
Il se défend d’être un dur dans ses fonctions de nouveau chef des prisons du pays. Pour Dev Jokhoo, il agit selon les paramètres légaux et dans le respect, et compte bien se retrousser les manches pour nettoyer la prison.
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Quelle est la situation dans nos prisons ?
Les prisons ont une mauvaise réputation. Les détenus ont le droit d’avoir deux appels de 15 minutes par semaine, mais ils ont des portables. La dimension de ces appareils ? Pas plus grosse qu’un briquet. Vous savez ce qui se passe ? Les visiteurs les cachent dans un préservatif et les introduisent dans leur anus. Il y a eu une femme qui en avait placé deux et on a pu découvrir l’astuce grâce au scanner. Mais il y a des gardes-chiourmes qui sont corrompus, il ne faut pas le nier.
Comment vous en êtes-vous pris ?
Quand j’ai pris les rênes des prisons, je n’avais pas les équipements qu’utilise la SMF. En mai dernier, à la prison de Beau-Bassin, on a fait des saisies de portables, de chargeurs, de power banks. J’ai mis des règlements en commençant par moi : qu’on me fouille avant que je ne pénètre la prison. L’exemple vient d’en haut. Je ne fais pas de compromis.
Ces fouilles sont-elles systématiques, hormis la vôtre en tant que nouveau CP des Prisons ?
Je vous donne un exemple : à la mi-mai, il y a eu une fouille et on a découvert à Beau-Bassin 47 pouliahs de gandia et quatre cartes SIM lors d’une fouille d’un garde-chiourme qui a été suspendu. À Melrose, on a dû arrêter un gardien qui était en possession de deux portables dans son boxer. Je vais nettoyer la prison.
Vous avez la réputation d’être un homme qui aime la manière forte. Vous tapez, puis vous posez les questions. Est-ce vrai ?
Je dois rappeler un événement : en 1979, il y a eu urgemment besoin de l’intervention de la SMF lors d’une mutinerie à la prison de Beau-Bassin, puis c’est tout. De quelle manière forte vous parlez ?
Pourquoi ne pas négocier pour calmer les esprits, comme cela se fait ailleurs, au lieu de passer à la manière dite forte ?
À Maurice, il y a 12 institutions pénitentiaires. Il y a 70 % de récidive, ceux qui ont fait de la prison et qui reviennent. La prison est devenue comme un hôtel 5-étoiles pour ces détenus. Il y a 51 % de ‘remand’. 52 % de prisonniers sont âgés entre 18 et 30 ans, 80 % ont des peines de moins de six mois et un très fort pourcentage qui ne paie pas les amendes.
Un exemple ?
Il y a un détenu qui n’a pas payé 48 amendes et le magistrat a converti ce paiement en deux nuits de prison, soit 48 x Rs 2 000 = Rs 96 000 aux frais de l’État.
Combien coûte un prisonnier par jour ?
L’État dépense pas moins de Rs 1 000 par jour par prisonnier. Sans compter les détenus atteints du SIDA, du cancer, du diabète et des bébés en dessous de cinq ans.
Nos prisons sont-elles over-crowded ?
Non, pas vraiment. À Beau-Bassin, il y a 690 détenus ; à la New Wing, 412 ; à Melrose, 955 ; à GRNO, 288 ; à Richelieu, 192 ; au Centre pour mineurs, 3 ; à La Bastille, 8 ; à l’hôpital Nehru, 3 ; et à l’hôpital Brown Sequard, 3. C’est encore gérable.
Revenons à la prison de Melrose où presque un millier de prisonniers y sont incarcérés. Lors des incidents de jeudi dernier, on est en possession de photos d’un des détenus avec des marques qui ressemblent à des frappes de ‘tonfa’, un bâton qui fait mal et qui marque la peau à travers du sang coagulé…
Je vais vous faire la chronologie des événements : le 12 juillet 2025, on a effectué une fouille à la prison de haute sécurité de Melrose et on a saisi 12 portables. Le lundi 14 juillet, soit deux jours plus tard, une autre fouille a eu lieu.
Et le fameux jeudi 17 juillet ?
J’assistais à une cérémonie à La Tour Koenig à Pointe-aux-Sables. On me signale que la situation n’est pas bonne à la prison de Melrose. J’ai dépêché du renfort avec une équipe du CERP, car les prisonniers refusaient de quitter le yard. Puis, il y a eu l’envoi d’un ACP et d’un ASP et ils me disent qu’il y a des ‘ring leaders’ qui retenaient des prisonniers qui voulaient coopérer. J’ai appelé le Commissaire de Police car j’avais besoin d’un soutien minimum de la SMF, pas plus de 23 soldats.
Pourquoi ces soldats de la SMF, alors qu’il y a une équipe spécialisée rattachée à la prison de Melrose pour renforcer les gardes-chiourmes ?
Les soldats de la SMF étaient à la prison de Melrose en tant que ‘backup’. Il n’y a jamais eu l’intervention de ces soldats. Ces derniers étaient là pour faire comprendre aux ‘ring leaders’ qu’ils ne pourraient pas faire ce qu’ils veulent. “Kan bann solda SMF finn montre ki zot la, lerla finn kapav ena la fouy dan ban sel.” Jamais il n’y a eu d’interventions musclées ou autres. Les prisonniers se sont battus entre eux.
Et les marques qui ressembleraient à du ‘tonfa’ sur les fesses, le corps et aussi des marques de boots au niveau des tibias ?
Savez-vous que les détenus ont des bâtons de serpillères qui, en tapant, ressemblent à des frappes d’un tonfa ?
Et celui qu’on dit qu’il s’est suicidé dans un autre block ? Coïncidence encore ?
Cet incident malheureux n’a rien à voir avec celui du 17 juillet. Il y a eu un suicide d’un prisonnier condamné à vie pour le meurtre d’une prostituée à Balaclava qu’il avait violée et brûlée, puis le meurtre de sa propre tante. Il y a une enquête qui est en cours.

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