la radio ou sur des plateformes associées ainsi que des abus commis », indique-t-il. 

Pour répondre à une telle tendance croissante, il est grand temps, selon lui, que des modifications soient apportées à nos lois statutaires existantes et que notre droit ne reste pas archaïque. En fin de compte, le gouvernement change et la loi restera et sera utilisée par un autre régime.

« Si nous considérons d’autres dossiers déposés, nous observerons qu’il existe d’autres panels qui ont été constitués, tels que le Financial Services Review Panel et l’Independent Review Panel, entre autres. Leurs membres sont nommés par le ministre compétent. Ils prêtent normalement serment d’office. Dans notre contexte particulier, une section spécifique est proposée. Celle-ci stipule que ces membres ne doivent être sous le contrôle d’aucune autre personne », souligne l’avocat Taij Dabycharun.

Pour lui, c’est un début, et il est évident que des améliorations peuvent être apportées à l’avenir. Cependant, en se basant uniquement sur les nouveaux amendements, il évoque qu’il serait difficile qu’un tel panel adopte des manœuvres dictatoriaux. 

Cependant, toute décision d’un tel comité est susceptible de révision devant la Cour Suprême, soutient l’homme de loi.

Faut-il créer un tribunal pour dissiper les doutes ? « À mon humble avis, le panel s’acquittera plus ou moins de la même tâche que le tribunal. Cependant, c’est un début. On devrait se poser quelques questions de base : combien d’affaires seraient envoyées au tribunal et combien de plaintes devraient être traitées ? La question suivante, qui est certainement discutable, c’est qu’est-ce que le tribunal ferait-il de plus que le présent panel ? » s’interroge l’homme de loi. Il suggère que des débats doivent être menés et que toutes les parties concernées partagent leurs opinions sur le sujet pour pouvoir prendre une décision éclairée. C’est-à-dire, si un tribunal serait plus approprié dans les circonstances, conclut l’avocat Taij Dabycharun.

 

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