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Perspectives 2022 : le secteur agricole appelé d’urgence à se réinventer

Une revalorisation du métier d’agriculteur est essentielle et cela passe par la formation. Photo d’illustration

Cette nouvelle année sera faite de défis pour le secteur agricole. Raison pour laquelle les planteurs lancent un appel au gouvernement pour des mesures adéquates et opportunes. 

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Adaptabilité, dialogue, formation, revalorisation seront les maîtres mots dans le secteur agricole en cette nouvelle année. Les parties prenantes sont unanimes : les défis seront légion en 2022. C’est pourquoi il est nécessaire que le gouvernement les soutienne, avancent-elles. 

D’ores et déjà, l’on prévient que certains légumes se feront rares. En cause, les coûts de production qui ont doublé et le manque d’intrants sur le marché, affirme Vivek Bhujun, directeur de Fresh Veggie Ltd. Cette situation, dit-il, résultera automatiquement en une hausse des prix. « Si de nouvelles stratégies ne sont pas adoptées et que nous n’obtenons pas le soutien nécessaire du gouvernement, ce secteur va certainement mourir et nous dépendrons davantage des légumes importés », prévient-il. Il anticipe que de nouveaux arrivants dans le secteur ne pourront survivre longtemps, car ils devront investir beaucoup d’argent pour de faibles bénéfices. 

Shemida Ramdewar-Emrith, présidente de la Vegetables & Fruits Auctioneers Association, rappelle que les prix des légumes et fruits locaux varient selon l’offre et la demande. Les prix des fertilisants et traitement contre les ravageurs, insectes et maladies, ont considérablement augmenté, ce qui n’est pas sans conséquence. « Pour le moment, la production se porte bien, mais cela ne va peut-être pas durer. On essaie de rester positif tout en étant réaliste », dit-elle.

Avec les effets du changement climatique et de la pandémie, de même que la difficulté d’importer dans certains cas, le secteur agricole est appelé à subir une transformation durable, fait valoir Jacqueline Sauzier, secrétaire générale de la Chambre d’agriculture de Maurice. Une des premières nécessités est de s’adapter aux conditions économiques et environnementales fluctuantes afin d’être plus productif et efficient. « Le climat restera une de nos principales préoccupations, car notre insularité nous rend vulnérables aux variations extrêmes dues au changement climatique », souligne-t-elle. 

Elle n’en démord pas : des mesures d’adaptation doivent impérativement être mises en pratique. Le secteur a besoin de changer son mode de production et d’introduire des critères de durabilité dans ses pratiques agricoles, soutient-elle. 

D’autant qu’avec la fermeture de certains pays et la hausse des prix des produits importés, des Mauriciens ont revu leur mode de consommation avec un retour vers les produits locaux et de saison. Tandis que certains producteurs ont adopté une nouvelle approche avec un mode de commercialisation plus proche des consommateurs, fait-elle remarquer. 

Ainsi, pour Jacqueline Sauzier, il est nécessaire de définir un cadre pour que chaque partie prenante trouve sa place dans la chaîne de production. Cela passera par une planification des productions et par la mise sur pied d’un espace de dialogue et de collaboration entre les parties concernées pour s’assurer que les productions locales servent au maximum de matières premières à la transformation agroalimentaire. Jacqueline Sauzier en est persuadée, la formation occupera une place importante en 2022. Une revalorisation du métier d’agriculteur est, selon elle, essentielle. 

Pour sa part, Khoushbou Singh Sewraj, coordinatrice de projet à l’Association FALCON et secrétaire de Falcon Young Farmers, estime que les projets se concentrant sur la transformation des aliments locaux et l’autonomisation des jeunes agriculteurs sont conformes aux objectifs du gouvernement. Ceux-ci, affirme-t-elle, contribueront à donner un coup de pouce à l’agriculture nationale.

Chiffres à retenir 

Une superficie totale de 3 182 hectares sous culture vivrière a été récoltée au cours du premier semestre de 2021, contre 2 981 hectares en 2020, ce qui représente une hausse de 6,7 %. La production a augmenté de 19,5 %, passant de 31 120 tonnes à 37 193 tonnes.

Industrie sucrière : des réformes structurelles attendues

En juin 2021, une superficie de quelque 511 hectares sous culture de la canne à sucre a été récoltée, soit 38 081 tonnes de canne à sucre et 4 401 tonnes de sucre. Contre une superficie de 467 hectares récoltée en 2020, 37 104 tonnes de canne à sucre et 5 082 tonnes de sucre, indique Statistics Mauritius.

Ces chiffres révèlent l’importance de dynamiser la production de sucre en cultivant de nouvelles cultures. S’il salue le plan d’aide du gouvernement, Salil Roy, président de la Planters’ Reform Association, fait toutefois remarquer que certaines mesures ne sont pas mises en œuvre à temps. En 2022, il faut impérativement miser sur des réformes structurelles, effectuer des recherches en laboratoire sur le rendement de la canne et répondre au problème de vieillissement de la main-d’oeuvre afin de dynamiser le secteur, affirme-t-il.

Autre piste, selon Salil Roy : « Il faut arrêter de politiser les institutions et donner la chance aux jeunes diplômés d’apporter un nouveau souffle au secteur. »


Questions à…Shane Hardowar, Senior lecturer à l’université de Maurice  : «La production agricole sera meilleure en 2022»

shaneQuel regard portez-vous sur le secteur agricole ? 
Je suis persuadé que la production agricole sera meilleure en général en 2022. Tout va dépendre de la saison cyclonique. 

Les pluies de forte intensité peuvent être néfastes à la production de légumes. Il faudra s’attendre à de fortes pluies durant les trois premiers mois très chauds de janvier à mars 2022 qui affecteront la production agricole et influenceront considérablement le prix des légumes. Malgré cela, dans l’ensemble, ce sera une bonne année pour la production agricole à Maurice.

Quels sont les enjeux pour le secteur ? 
La hausse des prix des intrants, les coûts d’opération, la dépréciation de la roupie et la pandémie seront les défis à relever en 2022. 

La diversification sera-t-elle le maître mot cette année ? 
Tout à fait. La culture vivrière et maraîchère verra une plus grande diversification en 2022. Avec le plan d’aide mis à la disposition des petits planteurs et entrepreneurs, l’hydroponie sera privilégiée. Le gouvernement encourage le « sheltered farming ». Il y a aussi un engouement pour l’aquaponie, que ce soit à petite ou grande échelle. 

Une plus grande importance doit être accordée à la production organique et biologique en mettant l’accent sur le MauriGAP qui est considéré comme le standard local de production durable de fruits et légumes. Le gouvernement a proposé un plan d’aide et de relance pour le secteur agricole afin d’optimiser l’autosuffisance. Les terres abandonnées devront être attribuées aux jeunes entrepreneurs. Il faudra apprendre l’autonomie à travers le « backyard gardening » dans les régions urbaines pour assurer la sécurité alimentaire dans le pays.

 

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