Faciliter l’intégration des jeunes et des femmes sur le marché du travail. C’est dans cette optique que le gouvernement vient de l’avant avec nouvelle mesure budgétaire ; une prime à l’emploi. Quand est-ce que la mesure entrera en vigueur ? Quelles seront les modalités de cette démarche ? Quel sera l’impact sur le marché du travail ? Éléments de réponses.
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Depuis que la pandémie de Covid-19 a frappé le pays, les conséquences sur le marché du travail ont été inévitables. Malgré le soutien financier de l’État pour protéger les emplois à travers le Wage Assistance Scheme et le Self-Employment Assistance Scheme, quelque 33 500 Mauriciens ont perdu leurs emplois de 2020 à 2021. Selon Statistics Mauritius, le taux de chômage se situe à 9,1 %. Ce chiffre a interpellé et a nécessité l’introduction d’une prime à l’emploi mensuel de Rs 15 000 pour la première année d’emploi de 10 000 jeunes de 18 à 35 ans et de femmes jusqu’à 50 ans.
L’entrée en vigueur
Les autorités concernées nous ont fait comprendre que les discussions pour finaliser les modalités de cette mesure sont en cours. Mais une chose est sûre. La mesure devrait entrer en vigueur d’ici janvier 2023. « Nous étudions deux options pour le versement des salaires. Soit les salaires seront versés aux employeurs et par la suite ils payeront les employés ou les salaires seront versés directement sur les comptes des employés », explique-t-on.
Cette mesure vise également à faciliter la réintégration des femmes dans le monde du travail. « Très souvent, les femmes ne reprennent pas leur job après la maternité. Et quelques années plus tard, lorsqu’elles veulent retourner au travail, elles n’ont plus les mêmes chances. Ainsi, la prime incitera les entreprises à employer ces femmes », affirme-t-on. Il est bon de savoir que la prime à l’emploi est une des demandes des entreprises privées.
Des conditions attachées
À travers la prime à l’emploi, le gouvernement va garantir le paiement du salaire des employés pour une période d’un an. Mais des conditions strictes seront attachées à cette mesure pour assurer que les employeurs ne mettent pas ces employés à la porte après une année d’emploi. D’ailleurs, le ministre des Finances lui-même a fait comprendre qu’un mécanisme sera mis en place pour assurer qu’il n’y ait pas d’abus. Selon nos recoupements, si une entreprise n’emploie pas l’employé en permanence, elle devra rembourser au gouvernement la totalité de la prime versée pendant une année.
Possibilité aux entreprises de rémunérer plus
Il n’y aura pas de secteur spécifique pour bénéficier de la prime à l’emploi. « D’ailleurs, cette question fait partie de nos discussions. Nous sommes en train d’étudier quels sont les secteurs qui sont plus concernés par un manque de main-d’œuvre et où la prime pourra favoriser les recrutements », dit-on. Par exemple, le secteur manufacturier fait face à une forte pénurie de travailleurs actuellement. Mais les jeunes ne veulent pas travailler dans ce secteur. Du coup, même si la prime à l’emploi est offerte, elle ne va pas forcément résoudre le problème de manque de main-d’œuvre dans le manufacturier. D’autre part, il y a une forte demande d’emploi dans le secteur des services financiers.
« Dans ce contexte, la prime à l’emploi pourra motiver les entreprises à employer des jeunes. Mais un jeune gradué pourrait ne pas accepter de travailler pour un salaire mensuel de Rs 15 000. Ainsi, les entreprises auront la possibilité de bénéficier de la prime et de rémunérer le jeune employé par rapport à ses compétences et ses diplômes », expliquent les autorités. Par exemple, si un jeune touche Rs 20 000 par mois, il bénéficiera de Rs 15 000 de la prime du gouvernement et son employeur contribuera à la différence, soit Rs 5 000.
Youth Employment Programme
Un des objectifs de l’introduction de la prime à l’emploi est d’éliminer le Youth Employment Programme établi en 2013. À travers ce programme, l’employeur contribue pour la moitié des coûts des stipends et de formation dispensée à ces jeunes. Selon les autorités concernées, il y a eu beaucoup d’abus de la part des entreprises dans le passé concernant les remboursements. « Il y a ainsi un besoin de régulariser le système », avance-t-on.
Maya Sewnath, présidente de SME Chambers : «Un risque à prendre si les employés ne sont pas productifs»
La présidente de SME Chambers accueille favorablement la mesure concernant la prime à l’emploi. Selon elle, « elle soulagera les entreprises qui ont besoin de main-d’œuvre, mais qui n’ont pas les capacités de recruter ». Cependant, elle affirme que la mesure comprend aussi des risques. « Certains employés peuvent profiter de cette prime et ne pas respecter les commandes de l’employeur. Car ils savent que c’est le gouvernement qui paye leurs salaires. En outre, si ces employés ne sont pas productifs, nous ne pourrons pas les licencier. D’ailleurs, nous serons obligés de les employer après un an », avance-t-elle.
Reeaz Chuttoo, de la CTSP : «Un premier pas, mais pas suffisant»
Le porte-parole de la confédération des travailleurs du secteur privé (CTSP) affirme que le potentiel des femmes dans le monde du travail est sous-estimé. « Depuis des années, la CTSP lutte pour une meilleure intégration des femmes dans le marché du travail », indique-t-il. Il trouve encourageant que le gouvernement soit venu avec une approche ciblée en ce sens. « La prime à l’emploi est un premier pas vers la réintégration des femmes dans le monde, mais ce n’est pas suffisant. Il faut aussi venir de l’avant avec des formations spécifiques pour permettre à ces femmes de s’épanouir », soutient-il.
Témoignages
Loveena Eranah, femme au foyer : «Je suis motivée pour réintégrer le marché du travail»
Loveena Eranah, mère de deux enfants âgés de 5 ans et de 3 ans respectivement, accueille favorablement la prime à l’emploi. « J’ai dû quitter mon travail pour m’occuper des petits. Mais maintenant, je suis prête à réintégrer le marché du travail », raconte cette femme au foyer. En effet, elle a travaillé dans le secteur hôtelier avant son mariage. Il y a sept ans, elle a quitté son dernier emploi. Désormais, elle dit être plus motivée pour trouver un emploi. Pour elle, la prime qui s’applique aussi aux femmes devrait faciliter davantage ses démarches dans la recherche d’un emploi.
Dylan Dyal, 20 ans : «Les offres d’emplois seront maintenant plus nombreuses»
Sportif, Dylan Dyal est à la recherche d’un emploi qui lui permettra d’avoir plus de temps pour faire de l’entraînement. « Aujourd’hui, il est très difficile de trouver un emploi où les heures de travail sont flexibles et qui me permet de faire du sport », explique-t-il. Cependant, avec la prime à l’emploi, il est d’avis que les offres seront plus nombreuses. « De coup, je pourrai choisir un job qui ne met pas en péril mes ambitions en tant qu’athlète. »
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