Randonnée : l’appel de la montagne, la voix de la prudence

Le décès d’un touriste au Morne rappelle l’importance d’une préparation sérieuse, d’équipements adaptés, de vigilance météo et d’un guide. Randonnée sûre rime avec respect, anticipation et prudence.

Un drame. Le décès récent d’un jeune touriste allemand, tombé alors qu’il escaladait la montagne du Morne, a jeté une ombre sur l’un des plus beaux sites de Maurice. La randonnée, souvent synonyme d’évasion et de liberté, peut aussi basculer dans le danger lorsqu’elle est abordée sans préparation.

Pour comprendre les bons réflexes à adopter, nous avons rencontré Yassir Mackdoombaccus, 43 ans, guide certifié depuis 2022 par la Mauritius Tourism Authority. Un passionné, passé des petites marches en forêt à une carrière professionnelle en 2017. Autant dire qu’il connaît les sentiers mauriciens comme sa poche. Il insiste sur le fait qu’une randonnée exige une préparation sérieuse et que chaque participant doit évaluer honnêtement son niveau avant de s’engager sur un parcours. Son mantra ? « Hike safe. Ne prenez pas de risque inutile afin de vous protéger ainsi que les autres. »

L’équipement, votre meilleur allié

On l’oublie trop souvent : même une balade courte demande un minimum d’équipement. Yassir est catégorique : « De l’eau, de la nourriture, de la crème solaire, du spray anti-moustique et surtout le first aid kit. » Le téléphone portable n’est pas un gadget : il peut sauver une vie en cas de pépin.

Côté textile, place au dry fit, léger, respirant et qui sèche vite. Et sur les parcours plus corsés ? Casque et corde sont incontournables pour escalader en toute sécurité.

Les bons gestes, les mauvaises habitudes

Avant même de poser un pied sur le sentier, il y a des règles à intégrer. « Avant une randonnée, certains aiment écouter de la musique à un volume élevé… Une règle importante doit être qu’il faut entendre quand les autres parlent. » insiste Yassir. Il rappelle également l’importance de savoir reconnaître ses limites et de ne pas se mettre en danger. 

Petit-déjeuner costaud, hydratation régulière, et surtout pas d’alcool ni de cigarettes la veille : autant de détails qui font la différence une fois sur les pentes.

Météo : l’arbitre du jeu

Maurice, c’est le soleil, mais aussi des pluies soudaines. « La météo joue un rôle crucial. Si vous partez en randonnée dans la matinée vers 7 heures ou 8 heures, n’oubliez pas de vérifier la météo.  Si la météo parle de risque de pluie, même s’il fait beau, ne partez pas. » conseille le guide. Une appli météo en poche, et la sagesse de rebrousser chemin si les nuages menacent : voilà la clé pour assurer la sécurité du groupe.

Le kit de premiers secours

Selon Yassir, le kit doit être adapté à la montagne : « Spray anti-douleur, bandage, pansement adhésif (Elastoplast). Et si possible un climbing helmet au cas où des rochers tombent. » Ces équipements permettent de faire face aux blessures légères et aux situations d’urgence en attendant l’arrivée des secours.

Préparer ses jambes et son souffle

Pas besoin d’être un athlète, mais un minimum de condition s’impose. « Il est obligatoire d’avoir une préparation physique minimale, comme par exemple faire la marche. Il vous faut de l’endurance pour pouvoir escalader une montagne. » Son conseil : commencer par Le Pouce, trois mois d’entraînement régulier, avant d’attaquer les géants du Morne ou de Pieter Both. De préférence, accompagné d’un guide.

Les erreurs les plus fréquentes

La spontanéité, mauvaise conseillère. « À Maurice, beaucoup de gens décident spontanément d’‘escalader une montagne’ le matin même, parfois sans préparation ni équipement. C’est une mauvaise idée et vous mettez tout le monde en risque. » Un rappel clair : en montagne, l’improvisation se paie cher.

Avec les enfants, oui mais…

Bonne nouvelle pour les familles : certaines randonnées de niveau 3 sont adaptées aux enfants (kid-friendly). « Pour les enfants ou les randonneurs débutants, demandez toujours des conseils au guide afin de savoir si le parcours est 
adapté », précise-t-il.

En cas de coup dur

Se perdre ou se blesser peut arriver à tout le monde. Que faire ? « Si vous savez que vous avez perdu chemin et qu’il va commencer à faire nuit, préparez la nourriture, cherchez où vous abriter. Dans le cas où il commence à pleuvoir, cherchez un lieu en hauteur afin d’éviter les accumulations d’eau », conseille Yassir. Calme, entraide, anticipation : les trois réflexes à garder.

Respecter la montagne

Pour Yassir, la randonnée n’est pas qu’une question de performance. C’est aussi un engagement : « Pas de musique, pas de cigarette, ne jetez rien, ne cueillez pas les plantes et n’allumez pas de feu. » La nature mérite mieux que nos déchets et nos distractions.

Et pour les touristes ?

Aux visiteurs étrangers, le guide recommande de s’appuyer sur les groupes de randonnée des réseaux sociaux ou, mieux encore, de prendre un guide. « Connaître le parcours et être accompagné augmente considérablement la sécurité. »

Outils et suggestions pratiques

Et si la technologie venait à la rescousse ? « Il aurait été bien que le gouvernement fasse une application où les gens puissent indiquer quel parcours ils partent faire, combien ils sont… » imagine Yassir. En cas de blessure, les randonneurs pourraient alors appuyer sur une touche d’urgence pour prévenir immédiatement les secours. Un outil simple, mais potentiellement décisif en cas d’urgence.

Sara Lutchman