
- Lait en poudre, huile de soja, fromage, lait infantile et couches pour bébés subventionnés
Ce samedi 16 août, le gouvernement a dévoilé les premières mesures du Price Stabilisation Fund, le fonds de stabilisation des prix destiné à protéger le pouvoir d’achat des Mauriciens. Le prix du pain maison reste inchangé, tandis que, dès le 26 août, le coût de certains produits de première nécessité – lait en poudre, huile de soja, fromage, lait infantile et couches pour bébés – devrait baisser grâce aux subsides.
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À l’Hôtel du gouvernement, le Premier ministre adjoint Paul Bérenger et le ministre du Commerce Michael Sik Yuen ont présenté les recommandations validées la veille par le Conseil des ministres. Ces propositions ont été élaborées par un comité interministériel présidé par Paul Bérenger, avec la participation du ministre du Travail Reza Uteem, du ministre de l’Industrie Aadil Ameer Meea et du Junior Minister aux Finances Dhaneshwar Damry.
Créé dans le cadre du Budget 2025-26 et annoncé dans le manifeste électoral de l’Alliance du Changement, le Price Stabilisation Fund démarre avec un capital de Rs 2 milliards pour cette année fiscale. Les premiers subsides concernent le pain maison et cinq autres produits de base, pour un coût estimé à Rs 850 millions. Parmi, Rs 400 millions seront consacrées aux nouveaux subsides ciblant le lait en poudre, l’huile de soja, le fromage, le lait infantile et les couches, sur six mois. « Nous espérons élargir ce système à d’autres produits essentiels si les conditions du marché le permettent. Nous passerons en revue ce système et dans six mois, nous déciderons de la marche à suivre », a précisé Paul Bérenger.
D’autre part, le pain maison, symbole de stabilité pour les Mauriciens, reste à Rs 2,60 l’unité depuis 2012, malgré une hausse de plus de 55 % des coûts liés à l’électricité, au transport, aux salaires et aux intrants importés. Selon le gouvernement, maintenir ce prix nécessite un soutien annuel de Rs 450 millions, contre Rs 300 millions si le coût était revu de Rs 2,60 à Rs 3. « Pour le moment, le prix reste inchangé », a insisté Paul Bérenger, ajoutant que les boulangeries continueront à percevoir un subside de 24 sous par pain. « Ce fut une décision bien difficile. Logiquement, on aurait dû augmenter le prix. »
Le Premier ministre adjoint a également mis en garde contre les abus : « Cette farine subsidiée, destinée au pain, servait à d’autres produits non contrôlés. Nous combattrons ces pratiques au maximum. »
Paul Bérenger a également rappelé que l’État ne peut agir sur les hausses de prix à l’étranger, mais qu’il est en mesure de limiter celles sur le marché local. « Nous surveillerons les cartels et les commerçants qui tenteraient d’en abuser », a-t-il conclu, annonçant un renforcement des contrôles.
Sanjay Matadeen, économiste : « Il faut toucher des produits de consommation de masse »
S’il dit accueillir la mesure visant à subventionner cinq produits considérés comme de base, l’économiste Sanjay Matadeen espère toutefois que le système sera amélioré. « Comme promis, le gouvernement a introduit l’une des mesures annoncées dans le Budget pour aider surtout ceux situés au bas de l’échelle, et je salue cette initiative », dit-il.
L’économiste apporte toutefois un bémol à sa réflexion : « J’espère que le gouvernement réalisera une étude sérieuse du marché pour déterminer quels sont les produits de grande consommation, comme les grains secs, le thé, le riz basmati – qui n’est plus un luxe – et les conserves. Cette étude permettra de mettre des subsides sur ces produits également. »
Pour Sanjay Matadeen, « il est impérieux de savoir que ceux situés au bas de l’échelle dépensent la majeure partie de leur modeste budget pour l’achat de produits alimentaires, et j’espère que le gouvernement optimisera le système de ces subsides ».

Produits pétroliers : l’ombre de Mangalore
Fin mars 2019, le gouvernement d’alors annonçait le non-renouvellement du contrat d’approvisionnement en produits pétroliers avec le fournisseur public indien Mangalore Refinery Petrochemicals Ltd. Une décision qui, à l’époque, avait surpris autant qu’elle avait suscité des interrogations.
Samedi, le Premier ministre adjoint Paul Bérenger est revenu sur cet épisode. Sans détour, il a dénoncé ce choix, y voyant une rupture injustifiée. « Mangalore nous aidait beaucoup. Ces gouvernements de bandits, qui nous ont gouvernés pendant dix ans, ont annulé le contrat, ont manqué de respect à l’Inde et à Mangalore. Pourquoi ? Pour acheter des produits pétroliers par le biais de courtiers », a-t-il lancé, indigné.
Le leader du MMM a également élargi son propos au contexte actuel, marqué par de fortes incertitudes sur le marché pétrolier mondial. Selon lui, l’instabilité au Moyen-Orient et ailleurs rend toute prévision périlleuse. « Dès que l’on observe une baisse du cours du pétrole, il faudrait en théorie répercuter cette amélioration. Mais cela ne se fait pas aussi simplement : il y a des dettes à rembourser, des découverts à combler. Les instabilités sur le plan pétrolier font que nous devons agir avec beaucoup de prudence », a-t-il souligné.
Enfin, Paul Bérenger a pointé du doigt l’évolution financière de la State Trading Corporation (STC), autrefois source de revenus pour l’État. « La STC versait des dividendes au gouvernement jusqu’en 2020. Mais à partir de 2021, elle a cessé tout paiement », a-t-il rappelé.
Une aide jugée trop limitée
Si la subvention de certains produits alimentaires est saluée, son impact reste néanmoins limité, estiment les consommateurs. Ils regrettent que les denrées essentielles, qui pèsent le plus sur le budget des familles, ne soient pas concernées. Certains d’entre eux s’expriment.
Rebecca Lallmohamud, 42 ans, entrepreneuse : « Cela n’aura aucun impact… »
« Avec l’aide financière récemment annoncée, je ne pense pas vraiment que mes courses vont s’alléger, car ce ne sont pas les produits essentiels que l’on utilise tous les jours qui sont concernés », estime Rebecca Lallmohamud, 42 ans, entrepreneuse. Pour elle, l’effet de la mesure sera marginal : « Même si cette aide existe, je trouve qu’elle ne changera rien, puisque les prix des produits nécessaires ont augmenté bien davantage. Du coup, cela n’aura pas d’impact sur mes habitudes ; je continuerai comme avant, car il faut bien manger tous les jours. »
Krish Chedumbrun, 32 ans, professionnel de la communication : « Il aurait fallu inclure poulet, viande, légumes... »
Krish Chedumbrun, 32 ans, professionnel de la communication et du marketing, salue l’initiative gouvernementale visant à subventionner certaines catégories de produits. Mais il nuance aussitôt : l’impact risque d’être restreint pour une majorité de familles.
« Je pense que c’est une bonne chose que le gouvernement prenne des mesures pour soulager les familles. Les subsides annoncés vont certes aider, mais ils concernent seulement cinq catégories de produits. C’est positif pour ceux qui en ont vraiment besoin, comme les jeunes parents, mais cela reste assez limité », estime-t-il.
Face à la flambée générale des prix, il juge que le panier des produits subventionnés aurait pu être élargi. « Avec le coût de la vie qui augmente pour tout le monde, il aurait été plus pertinent d’inclure aussi des produits de consommation courante comme le poulet, la viande ou certains légumes. Ce sont ces achats qui pèsent le plus sur le budget des familles aujourd’hui. »
Krish Chedumbrun reste lucide : « Dans la pratique, son impact restera restreint à une partie de la population. La majorité des foyers espère des mesures plus larges et plus inclusives. »
G.M., 37 ans, éducatrice : « J’attends des prix plus justes »
Pour G.M., 37 ans, éducatrice, le constat est clair : « Ces derniers mois, j’ai bien constaté une hausse importante des prix, surtout pour les aliments de base comme le riz, les légumes et le lait, et j’espère que ce changement pourra améliorer les choses. »
Face à cette flambée, son quotidien a dû s’adapter. « Je fais beaucoup plus attention à ce que j’achète, je prends moins de produits, je compare les prix et je choisis souvent les marques les moins chères », confie-t-elle. Un arbitrage constant, dicté par un budget qui ne suffit plus à couvrir les dépenses essentielles.
Mais malgré ces efforts, la pression financière reste omniprésente. « Elle m’oblige à faire des sacrifices, en me concentrant uniquement sur les produits essentiels », poursuit l’éducatrice. Pour elle, cette situation n’est pas due au hasard : « C’est un ensemble de facteurs : la crise, les grandes surfaces et le manque de contrôle, chacun fixant ses prix comme il veut. Je ne pense pas que les autorités ou les magasins fassent assez pour aider les gens. »
Au-delà de simples mesures ponctuelles, G.M. réclame un vrai changement. « Ce que j’attends, ce sont des prix plus justes, davantage de contrôle – par exemple avec des prix fixes – et surtout plus de soutien pour les familles qui n’arrivent plus à s’en sortir », plaide-t-elle.
K.S., 38 ans, enseignante : « Il faut cibler les denrées de base qui pèsent lourdement sur le budget »
K.S., 39 ans, enseignante, accueille l’annonce d’une nouvelle baisse des prix avec prudence. « Je salue l’initiative, mais honnêtement, pour réellement alléger le panier de la ménagère, il faudrait revoir les prix des produits de base : le riz, les grains secs, l’huile – et pas uniquement l’huile de soja. » Pour elle, ce sont ces produits du quotidien « que les familles consomment tous les jours, et c’est là que la différence se ferait vraiment sentir ».
Certes, la réduction sur le lait, les couches ou encore le fromage peut soulager certains foyers, notamment les parents de jeunes enfants. « Mais pour monsieur et madame Tout-le-Monde, ça ne change pas grand-chose. Dans mon cas, je fais à peine une cinquantaine de roupies d’économie sur un caddie. »
Elle souligne aussi les limites d’une baisse ciblée : « On ne devrait pas avoir à choisir entre la santé et l’économie. Si seule l’huile de soja est rendue plus accessible, cela force certaines familles à faire des concessions qui ne sont pas forcément bonnes pour leur santé. »
Et de rappeler une réalité partagée par beaucoup : « Pour consommer de la viande, du poisson ou du poulet, il faut déjà en avoir les moyens. Donc même avec quelques baisses, le quotidien reste difficile. » Sans vouloir « cracher dans la soupe », K.S. insiste : « Si l’on veut vraiment soulager les familles, il faut cibler les denrées de base qui pèsent lourdement sur le budget et permettre aux consommateurs de manger sainement sans sacrifier leur porte-monnaie. »

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