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Père Jocelyn Grégoire : «Je voulais me marier, avoir 15 enfants…»

Le 4 août dernier, le père Jocelyn Grégoire a soufflé ses 70 bougies. À cette occasion, le président de la Fédération créole mauricien nous a accordé une rare interview à coeur ouvert. Il y retrace son parcours, évoque sa foi, son combat pour la cause créole… et son face-à-face avec le cancer.

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Père Jocelyn Grégoire, joyeux anniversaire.
Merci.

70 ans, ça fait quoi ?
C’est encore une année pour laquelle je veux remercier et rendre grâce au Seigneur de m’avoir gardé en vie, en bonne santé plus ou moins, et de pouvoir continuer à faire ce que j’aime faire, c’est-à-dire être témoin de l’Évangile.

Je doute parfois de ma capacité à tenir. Il y a tant de tentations. Nous restons humains…»

En regardant en arrière, quel est le meilleur souvenir de votre enfance qui vous revient en mémoire aujourd’hui ?
C’est la famille. Mes parents ne savaient ni lire ni écrire. Nous étions pauvres, mais ils ont tout fait pour que chaque enfant puisse avoir une éducation.

J’ai encore en tête le souvenir de ma mère qui appelait les enfants pour venir manger. Nous étions 11. Avant d’arriver à Jocelyn, elle appelait André, Fidou, etc. (sourire)

Aujourd’hui, dans notre société, sans vouloir entrer dans un débat trop polémique, je pense que les attaques ciblent surtout la famille, et plus particulièrement sa destruction. Quand on observe les ravages de la drogue, de l’alcool, de la prostitution, et tout ce qui se passe autour de nous, sans oublier le bombardement médiatique, TikTok, etc., qui perturbe la communication entre nous...

Je ne suis pas opposé à la technologie – au contraire, j’en apprécie les avancées et je crois qu’il faut vivre avec son temps – mais je constate aussi qu’elle a, paradoxalement, contribué à fragiliser les liens familiaux.

Quand j’étais en Form V, à l’époque où la télévision faisait son apparition, on organisait beaucoup de débats, partout dans le monde et dans les écoles, sur ses avantages et ses inconvénients. On nous expliquait déjà que la télévision, en entrant dans les foyers, avait bouleversé l’harmonie familiale. Par exemple, on ne mange plus tous ensemble : chacun prend son assiette et s’installe devant l’écran.

Aujourd’hui, ce sont les smartphones et les tablettes qui occupent toute l’attention. Même lors des grandes réunions familiales ou des fêtes, chaque enfant est plongé dans son portable. 

Pour moi, c’est précisément cette évolution qui détruit la structure familiale, et je le dis avec beaucoup de nostalgie. On était pauvres, certes, mais on se voyait, on échangeait, on se racontait des histoires. Maman avait ses anecdotes, mon père les siennes, et c’était ça, la famille.

Et donc, votre famille a influencé votre vocation et vos valeurs...
Oui et non, parce que mes parents étaient croyants, mais pas forcément pratiquants. De temps en temps, ma mère, avec quelques amis, allait à la messe et nous emmenait. Malgré tout, ils faisaient attention à ce que nous ayons notre instruction chrétienne et catholique. Les valeurs nous étaient inculquées.

Est-ce que vous avez parfois douté de votre chemin ? 
Le doute, c’est constant, même aujourd’hui. Mais attention : douter, ce n’est pas manquer de foi. Au contraire, le doute pousse à approfondir et à affermir cette foi.

Le 17 août prochain, je fêterai mes 39 ans d’ordination. Est-ce que je doute de ma vocation ? Pas vraiment de l’appel que j’ai reçu. Mais je doute parfois de ma capacité à tenir. Il y a tant de tentations. Nous restons humains. Les interrogations face à la société, à l’Église, aux évolutions du monde… tout cela nous traverse. Et être prêtre ne nous immunise en rien contre ce genre de doutes.

Je crois même que plus les doutes se présentent, plus il faut chercher à approfondir et à comprendre la foi. Ce n’est pas quelque chose qu’on perd du jour au lendemain, mais c’est quelque chose qu’il faut nourrir sans cesse.

La vraie question n’est pas d’être mal à l’aise ou à l’aise en tant que créole. L’essentiel, c’est d’accepter pleinement notre identité créole»

Y aurait-il quelque chose que vous auriez fait différemment maintenant ? 
Ah oui, certainement ! Peut-être que cela va vous choquer, mais je n’avais jamais envisagé de devenir prêtre au départ. Ce n’était pas ma vocation première.

Je disais souvent à ma mère, en riant – mais c’était sérieux : « Tu as eu 11 enfants, moi, j’aimerais bien me marier et en avoir 15. » Et elle me répondait, en souriant : « Je suis contente pour toi, mon fils, mais je compatis avec ta future épouse ! » 

Pour moi, c’était clair : je voulais me marier, fonder une grande famille et travailler pour subvenir à leurs besoins. Nous vivions à Batimarais, dans la cité EDC construite après le cyclone Carole, un quartier où les gens ne pouvaient pas se permettre d’acheter une maison neuve. Mon rêve, c’était de faire des études, puis d’avoir un bon emploi pour pouvoir quitter Batimarais.

(Avec émotion) Un jour, j’ai rencontré une jeune fille que je pensais être la future mère de mes 15 enfants. C’est elle qui m’a ramené à l’église, elle était très engagée. On se voyait après la messe. J’avais 20 ans à l’époque. Mais la relation n’a pas fonctionné. C’est alors que je me suis dit que peut-être le Seigneur avait un autre plan pour moi.

Un jour, je suis entré dans l’église et lors de la messe, on a lu un passage de saint Matthieu : « Ce n’est pas en disant ‘Seigneur, Seigneur’ que vous entrerez dans le royaume des cieux, mais en faisant la volonté de Dieu. »

Qu’est-ce que cela veut dire, faire la volonté de Dieu ? Je me suis posé la question. Même après la fin de cette relation, j’ai continué à aller à la messe et j’ai commencé à m’investir dans ma paroisse. Je jouais de la guitare, je chantais dans la chorale. Puis, à 25 ans, j’ai quitté Maurice pour commencer mes études de prêtrise.

Si le Seigneur me disait un jour : « Je te donne une nouvelle chance, que voudrais-tu ? » je lui répondrais que je referais exactement la même chose, que je répondrais à son appel, mais un peu plus tôt, sans attendre jusqu’à 25 ans.

Que diriez-vous à un jeune qui traverse une peine de cœur, aujourd’hui ?
Peut-être est-ce un message, un appel mystérieux venu de Dieu, nous invitant à chercher à comprendre. Ce ne sont pas de simples problèmes, mais des mystères que nous devons nous approprier. La vie, justement, n’est pas un problème à résoudre, mais un mystère à accueillir pleinement. Et au cœur de ce mystère se cache toujours une révélation – une prise de conscience intime, inattendue, à laquelle on n’aurait peut-être jamais pensé.

Un jour, j’ai rencontré une jeune fille que je pensais être la future mère de mes 15 enfants»

Vous avez également entrepris des études en psychothérapie. Pouvez-vous nous en parler ?
C’est une autre découverte qui s’est faite au fil d’un cheminement. J’ai d’abord fait mes études de prêtrise en France, puis à La Réunion, puisque je suis spiritain. Ensuite, je suis parti en Angleterre pour approfondir la théologie.

J’avais un professeur, Claude Tassin, que beaucoup connaissent ici à Maurice. C’est lui qui m’a transmis, d’une certaine façon, un amour profond pour l’Écriture sainte et la musique. En Angleterre, j’ai commencé à composer et mes professeurs m’ont conseillé de me spécialiser en musique et en écriture. J’étais très enthousiaste. Mais mes supérieurs à Maurice m’ont demandé de revenir, de me replonger dans la culture locale, et qu’ensuite, après un certain temps, ils m’enverraient à Rome pour poursuivre mes études musicales.

On m’a donc envoyé à Sainte-Croix pour un an, puis je devais partir en mission en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Imaginez : je venais de terminer le séminaire, la théologie, l’Écriture sainte et la morale religieuse encore bien présentes en tête. Et là, les gens venaient me parler de leurs problèmes. Que pouvais-je leur répondre ? « Je prie pour toi, Dieu est bon, garde la foi… »

Mais j’ai rapidement constaté que ces personnes revenaient sans cesse avec les mêmes difficultés. En Papouasie-Nouvelle-Guinée, où j’ai passé sept ans, c’était la même chose.

C’est à ce moment que j’ai compris qu’il fallait chercher à mieux comprendre la nature humaine. Sinon, nos discours théologiques et bibliques ne sont que des emplâtres sur un cancer. C’est ce qui m’a poussé à me spécialiser en psychothérapie, sans pour autant délaisser la musique, la théologie ou la Bible.

Vous êtes le président de la Fédération créole mauricien (FCM). Parlez-nous de ce combat.
J’ai souvent souligné que la FCM n’est pas un parti politique, mais un combat identitaire. Le terme « créole » représente une identité à part entière, qui définit la personne dans sa globalité. Comme on dit en anglais, c’est une définition holistique. Quand on parle de créole, on évoque une philosophie, une spiritualité, une personnalité. Donc, si quelqu’un n’est pas à l’aise avec cette identité, il laissera toujours le regard des autres le définir.

Nous avons une source, une racine profonde. Celle-ci puise dans une histoire d’esclavage, une histoire de souffrance, mais c’est bien notre identité. Il ne faut pas en avoir peur. Celui qui ne se connaît pas est perdu, on peut alors en faire ce que l’on veut.

Le combat de la FCM n’est pas politique, mais il vise précisément à ce que le créole puisse s’approprier pleinement son identité. Nous vivons dans un pays multiracial, multiculturel et multireligieux, et c’est cette richesse qui fait la force de Maurice. On ne peut pas parler de « mauricianisme » sans que chacun connaisse qui il est, comment il agit, quelle est sa biographie, sa philosophie, sa vision du monde – ce que l’on appelle en anglais sa « worldview ». Cette manière différente d’être en relation, ce dialogue, c’est ce qui enrichit Maurice. C’est ce qui fait l’essence même de notre île.

Je n’ai jamais politisé mon sacerdoce»

Le malaise créole est-il toujours d’actualité ?
Bien sûr. Ce terme est souvent interprété de différentes manières, mais pour moi, la vraie question n’est pas d’être mal à l’aise ou à l’aise en tant que créole. L’essentiel, c’est d’accepter pleinement notre identité créole.

Ce n’est pas une « political statement », mais plutôt un moyen de faire rayonner une des couleurs de l’arc-en-ciel. Il ne s’agit pas de diluer cette couleur dans un terme vague comme « population générale ». 

Nous sommes des individus enracinés dans une culture, une histoire, une vie. Nous sommes appelés à grandir, à nous organiser, à dialoguer, à vivre ensemble dans l’amour et la diversité de l’arc-en-ciel. Et si l’une de ces couleurs venait à manquer, alors ce ne serait plus un véritable arc-en ciel.

Est-ce que cet espace de lutte, mais aussi de foi, vous a coûté quelque chose en tant que prêtre ou, au contraire, ça vous a apporté quelque chose ?
Ah, pour moi, c’est surtout une manière de vivre pleinement l’Évangile. Parce que le point de départ, c’est d’être la voix des sans-voix, de prendre une option préférentielle pour les pauvres, comme le Christ nous le demande.

Aujourd’hui, on sait bien que la pauvreté ne se réduit pas au simple aspect matériel. Ce n’est pas une question d’avoir de l’argent, un compte en banque ou une voiture. La vraie pauvreté, quand on regarde la société mauricienne, se manifeste ailleurs : les échecs scolaires, majoritairement dans la communauté créole, la surreprésentation dans la population carcérale, les problèmes liés à la drogue… Là, je parle de souffrance, pas de vice.

En tant que prêtre, il est facile de prendre un micro et de prêcher la bonne nouvelle. « Aimez-vous les uns les autres », c’est beau, c’est inspirant. Être serviteur et laver les pieds le Jeudi saint, c’est un geste fort et symbolique. Mais derrière cela, la réalité demeure. La personne à qui je lave les pieds rentre chez elle avec un enfant qui a échoué trois ou quatre fois au CPE, qui peine à intégrer un bon collège. Dans certaines familles, on ne fait même pas Noël ensemble, parce qu’un proche est en prison.

C’est pour cela que je dis que l’option préférentielle pour les pauvres est au cœur de ma vocation. Ce n’est pas une question de racisme ou de communautarisme, c’est vraiment une préférence pour ceux qui souffrent le plus. Et à Maurice, pour moi, ce sont eux, les plus pauvres.

Et, bien sûr, dan mo kafe pena triaz. Les personnes qui viennent me voir au quotidien, de toute l’île, pour des rendez-vous psychothérapeutiques ou pour chercher de l’aide, ne sont pas seulement des Créoles. Mais pour répondre à votre question, ce sont surtout eux que je rencontre. Et c’est cela qui donne un vrai sens à ma prêtrise.

J’ai quitté Maurice pour la Papouasie-Nouvelle-Guinée, justement pour aller vers les plus pauvres des pauvres. Cela m’a ouvert les yeux. Ensuite, j’ai eu la chance d’étudier et d’enseigner aux États-Unis.

J’aurais pu rester là-bas, mais j’ai choisi de faire six mois là-bas, et six mois ici. Parce que je veux ramener ce que j’ai appris pour aider mes compatriotes, par exemple ces jeunes des cités qui n’ont pas accès à une éducation digne de ce nom. On essaie, jour après jour.

La FCM n’est pas un parti politique, mais un combat identitaire»

On vous accuse aussi parfois de politiser votre sacerdoce... 
Je n’ai jamais politisé mon sacerdoce ! Ce sont les gens qui politisent mon sacerdoce. J’ai toujours dit haut et fort que ma soutane me colle à la peau. Si j’enlève cette soutane, je suis écorché vif. Alors, je ne politise pas. Ce sont les autres qui politisent.

Je le redis, je n’ai jamais utilisé mon sacerdoce pour faire de la politique, sinon, j’aurais quitté la prêtrise depuis longtemps. J’espère continuer jusqu’à ce que le Seigneur m’appelle. Je ne sais pas quand, mais il va m’appeler un jour là-haut. Je partirai prêtre.

Vous avez aussi composé beaucoup d’albums et de chants en langue créole. Pourquoi, pour vous, est-il important d’utiliser la musique pour transmettre, surtout en créole ?
Parce que ça fonctionne, tout simplement. Né en 1955, j’ai vécu un tournant majeur avec le Concile Vatican II, qui, cinq ans plus tard, a proclamé que la liturgie devait désormais être célébrée dans la langue vernaculaire. Fini le latin, qui était la norme à l’époque. Je me souviens que, quand j’allais à la messe avec ma mère à 5 heures du matin, c’était en latin.

Il y avait un aspect mystique dans ce langage, dans la manière de célébrer… c’était une expérience particulière. Mais ensuite, on a dit qu’il fallait que la liturgie se fasse dans la langue du peuple. Or, à Maurice, la plupart des fidèles, environ 90 % de la population catholique, sont créoles. Et parmi eux, peu maîtrisaient le français à cette époque.

Je me rappelle en 1986, lors de mon premier serment canonique, ma mère me disait : « Mon fils, tu as très bien parlé. » Je lui ai demandé si elle avait compris, et elle m’a répondu de nouveau : « Mon fils, tu as très bien parlé. » Cela m’a fait réaliser que si ma propre mère n’avait rien saisi, il y avait de fortes chances que la majorité de l’assemblée n’ait rien compris non plus.

C’est à ce moment-là que je me suis dit : « Je peux changer ça. » C’est ainsi que j’ai commencé à composer des chants. Et pourquoi des chants ? Parce que la musique, c’est dans notre sang. Et en mêlant la musique aux textes bibliques, on crée une connexion forte. Quand mes chants démarrent, ce n’est pas juste le refrain que les gens reprennent, mais toute la chanson. Dès la première note, tout le monde chante.

C’est pour ça que je peux animer des sessions de trois heures sans problème : les gens chantent, vibrent, et ces chants apportent guérison, transformation et même conversion.

Ma soutane me colle à la peau. Si je l’enlève, je suis écorché vif»

Vous avez également vécu un cancer. En quoi cette épreuve vous a-t-elle transformé ?
On parlait justement de doute… Ce Dieu que je désire servir, à qui je donne ma vie, voilà qu’il me donne un cancer. C’est un cheminement intérieur, car c’est dans la souffrance que l’on peut reconnaître la voix de Dieu qui nous parle.

La souffrance devient un chemin de compassion quand on essaie de comprendre comment elle peut nous aider à mieux saisir notre vie, notre avenir, notre « purpose » - comme on dit en anglais, notre raison d’être. Cette épreuve nous confronte aussi à notre propre mortalité.

Quand j’ai appris que j’avais un cancer, un cancer du sein de surcroît, j’ai voulu démystifier la maladie. À l’époque, c’était un sujet tabou, mais mon cas a été largement relayé dans la presse. Lorsque je partais aux États-Unis pour mes interventions, j’en parlais ouvertement, et pendant mon traitement, je diffusais régulièrement un bulletin intitulé Health News.

Mon but était de redonner confiance et espoir à ceux qui souffrent. Je ne savais pas combien de temps il me restait, puisque mon cancer date de 2002. Mais depuis, de plus en plus de personnes ont osé parler ouvertement de la maladie. Parce que connaître son ennemi, c’est déjà le premier pas pour mieux le confronter.

Diriez-vous que vous avez foi en Maurice ?
La foi en Maurice, non. Mais en les Mauriciens, oui. Maurice, c’est avant tout une île, le vestige d’un volcan. Mais ce qui fait vraiment l’île Maurice, ce qui en constitue l’âme et la beauté, ce n’est pas seulement ses plages ou ses paysages, c’est son peuple.

J’ai foi en ce peuple. Parce que tôt ou tard, l’île Maurice, comme d’autres grandes nations ou légendes, comme l’Atlantide, pourrait disparaître, notamment à cause des enjeux environnementaux et climatiques.
Mais qu’est-ce qui fait la vraie beauté de Maurice ? Si les Mauriciens étaient un grand navire, et que ce navire prenait l’eau, nous coulerions tous ensemble. Ma foi, c’est que si je commence à sombrer, quelqu’un prendra ma main pour me relever.

Les grossesses précoces chez les mineures sont un vrai problème social. Que faire, selon vous ?
Je ne prétends pas avoir de solution miracle, car il y a déjà des institutions dédiées à cela. Ce que je dis, c’est qu’il faut entourer ces jeunes filles d’amour et de compassion, sans jamais les juger. Le vrai problème, que ce soit pour les grossesses précoces ou la drogue, c’est qu’on est trop vite à condamner, à stigmatiser, à pointer du doigt.

Pour moi, il faut d’abord soigner la blessure. Comprendre ce qui a mené à cette situation, mais avant tout, apporter de l’aide, de l’amour, de la compassion. Ce n’est qu’ensuite qu’on pourra réfléchir à comment éviter que cela se reproduise.

On dénombre plus de 200 abandons de bébés en deux ans…
Je ne peux pas expliquer pourquoi ces actes se produisent. Mais là encore, la priorité est de prendre soin de ces enfants. Il y a clairement un problème social, familial, et même sociétal. C’est comme un accident : au lieu de chercher qui est coupable, il faut d’abord soigner et accompagner. Oui, il y a un gros problème social, et ce n’est pas une question simple.

Il faut aussi s’interroger sur les valeurs familiales transmises. Quand une jeune fille en arrive à abandonner son bébé, cela renvoie à des manques, à des failles dans l’éducation et dans l’environnement familial.

Ces questions devront être abordées plus tard. Pour l’instant, le plus important est de soigner les blessures. Ensuite, on pourra chercher les solutions à apporter, en impliquant les institutions, l’État, la famille, et même l’Église.

Y a-t-il déjà eu un moment où vous avez pensé à rendre votre soutane ?
Jamais ! Qui a dit que je voulais rendre ma soutane ? (rires) Je me souviens très bien d’une interview où un journaliste avait évoqué cela. J’avais répondu que je n’avais aucune intention de la rendre, mais que si un jour l’évêque me le demandait, je la lui remettrais. Cela ne changerait rien à ce que je suis : prêtre aujourd’hui, prêtre jusqu’à ma mort.

Sara Lutchman et Jean-Claude Dedans

 

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