Sweety Seeroo, 39 ans, a toujours été touchée par les enfants autrement capables. Elle a une relation fusionnelle avec son frère atteint d’épilepsie. Cette enseignante qui comptait dix ans d’expérience dans les écoles traditionnelles a décidé, en 2012, de canaliser son énergie vers les enfants avec des besoins éducatifs spéciaux. Rencontre.
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« À vrai dire, ils ont beaucoup à offrir et nous avons beaucoup à apprendre d’eux. Il faut changer de mentalité »
Sweety Seeroo estime que les enfants avec des besoins éducatifs spéciaux vivent dans un monde merveilleux. Depuis le Certificate of Primary Education, elle refusait qu’on mette son frère de côté. Toutefois le temps est passé et ce dernier est devenu adulte sans l’encadrement académique adéquat et a dû se débrouiller pour trouver un travail.
« À l’époque, mon frère essayait de décrocher de petits boulots et il fallait que je lui montre comment écrire son nom pour entamer ses démarches. Je me suis dit, le voilà autonome, mais si seulement il avait eu la chance d’être encadré à l’école. Du coup, j’ai choisi de le faire pour les enfants dans la même situation, afin qu’ils puissent s’épanouir et être totalement indépendants », explique-t-elle.
C’est ainsi qu’elle commence sa carrière d’enseignante dans l’éducation spéciale dans une Integrated unit à Nouvelle-France. Toutefois, constatant que les ressources limitées ne lui permettront pas d’aider les enfants, en 2015, elle rejoint le corps éducatif de l’Association des parents de déficients auditifs (APDA) au sein de laquelle elle s’épanouit.
C’est alors, un nouveau chapitre qui commence. Elle ne connaissait pas la langue des signes, elle recommence sur de nouvelles bases et elle apprend à son tour des enfants. « Quand j’ai intégré l’APDA, j’ai été exposée à la langue des signes pour la toute première fois, c’était nouveau pour moi, mais je me suis sentie tout de suite à l’aise, car ici le maître d’école conçoit que les enseignantes sont mieux placées pour trouver la bonne méthode d’enseignement. À vrai dire, de cette manière, on grandit et on évolue en même temps que les enfants. »
En 2016, soit un an après son intégration, l’APDA reçoit à bras ouvert les enfants ayant des difficultés d’apprentissage pour la préparation du Primary School Achievement Certificate (PSAC). Les méthodes changent, la pression se fait ressentir, mais elle relève le défi sans la moindre hésitation, considérant cette étape importante dans la scolarité d’un enfant.
« C’est sûr que je ne pouvais plus dépendre uniquement de la langue des signes, car nous avions des enfants dyslexiques, autistes, entre autres. Il m’a fallu un an d’adaptation pour développer une stratégie apte à inclure tous les enfants avec des modes opératoires différents dans une seule session. J’étais ravie de pouvoir contribuer à cette étape importante du PSAC », fait-elle ressortir.
« Les parents des enfants ayant des besoins spéciaux doivent également suivre une formation, car ils ont tendance à être découragés. Il ne faut pas bloquer l’enfant en se focalisant
sur le handicap »
Elle relève le défi avec brio avec quatre sur huit élèves franchissant le cap du PSAC cette année. Voir ses élèves réussir cette étape était une grande récompense.
« Cela a fait exploser mon cœur de joie. Avoir la chance d’aider un enfant à problème et lui donner les armes pour être indépendant, autonome et réussir dans la vie est un bonheur, parce que j’aurai souhaité cela pour mon frère. Je veux offrir la vie que j’aurai souhaitée pour mon frère aux enfants comme lui. »
Toutefois, l’enseignante conçoit que tout n’est pas gagné et qu’il y a encore beaucoup à faire au niveau des facilités fournies. Il y a aussi la mentalité vis-à-vis des enfants avec besoins éducatifs spéciaux.
« Les parents des enfants ayant des besoins spéciaux doivent également suivre une formation, car ils ont tendance à être découragés. Il ne faut pas bloquer l’enfant en se focalisant sur le handicap. Une formation aide les parents à être mieux encadrés, et à donner confiance à l’enfant qui sera plus épanoui », conseille-t-elle.
Elle confie qu’elle se sent dans son élément en tant qu’enseignante des enfants ayant des besoins éducatifs spéciaux, car le partage est mutuel. « On apprend tous les jours des enfants. Chaque enfant évolue à sa façon, selon sa condition. Pour moi, même les petits pas dans l’évolution d’un enfant m’apportent une satisfaction et une fierté qui n’a pas de prix. Par exemple, je me souviens d’un enfant autiste qui avait pris une semaine pour comprendre mon cours. Mais j’étais contente qu’il ait pu le faire. C’est là que j’ai réalisé que les petits gestes apportent une grande joie, lorsqu’il s’agit de ces enfants. À vrai dire, ils ont beaucoup à offrir et nous avons beaucoup à apprendre d’eux. Il faut changer de mentalité », indique-t-elle émue.
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