Interview

Me Satyajit Boolell, SC, Directeur des poursuites publiques : « Le système judiciaire est un rempart contre les abus »

DPP Le DPP, Me Satyajit Boolell.

Une fois de plus, le Directeur des poursuites publiques (DPP) a répondu présent à l’invitation de DIS-MOI samedi dernier.

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Durant deux heures, Me Satyajit Boolell, Senior Counsel, a fait un exposé sur le cours avancé en droits humains et citoyenneté, les fonctions du DPP et les responsabilités de son bureau selon la Constitution.

« On attend beaucoup de nous, les Directeurs des poursuites publiques. Les victimes veulent que justice soit rendue. Les criminels, eux, veulent un procès équitable, respectueux de leurs droits. »

Durant votre conférence avec les citoyens du cours avancé en droits humains et citoyenneté, ils ont été unanimes à vous trouver abordable, pédagogue et désireux de partager votre passion pour la justice. Est-ce une posture ou les Directeurs des poursuites publiques modernes, dans d’autres pays, agissent-ils comme vous ?
Il est important qu’il y ait une ouverture aux citoyens et qu’on puisse leur donner de meilleurs services. On attend beaucoup de nous les Directeurs des poursuites publiques (DPP). Les victimes veulent que justice soit rendue.

Les criminels, eux, veulent un procès équitable, respectueux de leurs droits. La communauté, elle, souhaite une bonne administration de la justice. La confiance de la population en ce bureau est primordiale.

Oui les DPP modernes prennent les devants pour éclaircir certains points. Si vous jetez un œil au News Centre du site Internet du Crown Prosecution Service (CPS), vous verrez comment les DPP communiquent maintenant.

Alison Saunders est appelée à faire des discours et à écrire des articles pour répondre aux interrogations des citoyens, mais également à expliquer ce que fait le CPS. Le CPS émet régulièrement des communiqués et cela se fait aussi en Australie, en Afrique du Sud et dans les pays des Caraïbes.

Les pouvoirs du DPP sont clairement établis par la Constitution, sous l’article 72. Qui a le pouvoir de suspendre et de mettre fin au mandat du DPP ?
La Constitution est claire. L’article 93 stipule les circonstances dans lesquelles un DPP peut être démis de ses fonctions. Et la Constitution est toujours la loi suprême de ce pays.
Le DPP peut être forcé à la sortie s’il a atteint l’âge légal de la retraite ; s’il est incapable d’assumer ses fonctions pour cause d’infirmité physique ou mentale ou autres, mais aussi pour comportement abusif.

Il y a une procédure pour qu’un DPP soit démis de ses fonctions, selon les articles 93 (3) et 93 (4) de la Constitution. La présidente de la République devra alors référer la question à un tribunal institué pour faire des recommandations au président sur la question de savoir si le DPP doit être remplacé ou non à cause de sa conduite.

Si la Judicial and Legal Service Commission (JLSC) considère qu’il faut enquêter sur le DPP pour voir s’il faut le faire partir, elle a le droit d’instituer un tribunal pour faire la lumière sur toute cette affaire. La JLSC doit alors faire des recommandations à la Présidente en ce sens.

Pouvez-vous expliquer clairement la démarcation entre le travail de la police et celui du DPP. Comment la chaîne de la justice fonctionne-t-elle ?
La police enquête dans les affaires criminelles et elle dispose d’une entière liberté dans ses investigations. Après l’enquête, le dossier est transmis à notre bureau pour un avis légal. Le DPP peut demander à la police d’éclaircir certains points dans l’enquête pour avoir une meilleure idée de l’affaire. Il y a souvent des zones d’ombre qu’il faut éclaircir. C’est ce qui doit être fait pour avoir une bonne administration de la justice.

Nous sommes d’accord, vous et moi, sur un point. Malgré ses imperfections, le système judiciaire est encore crédible à Maurice. Il reste le rempart contre toute velléité d’exercer un pouvoir autoritaire. Que diriez-vous à ceux qui sont sceptiques ?
Le système judiciaire à Maurice est définitivement un rempart contre tout abus surtout dans le contexte constitutionnel. Nous avons un pouvoir judiciaire qui est indépendant et les juges de ce pays jouissent d’une security of tenure tout comme le DPP, selon les termes de la Constitution.

La Cour suprême a toujours été à la hauteur de ses responsabilités dans plusieurs instances. Les jugements qu’elle prononce en plusieurs matières, incluant les droits constitutionnels des citoyens, le démontrent.

Avez-vous confiance en la police mauricienne et se montre-t-elle digne de confiance ces temps-ci ?
Oui, j’ai confiance en la police mauricienne. Pendant mes 30 ans dans la fonction publique, j’ai vu plusieurs policiers responsables et dignes et qui ont fait honneur à leur pays.

N’empêche qu’il y a aussi des « tontons macoutes » qui n’hésitent pas à faire un abus de leurs droits et de leurs fonctions. Mais cela dit, heureusement que nous avons un judiciaire indépendant et aussi une profession légale indépendante qui est là pour décourager ces abus.

Que pensez-vous du travail de formation citoyenne menée par DIS-MOI ?
DIS-MOI est une organisation remarquable qui donne une éducation citoyenne et qui fait un très bon travail dans le développement de la conscience citoyenne.

DIS-MOI est un modèle pour toute autre organisation. Elle éduque les citoyens et leur fait prendre conscience de leurs droits et de leurs responsabilités.

Pouvez-vous nous parler de vos activités à Rodrigues. Êtes-vous satisfait ?
Nous avons un bureau à Port-Mathurin. Il a été inauguré le 9 décembre 2011 pour s’assurer qu’il y ait une présence constante de nos officiers sur l’île. Cette mesure a permis de faire bouger les choses à Rodrigues.

Il y a un résumé des cas à la cour de Rodrigues sur notre site Internet dpp.govmu.org. Le but est de donner les informations voulues à toutes les parties concernées.

En sus de cela, les officiers de notre bureau sont encouragés à faire des choses importantes quand ils sont à Rodrigues, comme former les Law Enforcement Officers de Rodrigues.

Nous organisons aussi ces formations pour que les policiers ou d’autres fonctionnaires responsables chargés de faire respecter les lois n’enquêtent pas en faisant des abus. Il est important de tout faire selon les paramètres légaux.

Depuis l’ouverture du bureau du DPP à Rodrigues, nous avons rencontré les élèves de Form I à Form III du Terre-Rouge College, de Rodrigues College et de Grande-Montagne College. Des copies de Tanya so Zistwar leur ont été distribuées. Nous sommes satisfaits du travail accompli, mais nous visons toujours plus haut.

On dit que la justice est excessivement lente à Maurice ? Comment arrivez-vous à fonctionner avec votre personnel de 60 personnes alors que les crimes ont augmenté de façon drastique ?
Si la justice est lente, il y a toujours une solution. Tournez-vous vers la Cour. S’il y a des abus, elle tranchera.

Elle a le pouvoir d’enlever des procès pour abus de procédure. Un délai excessif causera sans doute préjudice à l’accusé, mais il revient à la Cour de décider si le délai est vraiment excessif ou pas.

En tout cas, notre bureau fait tout ce qui est possible pour que cela n’arrive pas. Nous avons organisé notre travail de sorte à ce que nous puissions travailler dans les nombreux districts en même temps. Il est de notre devoir de veiller à ce qu’il n’y ait pas de délai abusif.

Le bureau du DPP est composé de plusieurs officiers, dont le Deputy DPP, les Senior Assistant DPP et les Assistant DPP. Nos officiers ont un code établissant les critères pour décider d’une poursuite, ainsi qu’un  plan de travail défini.

Pour les dossiers complexes et très médiatisés, l’affaire est traitée avec l’aide d’un superviseur qui est un officier ayant beaucoup d’expérience.

L’opinion d’autres officiers plus expérimentés et celle du DPP sont recherchées avant de prendre des décisions dans certains dossiers.

On essaie autant que possible de répondre à l’attente des citoyens dans un délai raisonnable malgré le nombre de crimes qui augmente.

« L’indépendance de la justice est primordiale dans une démocratie »

« Connaître ses droits dans un État de droit est primordial. C’est comme cela que vous saurez si les autorités appliquent la loi comme il se doit. » Me Satyajit Boolell explique en détails son rôle en temps que DPP. « Qui examine les dossiers dans votre bureau ? Est-ce que les politiciens vous appellent ou vous mettent la pression pour ne pas aller de l’avant avec un cas ? Quelles sont les critères pour envoyer un dossier en Cour ou rayer l’affaire ? Que se passe-t-il dans les cas où des mineurs sont impliqués ?

Est-ce qu’il reçoit des menaces dans le cadre de sa fonction ? » Autant d’interrogations auxquelles Me Satyajit Boolell a bien voulu répondre samedi dernier. Il insiste sur le fait que toutes les décisions prises par le bureau du DPP doivent respecter les principes de droit énoncées dans la Constitution et que contrairement à certaines impressions, de nombreuses décisions sont prises de manière collégiale par les membres de son bureau.

Cours avancé en droits humains et citoyenneté, Cours 5 

Ce samedi 12 novembre, Me Coomara Pyaneeandee, leader de la Commission des personnes handicapées, présentera aux participants le cours avancé en droits humains « Les handicapés à Maurice : constat, bilan et perspectives ». Il abordera entre autres questions : Définitions et différents types de handicaps. Historique des handicapés dans le monde. Le UNCRPD : outil vital des handicapés ? Droits des handicapés : forces et faiblesses à Maurice. Vers une handicapped-friendly Republic. Animatrice : Fanirisoa Razanatovo, membre du DOC (DIS-MOI Operational Committee).

Le MACOSS mènera campagne pour une convention des personnes âgées

À l’initiative de DIS-MOI, six organisations non gouvernementales se sont réunies au siège du Mauritius Council of Social Services (MACOSS) le vendredi 21 octobre. L’objectif de la rencontre : faire des représentations pour que Maurice donne tout son appui à l’émergence d’une Convention des droits des personnes âgées à l’Organisation des Nations unies (ONU). Des débats auront lieu à ce sujet  début décembre.

Le MACOSS a, au nom des organisations présentes, écrit au ministère de la Sécurité Sociale, de la Solidarité nationale et des Institutions réformatrices, avec copie au ministère des Affaires étrangères et au Senior Citizens Council. Les organisations suivantes étaient présentes : MACOSS, DIS-MOI, l’université du 3e âGE, le groupement FIAPA (Fédération internationale des associations de personnes âgées), la Mauritius Family Planning and Welfare Association et le Senior Citizens Council.

 

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