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Les jumeaux Gungah : un miroir à deux voix

Kevan et Ketan Gungah mesurent pleinement la chance d’être jumeaux.

À Sodnac, Ketan et Kevan Gungah partagent plus qu’un nom. Deux frères, deux chemins, une seule émotion. Une complicité silencieuse. Une vie à l’unisson. Portrait d’une fraternité unique.

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«Il n’y a pas de moi sans lui. On est deux versions d’un même cœur. » Kevan Gungah le dit sans emphase. Comme une évidence qu’on ne questionne plus. Comme un secret ancien, trop souvent banalisé : celui d’une vie menée à deux voix, sans dissonance.

Ils sont nés un 22 février, en l’an 2000, dans le quartier tranquille de Sodnac, à Quatre-Bornes. Ketan et Kevan Gungah. Deux prénoms presque jumeaux, pour deux vies qui le sont tout à fait. Depuis leur premier souffle, tout – ou presque – s’est écrit en tandem. « Être jumeaux, c’est comme être né avec un miroir en face de soi. Tu ne peux jamais vraiment te perdre », glisse Ketan.

Dans leur enfance, on les confondait souvent. Les adultes hésitaient, les copains faisaient semblant. Eux, riaient. Cette confusion, ils ne l’ont jamais mal vécue. Elle faisait partie du jeu, du pacte silencieux qu’ils ont scellé avant même de savoir parler. À l’école, ils partageaient les bancs, les jeux inventés, les secrets sous les draps. Aujourd’hui encore, rien – ou presque – n’a changé.

Leurs chemins professionnels ont fini par se différencier : l’un travaille dans la gestion immobilière, l’autre dans la banque. Deux carrières distinctes, certes, mais qui avancent en parallèle. Pas un pas sans l’autre. « On se soutient sans condition, affirme Kevan. Quand il réussit, j’ai l’impression d’avoir gagné moi aussi. »

Banquier chez Absa, Kevan confie : « On est très proches. Notre relation a évolué avec le temps, mais ce lien de base ne s’est jamais affaibli. » Son frère Ketan complète, avec la simplicité d’une évidence : « Les expériences que nous avons traversées ensemble nous ont renforcés. Nous sommes différents, mais complémentaires. C’est ça, notre force. »

Ils parlent souvent de lancer un projet ensemble. Une entreprise, peut-être. Une idée encore floue mais persistante. « Ce serait quelque chose qui nous ressemble, un endroit où notre complicité serait une force », dit Ketan. Il n’y a pas de plan précis, juste cette volonté constante d’être dans le même mouvement.

Leurs goûts, eux, continuent de s’accorder. Presque au détail près. Surtout quand il est question de nourriture. « On est de vrais foodies, rigole Kevan. On aime 99 % des mêmes choses. » Des plats indiens traditionnels aux adresses les plus branchées de Port-Louis, ils goûtent tout ensemble. Une bouchée pour l’un, un sourire pour l’autre.

Ce lien passe également par le silence. « On ne se parle pas toujours avec des mots, explique Ketan. Un regard suffit. » Cette proximité est moins visible qu’elle ne se ressent. Une présence constante, discrète, mais solide. Pas de rivalité, pas de compétition, seulement un respect mutuel, une tendresse palpable.

Être jumeaux, c’est avoir un témoin privilégié de sa propre existence. Quelqu’un qui te connaît mieux que toi-même.»

Quand la vie les sépare – un séminaire, un déplacement professionnel, un simple contretemps –, le manque se manifeste vite. « Il y a comme un déséquilibre, une impression que quelque chose cloche », confie Ketan. Son frère complète : « Oui, parfois on ressent un vide. C’est bizarre, mais c’est réel. »

Ils racontent cette anecdote, presque troublante. Un jour, Kevan ressent une douleur au ventre, sans raison apparente. Il appelle son frère. De l’autre côté du fil, Ketan est alité, malade. Rien d’exceptionnel pour eux. « Parfois, c’est comme si nos âmes se parlaient sans qu’on s’en rende compte. »

On pourrait croire à de la superstition. Mais chez les Gungah, c’est simplement la vie telle qu’ils la connaissent. Une vie où l’émotion de l’un affleure dans le corps de l’autre. Où la joie de l’un éclaire la journée du second. « Ah oui, définitivement. On ressent toutes les émotions de l’autre. Quand l’un a le cœur lourd, l’autre le sent, même sans qu’un mot soit prononcé », dit simplement Kevan. « Quand je souffre, il le ressent. Quand je suis heureux, il le sait. Même à des kilomètres de distance. »

Et les disputes, quand elles arrivent, ne laissent jamais de traces durables. Kevan l’affirme : « Comme dans toutes les relations, il y a des hauts et des bas. On peut se quereller pour des broutilles – choisir un programme télé, ou décider qui cuisine ce soir – mais ça ne dure jamais. Ce qui nous unit est plus fort. On ne se lâche jamais. Et on sera toujours là l’un pour l’autre. »

Ce témoignage rejoint une vérité universelle : chez les jumeaux, l’attachement dépasse l’émotion, il devient presque cellulaire. Ils évoquent les disputes fugaces, les réconciliations rapides, les fous rires partagés et les rêves chuchotés tard dans la nuit.

Dans leur entourage, cette complicité suscite souvent l’envie. « On nous dit fréquemment : j’aimerais avoir un frère comme toi », confie Kevan. Cette phrase les touche, car elle leur rappelle la chance qu’ils ont : « Oui, c’est une véritable bénédiction. »

Il y a quelque chose de rare dans ce lien, une douceur solide, une constance. Ce n’est pas une fusion étouffante, ni une dépendance. C’est une présence. Une sorte de fraternité augmentée, qui échappe aux mots. « Être jumeaux, c’est avoir un témoin privilégié de sa propre existence. Quelqu’un qui te connaît mieux que toi-même », résument-ils.

Ketan et Kevan n’ont pas besoin de le prouver. Il suffit de les observer. Deux corps qui se répondent, deux regards qui se cherchent à peine, deux vies menées au diapason. Leur histoire ne cherche pas à impressionner. Elle touche par sa justesse.

Et dans ce monde souvent bruyant, elle rappelle une chose simple : certains liens ne s’expliquent pas. Ils se vivent. « Je suis né comme ça, donc pour moi, c’est tout à fait normal. Ce que les autres trouvent extraordinaire, c’est notre quotidien. Mais quand je regarde autour, je réalise à quel point ce lien est précieux », conclut Ketan.

Ajagen Koomalen Rungen et Azeem Khodabux 

 

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