Société

Le divorce et ses conséquences sur l’enfant

Comment l’enfant vit-il le divorce de ses parents ? C’était le thème de Talk of the Town, sur Radio Plus. Les invités de Priscilla Sadien : Alain Muneean, directeur de Terre de Paix, la psychologue Véronique Wan  Hok Chee et Swapna Hurree, coordinatrice à la Family Unit du ministère de l’Égalité des genres. « Dans les pays développés, un mariage sur deux finit par un divorce. À Maurice, officiellement ce sont deux mariages sur dix. Cependant, il faut souligner que beaucoup d’unions se disloquent sans qu’il n’y ait de divorce », explique Alain Muneean. Pour le directeur de Terre de Paix, « il s’agit d’un problème universel, responsable d’une grande détresse humaine dans la majorité des cas ». Il souligne cependant qu’un divorce « bien géré peut bien se passer », mais insiste que l’enfant reste la « victime directe » d’une telle décision. D’ailleurs, ajoute-t-il, la plupart des enfants appelés à être pris en charge par des organismes de l’État « proviennent de familles brisées ». Véronique Wan Hok Chee estime, pour sa part, qu’un divorce « est toujours une souffrance pour les enfants ». D’autant que l’enfant doit assister à des conflits incessants et des disputes quotidiennes. « La société mauricienne est toujours conservatrice. Ce n’est pas toujours évident de divorcer. Cette décision est l’ultime recours. La plupart du temps, le couple essaie de demeurer sous le même toit, même si dans les faits, le mariage a échoué. Le problème, c’est qu’il n’y a pas de dialogue, mais beaucoup de disputes. Cela a évidemment une incidence sur l’enfant et sur son comportement. Le gosse de cinq ans est persuadé qu’il est la cause de disputes. Ceux qui sont plus âgés développent de la colère en entendant leurs parents se bagarrer. Ils se sentent menacés », dit-elle. La psychologue explique qu’en règle générale, les filles et les garçons réagissent différemment. « Les garçons deviennent désobéissants. Des fois, cela va jusqu’à la délinquance. Quant aux filles, elles développent de l’anxiété ou alors des troubles émotionnels. » Pour Véronique Wan Hok Chee l’adolescent « vit encore plus mal » un divorce. « Cette période est déjà difficile pour l’enfant. Il subit des transformations sur les plans physique, émotionnel et physiologique et doit les gérer. Se retrouver dans l’obligation d’accepter un nouveau papa ou une nouvelle maman n’est pas quelque chose d’évident. Sans oublier que dans beaucoup de cas, il estime qu’il n’a pas sa place dans la famille recomposée », souligne-t-elle.

« Chantage émotionnel »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"17585","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-29883","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"divorce"}}]]Pour la psychologue, ce que les deux conjoints en instance de divorce doivent « absolument éviter de faire, c’est transformer l’enfant en confident ». Elle explique que dans certains cas, un des conjoints essaie de « rallier l’enfant » à sa cause en se « confiant à lui » au sujet des problèmes du couple et en faisant le procès de l’autre conjoint. « Des fois, un des conjoints se sert de l’enfant pour faire du mal au conjoint et le déstabiliser. Ce faisant, c’est à l’enfant qu’il fait un tort immense. Il est tiraillé, car il aime ses deux parents. Cela a une incidence sur son comportement. Aucun des conjoints n’a à exercer un chantage émotionnel ou affectif sur l’enfant », dit-elle. Pour Swapna Hurree, les deux conjoints en instance de divorce doivent intérioriser le fait que « c’est en tant que partenaires que leurs chemins se séparent et non en tant que parents ». Les parents, selon elle, doivent continuer à assumer leur rôle et leurs responsabilités. Elle estime qu’il est primordial de respecter les conditions du droit de visite accordé par le tribunal au conjoint qui n’a pas obtenu la garde de l’enfant. Selon les invités, certains ex-conjoints tenteraient de « punir » l’autre en le privant du droit de voir l’enfant. Swapna Hurree attribue un tel comportement au fait qu’à Maurice, beaucoup « vivent le divorce comme un échec social » et surtout le fait que l’ex-conjoint « a réussi à refaire sa vie ».

La famille et l’école

Pour tenter de comprendre le problème et ses causes, Alain Muneean propose « un examen de cette structure qu’on appelle famille ». « Il ne faut pas la sacraliser, mais l’examiner de manière objective ainsi que son évolution au fil des décennies. Il y a 50 ans, on avait encore la famille étendue et toute la communauté prenait un enfant en charge. Mais aujourd’hui, nous avons la famille nucléaire avec ses racines égoïstes qui se brisent plus rapidement. Il faut la comprendre et surtout la situer dans le contexte mauricien pour pouvoir agir de manière plus efficace », dit-il. Une autre suggestion du directeur de Terre de Paix : une réflexion sur le rôle de l’école. « Cela est primordial. Est-ce que l’école nous prépare à devenir des adultes responsables ? La sexualité figure-t-elle dans le programme éducatif ? Souvent, on blâme la famille qui considère la sexualité comme étant tabou. La famille, surtout celle d’aujourd’hui, ne peut tout faire. Que fait l’école pour remédier au problème ? Parfois, c’est effarant d’entendre des syndicalistes dire qu’ils ont un problème avec la mixité alors que nombre de problèmes auxquels nous sommes confrontés découlent justement de l’absence de mixité. Une des contradictions majeures de notre société concerne le genre », plaide Alain Muneean.

Irremplaçable

Pour la psychologue Véronique Wan Hok Chee, il est primordial dans le cas de familles monoparentales d’avoir un papa ou une maman de substitution. « Personne ne peut jouer à la fois le rôle de père et de mère. Un homme ne peut remplacer une femme et vice-versa. Il faut qu’un grand-père ou un oncle incarne le père de substitution et que la grand-mère ou la tante incarne la maman de substitution », dit-elle.

Structures de soutien

Alain Muneean a déploré « l’absence de structures de soutien » pour venir en aide aux couples en détresse. « La loi ne peut tout régler. Il faut des structures qui permettent aux personnes formées d’aller à la rencontre de ceux qui sont en difficulté et de discuter avec elles », dit-il. À ce sujet, Swapna Hurree a annoncé le démarrage prochain d’un projet sur la consolidation des valeurs par le gouvernement.

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