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Confidences d’une prostituée : les dessous d’une vie rythmée par l’exploitation

bina La vie de Bina, qui dit souffrir d’un handicap mental, n’a été que misère et exploitation.

Dès l’enfance, Bina n’a connu que dévalorisation, attouchements, abus et humiliation. Dans le récit qu’elle fait, elle raconte comment elle est tombée dans la prostitution et elle parle des malheurs qui l’ont marquée à vie…

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À 45 ans, Bina, qui habite un faubourg de la capitale, est la proie de prédateurs sexuels, qui ont profité de sa faiblesse et de sa vulnérabilité. Quand on écoute son témoignage, on comprend qu’elle souffre de troubles mentaux et qu’au lieu de recevoir une attention particulière, elle n’a connu que dévalorisation, attouchements, harcèlement, abus et humiliation. Et cela a duré toute sa vie.

Issue d’une famille de deux enfants, Bina, qui est l’aînée, était âgée de cinq ans quand ses parents se sont séparés. Elle a étudié jusqu’au Certificate of Primary Education. Mais elle a dû abandonner ses études en Form I. À l’âge de dix ans, elle a été envoyée chez sa grand-mère, qui habitait Rose-Hill. « Ma mère avait des problèmes de santé. Elle n’arrivait pas à s’occuper de moi quand j’avais des crises d’épilepsie. Je n’ai pas eu la chance de suivre un traitement. À l’âge de cinq ans, mo ti al res kot mo papa. Li ousi li pa finn kapav okip mwa. Lerla linn avoy mwa kot mo granmer », raconte-t-elle.

À compter de cet instant, la vie de Bina , alors âgée de 10 ans, prendra une autre tournure. Elle nous raconte qu’une fois chez sa grand-mère maternelle, un cousin de 12 ans a commencé à lui faire subir des attouchements sexuels et à les faire passer comme leurs petits secrets. Ce petit jeu a continué jusqu’à ce qu’ils finissent par avoir des rapports sexuels. Bina avait alors 14 ans. « Je me souviens que mon cousin et moi fréquentions même des boîtes de nuit. Souvan, mo pa ti kontan li me li ti abiz mwa sak fwa. Mo pa ti dir personn e kan mo granmer finn okouran linn dir pa dir personn », relate-t-elle.

Séjour en France

À 15 ans, Bina a commencé à travailler dans une usine. À 16 ans, elle est allée habiter chez un certain Bindu à Grand-Baie. C’était un proxénète qui vendait des filles. « Il a commencé à exiger de moi que je vende mon corps. Koumansman mo ti refize. Apre monn bizin par aksepte pou gagn kas », précise-t-elle. Puis un jour elle a rencontré un client étranger, un Français prénommé Claude. Ce dernier est tombé sous le charme de Bina. Il a décidé de « l’acheter » à Bindu. « Li ti pey Bindu 400 francs. Mo ti fek gagn 18 an. Claude finn amenn mwa La France, à Pontier, en île de France. Li ti zanti e li ti fer mwa travay dan so laferm. Me linn fini par fer mwa vinn so esklav seksiel. Pandan de zan monn viv ek li apre li finn retourn Maurice parski mo ti anvi trouv mo mama ki ti byen malad », explique Bina.

Après un passage à Maurice où elle passera quelques mois, elle est rentrée en France. Mais Claude ne voulait plus d’elle. Bina souligne qu’elle a dû loger chez un couple d’amis à Paris. Elle a fini par craquer avant de sombrer dans une dépression. Elle a été internée pendant plus deux ans dans un hôpital psychiatrique pour y recevoir des traitements. Une fois sa santé rétablie, elle s’est prostituée pendant un an en France jusqu’à ce que les autorités l’attrapent et l’expulsent vers Maurice.

Fragile et semblant avoir perdu ses facultés mentales, Bina a été suivie par le service de santé publique. Elle a commencé à percevoir une pension d’invalidité. Entre-temps, elle est retournée chez sa grand-mère. Sauf que là-bas, le concubin de cette dernière a profité de sa faiblesse pour avoir des rapports sexuels avec elle. Bina est tombée enceinte. Sa grand-mère l’a chassée de sa maison. Elle a alors trouvé refuge chez sa mère. Elle a donné naissance à un garçon que le père biologique a décidé de prendre en charge.

Monts et merveilles

Malgré son handicap mental, Bina a tenté de changer de vie. Elle a trouvé un emploi dans un couvent. Elle a alors rencontré un employé qui, à son tour, lui a promis monts et merveilles. Ils se sont mis en concubinage. De cette union sont nés deux enfants. Le concubin de Bina a ensuite mis les voiles. Les autorités ont pris les deux filles de Bina pour les placer dans un foyer. Aujourd’hui elles sont adolescentes.

Quelque temps après, Bina a fait la connaissance d’un homme avec lequel elle est allée vivre. Mais elle a vécu un véritable calvaire avec lui. C’était un toxicomane qui la brutalisait et qui lui volait même sa pension d’invalidité. N’en pouvant plus, Bina a porté plainte contre lui au poste de police de Terre-Rouge. L’homme s’est retrouvé derrière les barreaux.

Entre-temps, Bina a fui pour trouver refuge chez une femme dans une maison close. « Ti enn bordel. Linn obliz mwa dormi ek bann toksikomann. Linn mem pran mo kart pansion ziska enn zour mo met dife dan so matela parski li ti kokin tou mo kas. Li ti mem brile e li ti res demwa lopital », dit-elle. Bina a été arrêtée dans le cadre de cette affaire. Elle a écopé d’un an et demi de prison pour crime d’incendie. En mars 2018, elle a été libérée.

Dépourvue de toute aide, Bina loue une maison dans un faubourg de Port-Louis. Elle est devenue la proie de toxicomanes qui n’hésitent pas à abuser d’elle. Comme un malheur ne vient jamais seul, elle explique avoir perdu sa carte de pension d’invalidité de même que sa carte d’identité. Elle n’arrive donc plus à toucher sa pension. « Sa bann toksikomann la finn kokin mo portab. Zot inn fouy dan mo sak pou pran mo ti kas mo resi gagne. Parfwa mo oblize kontign vann mo lekor pou mo gagn enn ti kas mo kapav aste manze e pey mo lwaye », conclut Bina dont la vie n’a été qu’une suite de malheurs et de mauvaises rencontres…

 

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