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Auto-école: la formation est-elle adéquate ?

Les autorités tentent le tout pour le tout pour faire des Mauriciens des conducteurs responsables. S’il existe une longue liste de pénalités en cas de mauvaise conduite, les regards sont tournés vers la formation dans les auto-écoles. Tient-elle la route ? «Linn gagne so permis dans l’enveloppe sa », ou « so la main encore dibois ». De tels propos sont souvent adressés aux conducteurs à leurs moindres faux pas sur la route. Il faut avoir la tête sur les épaules avant de prendre le volant, répète-t-on dans les campagnes de sensibilisation. Cependant, selon les parties concernées, la formation dans les auto-écoles comporte de nombreuses lacunes que les autorités doivent prendre en considération sans tarder. L’apprentissage de la conduite étant une étape obligatoire pour l’obtention d’un permis, les moniteurs d’auto-école sont à l’affût pour tirer profit de ce marché en plein essor à Maurice. Or, il ne suffit pas de connaître par cœur le parcours emprunté par les examinateurs de la Traffic Branch pour être un bon chauffeur. Les méthodes d’enseignement des moniteurs d’auto-école ne répondent plus aux réalités de nos routes, selon Barlen Munusami, formateur en conduite défensive et auteur du best-seller ‘Le Guide Complet du Conducteur’. « Il est triste de noter que la formation est essentiellement axée sur la réussite de l’examen de conduite pour l’obtention du permis. Les moniteurs incitent les apprenants à apprendre des gestes mécaniques qui leur permettront d’obtenir le permis de conduire sans anicroche. Mais, il ne suffit pas de savoir conduire pour être un bon chauffeur », fait-il valoir. L’agressivité des conducteurs est souvent une cause d’accident, explique Barlen Munusami. Il s’est longuement attardé sur la conduite des Mauriciens pour la rédaction de son livre. [blockquote]« Les chauffeurs font parfois preuve d’égoïsme. Ils conduisent pour eux-mêmes et ne prennent pas en considération les autres usagers de la route. Nous constatons également un vrai manque de courtoisie », affirme-t-il, ajoutant que de nombreux conducteurs surestiment leurs connaissances de la route. « Cet état d’esprit engendre une prise de risque inutile », martèle le spécialiste.[/blockquote]

« Moniteurs marron »

« Il faut régulariser les formations en auto-école », lance pour sa part Manoj Rajkoomar, président de l’association des moniteurs d’auto-école. Il ne passe pas par quatre chemins pour soutenir que les moniteurs d’auto-école opérant actuellement à Maurice ne sont pas tous reconnus par les autorités et opèrent sans les conditions requises. « À Maurice, on compte uniquement une centaine de moniteurs qui opèrent légalement. Ces derniers ont les qualifications requises pour former les apprenants. Cependant, il y a plus d’un millier de moniteurs qui n’ont pas de permis, mais exigent des frais exorbitants. Leurs connaissances ne sont pas mises en doute, mais on se pose des questions sur le niveau de leur formation », avance Manoj Rajkoomar. Les formateurs doivent être formés pour qu’ils puissent donner des leçons de conduite, en ligne avec les changements modernes, en termes de nouvelles techniques et d’infrastructures, entre autres, souligne-t-il. « Le syllabus est obsolète et n’est pas adéquat par rapport aux nouveaux défis sur les routes », affirme-t-il. Barlen Munusami partage l’avis du président de l’association des moniteurs d’auto-école, concernant la formation des formateurs, surtout pour ce qui est de la conduite défensive. Il s’agit, selon lui, des techniques qui permettent à l’apprenant d’anticiper les dangers et d’agir promptement. Il est aussi important de prévoir le comportement des autres usagers de la route, tels que les piétons ou autres automobilistes. « Les moniteurs sont trop centrés sur les examens pour passer le permis. Or, ils devraient aussi enseigner aux apprenants à être un chauffeur responsable et prêt à réagir en cas de danger », explique notre intervenant. La loi permettant à un moniteur de tenir des séances d’apprentissage à la tombée de la nuit, ce dernier devrait profiter pour enseigner aux nouveaux chauffeurs les techniques pour conduire le soir. « On peut ainsi leur apprendre à ne pas se laisser distraire par la lumière des phares par exemple », affirme-t-il. Barlen Munusami précise que très peu d’accent est mis sur le code de la route. « À Maurice, on apprend le code de la route par cœur uniquement pour avoir le Learner’s Licence. On note que très peu de personnes en tiennent compte pendant leur conduite », déplore le formateur en conduite défensive.

Les solutions...

Afin de pallier ces manquements, Manoj Rajkoomar propose un atelier de travail avec les moniteurs d’auto-école et les examinateurs postés à la Traffic Branch. Il soutient que cela peut permettre la création d’un plan de travail qui vise à améliorer les cours dispensés par les moniteurs. « Les examinateurs peuvent faire un compte rendu des erreurs de conduite les plus récurrentes chez les candidats. Cela nous permettra de dispenser des cours adéquats et qui répondent aux exigences. Je suis d’avis que les autorités doivent exiger des cours de mise à jour à tous les moniteurs. C’est une mesure qui portera ses fruits à long terme », dit-il. Barlen Munisami souligne, quant à lui, que les moniteurs ainsi que les apprenants doivent sortir de leur zone de confort pour améliorer la conduite sur nos routes. « Il ne faut pas se concentrer sur le savoir-faire, mais aussi sur le savoir être. La gestion des émotions est un domaine à ne pas négliger dans l’apprentissage de la conduite », précise-t-il.

Une séance d’une heure jusqu'à 2000….

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[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3391","attributes":{"class":"media-image wp-image-5047","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"400","alt":"La variation des prix"}}]] Infograhie (Cliquer sur l'image pour l'agrandir)

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/div> Pour passer par une auto-école, il faut débourser une forte somme d’argent. En effet, à Maurice, les moniteurs d’auto-école sont libres d’imposer les frais qu’ils veulent en fonction de leur réputation, ainsi que leurs services. Ainsi, les prix varient d’une région à une autre. Une séance d’une heure coûte entre Rs 400 et Rs 2 000. Dans ce cas de figure, le moniteur prend souvent plusieurs apprenants pendant la même séance. Pour 30 minutes, le prix passe à Rs 200-250. Certaines auto-écoles prennent entre Rs 350 et Rs 500 pour trois quarts d’heure ou Rs 250 pour 20 minutes. Pour ceux qui proposent des leçons dans la capitale et qui empruntent les mêmes parcours que les examinateurs, les prix sont certainement différents. La présence de plusieurs auto-écoles à Maurice permet aux apprenants d’avoir le choix, soutient Suttyadeo Tengur, de l’Association pour la Protection de l’Environnement et des Consommateurs (APEC). Ces derniers doivent prendre en considération plusieurs facteurs avant de s’inscrire à un cours de conduite. « Les auto-écoles fonctionnent comme tous les autres business. Elles pensent avant tout à leur profit. Mais la compétition saine est une aubaine pour les apprenants, car ces derniers peuvent choisir en fonction de la qualité des services et du prix. Toutefois, les autorités doivent avoir un meilleur contrôle de ce secteur sans pour autant imposer un prix fixe », affirme-t-il. Il est, selon notre interlocuteur, important de savoir qu’en cas de rupture de contrat ou de mauvaise qualité de service, il existe des procédures mises en place pour s’assurer que les droits de consommateurs n’ont pas été lésés.
 

Alain Jeannot, président de Prévention routière Avant-tout: « Le permis temporaire fait ses preuves dans d’autres pays »

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Quels sont les points faibles des conducteurs mauriciens ? Techniquement, les Mauriciens ne sont pas de mauvais conducteurs. Ils connaissent la signification des panneaux de signalisation et sont habiles au volant ainsi qu’au guidon. Ce qui inquiète, c’est l’indiscipline et le manque de courtoisie. Par ailleurs, de nombreuses personnes ne comprennent pas la logique derrière les interdictions. Par exemple, très peu de conducteurs sont conscients qu’une collision à 80 kilomètres heure équivaut à une chute d’un bâtiment de huit étages. Les chauffeurs sous-estiment ainsi les dangers. C’est donc aux moniteurs qu’incombe la responsabilité de transmettre les connaissances nécessaires pour permettre aux apprenants d’être des conducteurs avertis. De plus, il est important d’être discipliné, courtois et de faire preuve d’empathie, bien avant l’obtention du permis de conduire. En quoi les formations locales diffèrent-elles des autres pays ? À Maurice, on a un manquement par rapport à la formation des conducteurs des deux-roues motorisés. Il n’existe aucune école pour enseigner les bases pour manier une motocyclette. Pourtant, nous savons tous que les motocyclistes sont très vulnérables. En France, pour qu’un cyclomotoriste ait accès à la route, il faut qu’il fasse une attestation de sécurité routière, suivie d’un brevet qui comprend cinq heures de pratique. Or, ici, on peut rouler n’importe quelle cylindrée avec un permis d’apprenant pour une durée indéterminée. Dans notre pays, nous avons la fâcheuse habitude de nous attarder sur les symptômes et non la maladie. La sécurité routière est un sujet complexe qui mérite une attention particulière.

Permis de conduire: des amendements au programme

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3392","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-5049","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"600","height":"762","alt":"Le commissaire de police Mario Nobin"}}]] Le commissaire de police Mario Nobin a annoncé des amendements dans les procédures d’examens pour l’obtention du permis de conduire. Il a proposé que le permis soit alloué sur une période probatoire, soit d’une durée d’une année. Par ailleurs, l’apprenti chauffeur devra couvrir un programme défini pendant ses séances d’auto-école. En cas de délit grave, le permis peut être annulé. La loi sera renforcée, et cela envers les conducteurs qui conduisent en état d’ébriété et qui ne respectent pas le code de la route. « Chaque conducteur doit connaître ses responsabilités et faire preuve de discipline sur la route », soutient le commissaire de police. Les piétons et les motocyclistes ne sont pas en reste. S’ils vont à l’encontre des lois, ils seront passibles d’amendes voire de peines d’emprisonnement selon la nature du délit.

Le permis temporaire serait-il une solution ? Je suis pour l’introduction du permis temporaire. Ce système fait déjà ses preuves en Australie, en Belgique, à Singapour et dans d’autres pays développés. Le permis temporaire serait octroyé sous plusieurs conditions. Ces dernières lui permettront de prendre de bonnes habitudes de conduite. Par ailleurs, les conducteurs avec un permis temporaire doivent arborer un P sur leur véhicule. Or, ici un jeune de 18 ans qui vient d’obtenir son permis est à la même enseigne que les autres chauffeurs avec de l’expérience. Ce n’est pas un bon signal pour le nouveau chauffeur. Dans n’importe quelle activité, il y a une période de rodage… Pourquoi pas dans la conduite qui implique la protection et le respect de la vie ?

Procédures pour l’obtention d’un Driving School License

[padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1] [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3393","attributes":{"class":"media-image alignright size-full wp-image-5050","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"454","alt":"Auto-\u00e9cole"}}]]Selon la Road Traffic (Driving School and Instructors) Regulations de 1966, pour obtenir un Driving School Licence, le candidat doit répondre aux critères suivants:
  • L’auto-école doit avoir des reproductions de chaque panneau de signalisation en usage à l’île Maurice.
  • Le titulaire doit être propriétaire d’une voiture à double commande en bon état et approuvée par le commissaire de police.
  • Le titulaire doit tenir un compte indiquant chaque jour les détails de son business.
  • Le titulaire ne doit pas enseigner toute personne qui n’est pas détentrice d’un permis de conduire provisoire.
  • Le programme d’études de l’école doit être approuvé par le Commissaire de Police.
  • La Mauritius Qualifications Authority (MQA) doit reconnaître le moniteur en tant que ‘Trainer’ pour que ce dernier puisse exercer.
  • Toute personne qui fait une application pour un Instructor’s Licence:
    1. doit avoir au moins cinq ans d’expérience dans la conduite de véhicules à moteur
    2. doit avoir une connaissance du code de la route et doit être capable d’expliquer à n’importe quel élève leur contenu et leur signification
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