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Drogue de synthèse : vingt régions à risque identifiées par les autorités

Les jeunes disent avoir recours aux drogues de synthèse dans le but d’améliorer leur virilité. Jadis, c'était le peer pressure qui était un des facteurs d'influence.

Urbaines et rurales, une série de régions ont été identifiées comme régions à risque où les drogues de synthèse ont une forte prévalence. Les autorités impliquées dans le combat contre la prolifération de la drogue sont à pied d’œuvre à différents endroits du pays. 

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20 régions où les drogues de synthèse sont prédominantes ont été identifiées par les autorités et plusieurs Organisations non-gouvernementales (ONG). Il s’agit de : Vallée Pitot, Roche-Bois, Sainte-Croix, Cité-La-Cure, Cassis, Cité Barkly (Beau-Bassin), Stanley (Rose Hill), Cité Mangalkhan, (Floréal), Cité Kennedy (Quatre-Bornes), Bambous, Cité Malherbes (Curepipe), St-Pierre et Quartier-Militaire, Cité Argy (Flacq), Pamplemousses/Terre-Rouge, Plaine-des-Papayes, Goodlands, Chemin-Grenier, Rivière-des-Anguilles, Mahébourg.

L’élaboration de ces régions a essentiellement été effectuée par le National Drug Secretariat (NDS) qui tombe sous l’égide du bureau du Premier ministre, aussi par le ministère de la Santé et les ONG impliquées dans la lutte contre la drogue. Cela fait suite aux chiffres compilés par le ministère de la Santé qui indique que la prévalence des drogues, dont les drogues de synthèse, est bien plus importante dans deux régions du pays : Plaines-Wilhems et Port-Louis. « Nearly one quarter of drug-related inpatient cases (25 %) were from Port-Louis and 28 % from Plaines-Wilhems, making a total proportion of 53 % for urban cases against 47 % for rural cases », indique ce document du ministère de la Santé. Cet ouvrage avait été notamment présenté lors d’un atelier de travail organisé en décembre par l’ONG Prévention Information et Lutte contre le Sida (Pils).

Ainsi, une campagne qui a pour titre ‘Youth Employment Programme against drug’ a été lancée la semaine dernière à Roche-Bois par le ministère de la Santé, le National Drug Secretariat et les ONG. L’objectif de ce programme est de mettre en place une plateforme afin de sensibiliser les gens sur les dangers que représentent les drogues de synthèse. « Le programme s’étale sur plusieurs jours dans la région. C’est une approche plus scientifique. Dans un premier temps, nous sommes en train de concerter énormément avec les forces vives de la région afin de mieux les armer sur les méfaits des différentes formes d’addiction. Nos discussions portent également sur le cadre légal qui existe autour de la consommation de la drogue », explique Danny Philippe, coordinateur de Leadership Empowerment Action for Development (LEAD). 

Rajeunissement au niveau des consommateurs

Si au niveau du ministère de la Santé, certains sont d’avis qu’aujourd’hui la situation des drogues de synthèse est beaucoup plus sous contrôle, cependant la situation sur le terrain semble être toute autre. Comme le témoigne le travailleur social Ally Lazer qui est impliqué dans l’accompagnement des personnes souffrant d’addiction à différentes formes de drogue au Centre Idriss Goomany, à Plaine-Verte. Ce dernier se dit de plus en plus inquiet concernant le rajeunissement au niveau des consommateurs des drogues de synthèse. « Je reçois personnellement chaque jeudi entre 25 et 30 parents, dont les enfants sont en train d’être ravagés par les drogues de synthèse », déplore-t-il. 

Le programme s’étale sur plusieurs jours. C’est une approche plus scientifique.

Si quelques années de cela la consommation de la drogue chez les jeunes était souvent liée aux influences des groupes de pression, cependant aujourd’hui la donne a changé, observe ce travailleur social. « Souvent les différents jeunes que nous accueillons ici disent avoir recours aux drogues de synthèse dans l’unique but d’améliorer leur virilité. Cet argument est de plus en plus véhiculé chez les jeunes », fait part Ally Lazer. 

En effet, les chiffres présentés en décembre par Pils avaient indiqué que parmi les admissions dans les hôpitaux publics liés à la consommation des drogues de synthèse qui s’élevaient à 1158, 3 % étaient âgés entre 10 et 14 ans, 20 % entre 15 et 19 ans, 28 % entre 20 et 24 ans. Données qui encouragent Ally Lazer à croire qu’il faut absolument avoir l’introduction d’une politique de prévention nationale à la fin du cycle primaire dans les écoles. « La politique de répression mise en avant par le gouvernement est loin d’être un succès, car malgré toutes les saisies qui sont sans cesse médiatisées, la drogue est plus que jamais accessible, même parmi des enfants de 10 ans. J’ai moi-même personnellement rencontré des enfants de dix ans qui sont en traitement ici au centre », ajoute le travailleur social.

Aucun traitement pour la drogue de synthèse 

La révision de la politique mauricienne sur la drogue est un argument revendiqué aussi par Kunal Naik, directeur plaidoyer chez Pils. « C’est devenu impératif de revoir toute cette politique. La loi avait été amendée en 2013 afin d’ajouter de nouvelles substances à la ‘Dangerous Drug Act’, mais le souci avec la drogue de synthèse c’est que c’est une drogue qui ne cesse d’évoluer. De plus, il n’y a aucun traitement contre les drogues de synthèse, ce qui est encore plus dangereux », affirme-t-il. 

Or, tient-il à faire ressortir, d’autres drogues telles que l’héroïne peuvent être traitées à l’aide de la méthadone ou de la suboxone. Le combat contre ce type de drogue, ajoute-t-il, doit être profond, car il s’agit d’un problème socioéconomique. « L’ampleur qu’est en train de prendre les drogues de synthèse a un lien étroit avec le problème socioéconomique. D’où l’urgence d’engager une réflexion profonde sur les problèmes qui résultent aux inégalités sociales. Et par la suite procéder à une réforme du système social, car le problème de la drogue de synthèse est bien plus profond », avance-t-il. 

Kunal Naik fait également partie de ceux qui croient qu’une régularisation autour de la consommation du cannabis peut être une partie de la solution contre le phénomène des drogues de synthèse. Car le cannabis, dit-il, n’est pas aussi dangereux que tentent de faire croire certaines personnes.

A.Z. : « À l’hôpital, mon époux consommait de la drogue synthétique »

Âgée de 21 ans, A.Z., une habitante de la capitale, est mariée depuis maintenant trois ans. Dès les premières années de mariage, son époux a commencé à consommer différents types de drogue. Cependant, elle précise que c’est essentiellement la drogue de synthèse qui a ruiné son mariage. « Après le mariage, il a commencé à avoir un cercle d’amis. Ces fréquentations lui ont conduit à la drogue synthétique », fait-elle part. 

De jour en jour, l’addiction de son époux grandissait. « Il a cessé de travailler et venait constamment me demander de l’argent pour qu’il puisse se procurer de la drogue », raconte A.Z. « Au fil des mois, il me demandait de plus en plus d’argent. Tout récemment, il fallait lui trouver Rs 1000 par jour », relate-t-elle. Cette jeune épouse souligne que l’addiction de son époux pour les drogues de synthèse était devenue tellement obligatoire que même lorsqu’il a été admis à l’hôpital en décembre de l’année dernière suite à un accident, il parvenait à s’en procurer à l’hôpital. 

Pour la toute première fois, son époux a consenti à suivre un traitement de réhabilitation au centre Idriss Goomany. « Nous verrons ce que cela donnera et si cela pourra par la suite redonner vie à notre mariage », espère-t-elle.

 

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