Economie

Économies mondiales: comment échapper au ‘piège du revenu intermédiaire’ ?

Sortir du piège du revenu intermédiaire ne sera pas une mince affaire pour Maurice. Sur la centaine de pays qui ont atteint le stade de ‘Middle Income Trap’ dans les années 1960, seule une dizaine a réussi à éviter le piège du revenu intermédiaire dans les années 2000, selon les statistiques de la Banque mondiale. Pour les besoins opérationnels et analytiques, le principal critère utilisé par la Banque mondiale (BM) pour classer les économies est le revenu national brut (RNB) par habitant. Les classifications sont établies chaque année le 1er juillet. Sur la base du RNB par habitant, on distingue les économies à faible revenu, à revenu moyen (sub-divisées elles-mêmes en ‘revenu moyen inférieur’ et ‘revenu moyen supérieur’) et à haut revenu. Les groupes sont les suivants: faible revenu, USD 975 ou moins ; revenu moyen inférieur, de USD 976 à 3 855 ; revenu moyen supérieur, de USD 3 856 à 11 905 ; et revenu élevé, supérieur à USD 11 906. Maurice a un RNB par habitant de USD 9 630, faisant d’elle un pays à revenu moyen supérieur, selon la BM. Elle fait partie d’une liste des 14 pays qui devraient franchir le cap des pays à revenu intermédiaire, selon une étude de la Trust Bank of America. Pourtant, avec les différents freins à son développement économique, le pays est loin d’avoir le potentiel de réussir cet exploit.

Croissance supérieure à 5 %

La croissance du Produit intérieur brut (PIB) mauricien n’arrive pas à atteindre les 4 % depuis 2010, alors que les observateurs estiment qu’il faut au moins un taux de 5% pour atteindre le potentiel socio-économique du pays. « Il nous faut une croissance supérieure à 5 % sur quatre ou cinq ans pour espérer atteindre le statut de pays à revenu élevé. Autant dire qu’on est mal parti avec les déficiences actuelles de notre économie », souligne Dan Maraye, ex-gouverneur de la Banque centrale. Dan Maraye cite, comme problème structurel, l’écart grandissant entre riches et pauvres. « À ce rythme, comme le souligne le récent rapport de la Banque mondiale, on risque de se retrouver avec, d’un côté, les riches, et de l’autre, les pauvres. » Les autres problèmes auxquels est confrontée Maurice sont la dette publique, ou encore un taux de chômage élevé, selon l’ancien gouverneur. « Les problèmes sont multiples. La réalité est que nous avons une économie qui fait face à de nombreux défis. Les décideurs politiques doivent venir l’expliquer. Ils doivent parler dans un langage franc, au lieu de faire des promesses qu’ils n’arrivent pas à honorer. J’aurais souhaité voir Maurice franchir le cap du revenu intermédiaire, mais pour être honnête, comme l’histoire l’a démontré, il nous faudra sans doute nous armer de beaucoup de patience pour y arriver. » Il faut remonter à 2008 pour voir un taux de croissance de plus de 5 % (5,3 %). Le pays avait également réalisé 5,4 % en 2007 et 5,1 % en 2006. Mais depuis 2009 et la crise économique internationale, Maurice est entrée dans une phase de faible croissance. Rajiv Servansingh, observateur économique, abonde dans le même sens. « Il faut une croissance économique soutenue sur plusieurs années pour espérer sortir de ce piège. Nous avons certes les moyens, mais il faudrait avant qu’on résolve tous les problèmes structurels auxquels nous sommes confrontés », dit-il.  Et d’expliquer : « Au cours de ces 20 dernières années, l’économie mauricienne s’est reposée sur quatre piliers principaux : l’agriculture, la manufacture, les services financiers et le tourisme. Mais au cours de cette période, il n’y a pas eu de changements radicaux dans ces secteurs pour nous permettre d’aspirer à être un pays à revenu supérieur. » À titre d’exemple, le secteur manufacturier aurait dû se tourner vers des produits à forte valeur ajoutée pour éviter de dépendre d’une main-d’œuvre bon marché, selon Rajiv Servansingh. « Mais nous n’avons pas réussi à le faire, au contraire la contribution de ce secteur au PIB ne cesse de péricliter. Quant à l’industrie touristique, depuis le début de la crise économique, les hôteliers ont bradé la destination pour continuer à réaliser leurs chiffres d’affaires. Si l’industrie s’est reprise l’an dernier, ce n’est pas grâce aux changements apportés, mais plutôt à l’insécurité pesant sur nos compétiteurs. Il nous faut changer de politique économique. Car il faut aussi souligner que malgré les annonces, nous n’avons pas vu vraiment l’émergence de nouveaux piliers économiques. » Et si Vision 2030 du gouvernement venait remédier aux problèmes structurels auxquels est confronté le pays ? « Vision 2030, c’est de la théorie. Je mets au défi quiconque de faire une projection économique sur plus de cinq ans. C’est impossible car nous avons une économie tellement vulnérable et une économie mondiale en pleine mutation », soutient Dan Maraye. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"10529","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-19535","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"920","height":"435","alt":"Revenu National Brut (RNB)"}}]]
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