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Violence basée sur le genre : ces coûts au-delà des coups

Le Kolektik Drwa Imin (KDI) a présenté une étude sur le coût économique de la violence sexiste.

Le Kolektif Drwa Imin a dévoilé les résultats d’une étude sur le coût économique de la violence basée sur le genre. Elle a été financée à travers des fonds du Commonwealth obtenus par le Kaleidoscope Trust, une organisation à but non lucratif militant pour les droits humains et de la communauté LGBT+.

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Les coûts de la violence envers les groupes vulnérables tels que les enfants, les femmes et la communauté LGBTQ+ sont souvent sous-estimés. À travers l’étude intitulée Gender-Based Violence and its Impact on the Economic Cost in Mauritius, le Kolektif Drwa Imin (KDI) les met en lumière. C’était mercredi, lors d’un atelier à l’hôtel Voilà Bagatelle. Le site web kdimoris.mu a aussi été lancé à cette occasion.

Cette étude a été menée de novembre 2022 à mars 2023 auprès d’un échantillon de plus de 600 personnes et a été réalisée par quatre doctorantes pour le compte de KDI, à savoir Dr Soujata Rughoobur-Seetah (PhD en Management avec une spécialisation en gestion des ressources humaines), Dr Sanju Naraidoo (PhD en Économie), Yarti Deonaran (PhD en Finance - en cours d’examen) et Dr Loga Devi Balla Soupramanien (PhD en Droit). 

La Gender-Based Violence (GBV) désigne toute forme de violence physique, sexuelle, mentale et morale visant à discriminer une personne en raison de son sexe. L’étude met en évidence les coûts économiques considérables pour la société, qui doit mettre en place des systèmes de santé, de soutien social et judiciaire, ainsi que des budgets pour lutter contre ce fléau. Elle révèle également que les victimes et les ménages subissent des pertes financières importantes, notamment en payant pour des services liés à la violence et en perdant leur source de revenus. 
La perte de production économique est un autre facteur à prendre en compte. L’étude souligne que les coûts économiques de la violence sont très élevés, et qu’ils pourraient être encore plus exorbitants, étant donné que de nombreux cas ne sont pas signalés.

L’étude a examiné différentes variables, dont la prévalence de la violence, l’abus émotionnel, la sensibilisation et l’efficacité des lois, les pertes éducatives, les coûts personnels, les coûts de santé, les coûts juridiques et les coûts indirects.

En ce qui concerne les limites de cette étude, il y a un manque de données précises sur les coûts unitaires que l’État doit supporter pour aider les victimes de violence sexiste à travers différents services tels que les soins médicaux, l’assistance juridique et psychologique. De plus, il y a de nombreuses données manquantes sur les dépenses encourues par les victimes, telles que la perte de salaire due aux heures de travail manquées. Il n’y a pas non plus d’informations sur les pertes de revenus et de production dues à l’incarcération des auteurs. 
En ce qui concerne la prévalence de la GBV, il y a des cas non signalés et une incohérence dans les statistiques : la police, le Bureau de soutien familial, les ONG et Statistics Mauritius ne disposent pas de chiffres harmonisés.

L’étude examine également l’impact de la GBV sur les enfants, les adolescents et les personnes LGBTQI+.

Coûts économiques

Les coûts économiques incluent les frais de transport, les frais médicaux pour les blessures physiques, les frais de consultation pour les traumatismes psychologiques, les frais judiciaires et les frais de justice. Cependant, il est difficile d’évaluer de manière précise les coûts économiques liés à la GBV, tels que la perte de productivité au travail et les conséquences sur l’économie. 

Pour l’État, plusieurs coûts sont à prendre en compte, tels que ceux dans le secteur judiciaire, pénitentiaire et policier, ainsi que les coûts liés à l’invalidité permanente totale, les risques accrus de MST, de Sida, d’hépatite, entre autres. 

Questions à…Mélanie Vigier de Latour-Bérenger, membre du Kolektif drwa imin : «Les violences sexistes et sexuelles sont largement sous-déclarées» 

Que retenez-vous de cette étude commanditée par KDI ?
Il y a trois principaux points : 

  • les coûts ne sont vraiment qu’indicatifs et sont loin de refléter la réalité des coûts encourus par les victimes.
  • Les violences sexistes et sexuelles sont largement sous-déclarées par peur, honte, menaces, tabou, appréhension de « ki dimoun pou dir », par méconnaissance que ce qui est subi relève de la violence.
  • Le manque de statistiques spécifiques de l’État.

Cela a-t-il été facile de recueillir les informations ?
Nous avons travaillé et fait confiance à une équipe de chercheuses, expertes en économie, finances, droit et ressources humaines. Le laps de temps pour cette recherche a été court. Le professionnalisme de cette équipe et le travail en réseau des membres du KDI ont néanmoins permis l’accès à des victimes de violence.

Quelles sont vos attentes de la part des autorités à l’issue de cette étude ?

Nous rejoignons les recommandations de ce rapport et demandons :

  • Que le Gender Equality Bill soit enfin porté au Parlement, avec une considération non-binaire des genres, que la loi soit inclusive pour tous/toutes.
  • Que la violence verbale, psychologique et émotionnelle soit clairement définie dans le Protection From Domestic Violence Act. Cette forme de violence est rapportée comme étant la plus subie par les victimes.

L’État a un « duty of care » de tous les citoyens et de toutes les citoyennes. Il est fondamental d’investir dans une prise en charge efficace des personnes victimes de violence, dans la formation des officiers de ministères et de police en contact avec les victimes, et dans les shelters.

Il est essentiel de mener des sessions de sensibilisation et des campagnes de qualité sur l’égalité des genres, les violences ainsi que sur les lois et les ordres de protection existants. Cela aiderait les personnes victimes et contribuerait à la prévention de ces violences.

Il faut harmoniser les statistiques entre le Family Support Bureau, la police, etc., et les mettre régulièrement à jour. Depuis quelques années, on parle d’un observatoire, qui doit effectivement être créé. Les données recueillies devraient être spécifiques aux ministères de la Santé et de l’Égalité des genres, ainsi qu’à la National Social Inclusion Foundation pour la problématique de la violence sexiste pour une meilleure compréhension et une prise en charge plus efficace.

Des campagnes sont menées pour diminuer la violence liée au genre. Que faut-il faire pour promouvoir l’égalité, l’inclusion et la protection pour tous ? 
Davantage de campagnes de qualité, pensées avec des expert(e)s et la société civile, sont requises. Nous faisons régulièrement des recommandations aux député(e)s pour plus d’inclusion, d’égalité et de protection. Une vraie volonté politique est aussi nécessaire.

En chiffres

Au cours des 12 derniers mois…

  • 20 % des répondants déclarent être fréquemment victimes de violence et 3,3 % sont quotidiennement victimes de violence.
  • Les formes les plus importantes de violence contre les Mauriciennes sont verbale, émotionnelle et psychologique. C’est le type de violence à laquelle les enfants sont le plus confrontés, selon leurs parents.
  • 32 mères ont déclaré que leurs maris/partenaires actuels étaient responsables de la violence sur leur(s) enfant(s) et 21 femmes ont déclaré que leurs maris/partenaires précédents étaient responsables de la violence.
  • 64 femmes ont signalé que la violence et les blessures affectaient la scolarisation des enfants. 44 femmes ont déclaré que leur(s) enfant(s) ne pouvaient pas aller à l’école.
  • 127 femmes ont mentionné que les blessures/violences avaient affecté leur travail domestique.
  • 79 ne pouvaient pas s’occuper des membres de la famille.
  • salon

     

 

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