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Transport de masse : comment le Metro Express et les nouvelles routes vont s’intégrer

Deux solutions pour un unique problème : le Metro Express et le Road Decongestion Programme sont développés en parallèle. Comment vont-ils se compléter ? Explications.

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D’une part, le projet Metro Express est vendu comme la prochaine révolution dans le transport de masse, de l’autre, les projets de désengorgement des routes qui sont en phase de développement depuis plusieurs années se poursuivent. Le Metro Express et le Road Decongestion Programme (RDP) sont-ils compatibles ? Oui, assurent les têtes pensantes du gouvernement qui en sont les concepteurs. Ils se penchent déjà sur le meilleur moyen d’intégrer Metro Express et RDP.

Une source qui travaille sur le dossier du Metro Express explique notamment comment les deux projets s’influencent mutuellement, notamment au niveau de l’échangeur de Jumbo à Phœnix. C’est le seul point où le tracé du métro rejoint un projet du RDP. « Les plans initiaux du métro voulaient que la ligne survole le rond-point avant de redescendre au niveau de la route vers St Jean, explique cette source, mais l’échangeur prévoit le même genre de système pour les véhicules. Du coup, le métro passera au niveau de la route et l’on évitera ainsi les embouteillages. »

Harmonisation

Plus près de la capitale, à La Butte, l’alignement du métro rejoint l’autoroute, au niveau du rond-point du Caudan. Un autre projet routier est prévu pour aboutir à la rue Deschartres. Là encore, l’alignement du métro prendra cela en considération. « L’alignement suivra le flanc de la montagne des Signaux jusqu’à La Butte, indique notre source. Là, le métro traversera l’intersection sur pilotis pour rejoindre l’autoroute. On aura une vue spectaculaire sur toute la ville à partir du métro. »

Une deuxième source, du ministère des Infrastructures publiques insiste toutefois sur le fait que l’introduction du Metro Express n’apportera que des modifications mineures au RDP. Le souci principal sera d’harmoniser les deux. « En fin de compte, les deux projets ont pour objectif de transporter les mêmes personnes, explique notre deuxième source. La priorité est de faciliter le transit de l’autobus pour aller vers le métro, surtout si les bus deviennent des feeders. » Les gares seront donc des gares mixtes métro-autobus. La rare exception sera la gare Victoria, à Port-Louis, à cause de l’autoroute. L’emplacement actuel sera utilisé pour la nouvelle gare d’autobus, mais la gare du métro se trouvera de l’autre côté de l’autoroute, près du Caudan. D’où la nécessité de construire une passerelle qui reliera les deux.

Offre diversifiée

Cette même source assure aussi que des aires de stationnement seront aménagées pour encourager les citadins à garer leurs véhicules et emprunter le métro. « Nous aurons un bâtiment sur plusieurs étages dans le plan de réaménagement de la gare Victoria qui fournira entre 400 et 1 000 places de parking, explique notre source. Il y aura aussi des navettes permanentes vers le Champ de Mars, où il y a un autre projet de parking. » Avec la phase 2 de la Ring Road et son tunnel qui traversera la montagne, cette source estime que les automobilistes pourront atteindre Curepipe en 20 minutes.

Ces changements auront donc un impact conséquent sur la manière dont Port-Louis est organisée et pensée. Gaëtan Siew, architecte et président du Construction Industry Development Board (CIDB), explique : « Il s’agit d’arrêter et de garer les voitures aux trois points d’entrée dans la ville, soit Victoria, la Place de l’Immigration et le Champs de Mars, explique-t-il. Cela libérera les routes prioritaires pour aménager une ligne de bus circulaire dans un couloir réservé. Cela devrait aussi permettre de créer des routes piétonnes. Le métro et la Ring Road offriront une offre diversifiée aux usagers », assure l’architecte.


Vasant Jogoo, urbaniste : «Il y a trop de politiques contradictoires»

Le Metro Express remet-il en cause le Road Decongestion Programme ?
Pas nécessairement. Malheureusement, nous avons trop peu d’informations sur le projet Metro Express pour se faire une idée précise. On est conscient que les infrastructures de transport jouent un rôle stratégique primordial dans l’efficacité et le développement économique d’un pays. Mais une politique de transport au niveau national s’insère dans un schéma global qui assure une cohérence et une complémentarité entre les différentes politiques sectorielles. Nous prenons connaissance des projets au compte-gouttes, mais ce qui manque à ce gouvernement, c’est précisément cette vision à terme qui est traduite en stratégie. Il y a trop de politiques contradictoires : on veut doter le couloir Curepipe-Port-Louis d’un système de transport de masse moderne, à haute capacité mais en même temps, on s’évertue à vouloir transférer la fonction administrative de la capitale vers Highlands, compromettant ainsi la durabilité du projet métro léger.

Comment s’assurer que les deux sont complémentaires ?
Il est bon de se rappeler que le concept de transit de masse fut introduit dans le contexte du schéma d’aménagement du territoire de l’île Maurice en 1977. Ce schéma devait constituer un plan-cadre qui allait faciliter la mise en œuvre des politiques sectorielles (transport, par exemple) afin d’assurer une certaine cohérence au niveau des investissements en infrastructures et autres implantations physiques. Mais, déjà, on avait bien compris le rôle privilégié qu’allait jouer le transport en commun dans le développement du pays. Les nombreux bénéfices liés à l’environnement, à la sécurité et à la qualité de vie qu’aurait généré un réseau de transport collectif efficace, étaient bien reconnus. D’autres schémas ont suivi, et le concept de transit de masse est toujours resté comme l’une des propositions phares. Malheureusement, les schémas d’aménagement n’ont pas toujours été suivis comme il le fallait. Aujourd’hui, on s’embarque dans des projets d’investissements massifs dans le réseau de transport, que ce soit au niveau du métro léger ou du Road Decongestion Programme, sans qu’il y ait ce plan «cadre» qui aurait assuré une certaine complémentarité.

Avec la Ring Road et le métro, le centre-ville devrait vraiment être désengorgé. Est-il possible de songer à des rues piétonnières ?
Désengorgé ? Pas nécessairement. Le manque de cohérence au niveau des interventions ne nous rassure pas. Le ministre des Infrastructures publiques a indiqué que les lignes d’autobus actuelles desservant Port-Louis seront maintenues ; que rien ne sera fait pour décourager l’utilisation des voitures privées pour se rendre au travail. Il semble que rien n’est fait pour encourager les gens à délaisser leurs voitures pour le métro. N’oublions pas que ce sont les zones périphériques des villes et les zones côtières qui enregistrent depuis plusieurs années la croissance démographique la plus forte. L’absence d’une stratégie de développement urbain, une stratégie qui aurait privilégié une urbanisation compacte au lieu d’être étalée, comme c’est le cas maintenant, n’augure rien de bon pour la durabilité et la fiabilité du projet métro léger. Si les autorités songent à des rues piétonnières aujourd’hui, c’est en interdisant le stationnement le long des artères et en créant un parking géant au Champ de Mars, espérant ainsi libérer quelques rues pour les rendre aux piétons. Ce genre d’aménagement aurait pu se faire indépendamment des projets tels que le métro ou la route circulaire.

Quelles autres mesures devraient être prises pour que les citadins puissent s’adapter à ces changements ?
La première mesure reste un processus de consultation transparente, franche et ouverte à tous les citoyens. Il faut en finir avec ces semblants de consultations !

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