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La caricature : un art expressif qui séduit les jeunes

Des visages plus ou moins déformés, des exagérations sur les aspects physiques… La caricature est un art à la fois expressif et satirique. Rencontre avec des dessinateurs en herbe qui donnent libre cours leur imagination.

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Quelques coups de crayon par-ci et par-là… Et voilà un portrait ! Souvent les artistes laissent glisser leur crayon sur une page vierge, pour sortir le portrait d’une femme épanouie.

Un jeune caricaturiste offre ses services. Voyant son annonce, une foule s’assemble autour de lui, impatiente de se faire caricaturer. Un jeune homme se lance, le sourire aux lèvres.

L’artiste observe les contours de son visage avec son œil de Lynx. Après l’étape d’observation, place à la création.

Le sujet demeure immobile. Il garde pendant la réalisation de l’œuvre la même expression. Le dessinateur, quant à lui, s’applique sérieusement à sa tâche, relevant la tête de temps en temps pour regarder son modèle. Dix minutes s’écoulent et l’artiste admire son œuvre. Il peut à présent le dévoiler au jeune sujet, qui est tout excité de se découvrir en version caricature.

À la base, la caricature est principalement décrite comme un art dénonciateur. Selon Abdool Kalla, caricaturiste pour le Défi Media Group, ces dessins satiriques sont devenus populaires à Maurice, depuis la cassure politique Mouvement militant mauricien-Parti socialiste mauricien en 1983.

« C’est à ce moment que la caricature a pris son envol dans la presse à Maurice. Nous avons remarqué que c’était aussi une autre forme d’éditorial qui dénonçait avec une pointe d’humour. Ces dessins qui mettaient en images la situation politique donnaient à réfléchir », fait ressortir Abdool Kalla. Le caricaturiste de longue date avance que beaucoup de Mauriciens achetaient le journal à cette époque dans le but de découvrir les dessins comiques du jour. « Même les hautes personnalités s’y mettaient en espérant ne pas se retrouver en caricature », ajoute-t-il.

Je trouve les caricatures dans les journaux très drôles. Elles aident à mieux comprendre l’actualité. » : Sarika, 16 ans.

Pourquoi les jeunes artistes privilégient-ils la caricature ?

Selon Pallavee Murugan, une artiste de 22 ans, c’est parce qu’ils ne prennent pas plus de dix minutes pour faire une caricature, alors que pour les portraits, c’est une autre histoire.

« Généralement, nous passons uniquement cinq à dix minutes au grand max pour dessiner une caricature. Et les modèles arborent toujours un large sourire en découvrant leur version comique, car c’est très amusant. Les portraits, quant à eux, sont des “photocopies” des sujets et sont plus axés sur les expressions faciales », estime-t-elle.

Outre l’aspect comique, les dessins satiriques sont très simples et faciles à faire. Ils attirent les Mauriciens, même s’ils ne sont pas des adeptes de l’art.

Interrogée sur les particularités de cet art satirique, elle nous indique que la caricature c’est principalement exagérer certains aspects qui définissent le modèle. « Par exemple, si une personne est un peu joufflue, il faut mettre l’accent sur ses joues et les agrandir encore plus pour produire un effet comique. »

Depuis environ un an déjà, elle fait de la caricature. « C’est le Porlwi By Light de l’an dernier qui m’y a initié. Les organisateurs voulaient de la spontanéité. J’ai tenté ma chance et j’ai découvert que j’aimais cela », indique-t-elle. La réaction des modèles quand ils découvrent leurs caricatures est une source d’encouragement pour l’artiste et lui procure la satisfaction du devoir accompli.

La caricature intéresse aussi les enfants. C’est un bon moyen de les initier à la lecture. » : Marie-José, 55 ans.

Warren Goribe, quant à lui, livre un avis complémentaire sur la caricature. Pour lui, l’exagération de certains traits peut aider les sujets à vaincre leurs complexes et s’accepter.

« Aujourd’hui, nous sommes tous très concernés par notre image. Beaucoup sont complexés et n’arrivent pas à s’aimer. Alors, même si cela paraît insensé, la caricature fait que les personnes qui souffrent de complexes physiques s’acceptent comme ils sont. Quand mes modèles se découvrent en version comique, ils ne peuvent s’empêcher de montrer leur joie », raconte-t-il.

Il a aussi pris part au Porlwi By Light et c’est ainsi qu’il s’est découvert une réelle passion pour la caricature. Cependant, Warren nous append que réussir un dessin en cinq à dix minutes n’est pas une mince affaire : « Je me suis beaucoup préparé avant le Porlwi By Light en surfant sur le net à la recherche des techniques. Je me suis aussi inspiré de bandes dessinées. » Il a aussi proposé ses services lors du dernier Chinatown Festival et d’autres évènements.

« On parvient à fuir les éléments et les proportions que demande un portrait. » C’est ce qu’avance Thierry Amery, portraitiste et caricaturiste. Cet enseignant en Visual Arts explique que l’art satirique est une vision différente de la réalité, mais qui en garde l’essentiel. « J’aime la caricature quand c’est frais, léger et drôle », confie Thierry Amery. Pour ce dernier, les jeunes artistes se laissent séduire par ces portraits comiques, parce qu’il y a ce côté fun du dessin.

Il est impressionnant de noter que même si les visages sont déformés, on arrive à reconnaître certaines personnes… »: Nevin, 30 ans.

« Je m’amuse parfois avec ces quelques changements de proportion. Par exemple, agrandir démesurément les oreilles, le nez ou encore les yeux. » Outre cet aspect comique et humoristique, selon lui, la caricature dégage « souvent quelque chose de positif et apporte de la joie ». Cependant, la caricature ne fait peut-être pas l’unanimité chez tous les modèles, car il a aussi rencontré certains qui grognaient à la vue de leurs caricatures.


Abdool Kalla : «La caricature est un art dénonciateur»

Dénoncer avec humour… Voilà ce qui définit la caricature selon Abdool Kalla. Il révèle toutefois que même si ses dessins donnent à réfléchir, il faut néanmoins respecter certaines règles. « Je ne ferai jamais de caricatures sur la religion ou d’autres sujets sensibles. Il faut avoir un minimum de respect et discerner quel sujet traiter », dit-il. Il révèle qu’il puise son inspiration dans les maux de notre société et les déboires politiques. Côté risques, il raconte qu’en 1983 les caricaturistes recevaient beaucoup de menaces, mais aujourd’hui la mentalité a évolué. Il compte ouvrir une école de caricature pour mieux encadrer les jeunes artistes, qui souhaitent faire carrière. « Nous devenons vieux et nous souhaitons avoir une relève », indique-t-il.


Safiyyah Mamdeen : «Je préfère les portraits»

L'art de Safiyyah.

Contrairement aux autres jeunes artistes, Safiyyah Mamdeen préfère les portraits aux caricatures. « Je ne pense pas que les caricatures soient si impressionnantes. J’aime plus les portraits, car il y a ce côté réel. Selon moi, les “cartoons” sont absurdes et embarrassent l’art », avance cette jeune artiste.

Pour Safiyyah, la caricature n’est pas un « challenge » et elle est plutôt facile à réaliser. Alors que les portraits capturent les expressions et dévoilent le modèle. Selon elle « faire le portrait d’une personne, c’est saisir ses émotions sur la toile. » La jeune portraitiste concède toutefois que les caricatures et les portraits ont leurs utilités.

Les étapes d’une caricature

Jadis, les dessins publiés étaient strictement faits à la main. Aujourd’hui, avec les équipements informatiques, les artistes satiriques peuvent avoir recours aux ordinateurs. Voici les étapes d’une caricature.

La caricature est faite au crayon. Ensuite elle est scannée sur ordinateur.
La caricature est retravaillée à l’ordinateur
en « outline noire ».
Les couleurs sont ajoutées.

 

 Une fois le coloriage et les textes terminés,
la caricature est prête à être publiée.

 

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