Le secteur du tourisme a été à genoux avec la pandémie de Covid-19. Les divers opérateurs de ce domaine ont beaucoup souffert. Si les opérateurs majeurs ont pu se débattre dans ce marasme, par contre les petits ont eu beaucoup de peine à subsister. Ils espèrent que la situation va s’améliorer avec l’ouverture des frontières.
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Nassiruddin Nurwoollah : «On travaillait le matin pour manger le soir»
Cela fait 20 ans que Nassiruddin Nurwoollah travaille comme marchand ambulant sur la plage du Morne. Il a décroché son permis en 2011, alors âgé de 37 ans, après avoir pris la décision d’emboîter le pas à son père et à ses oncles. Cet habitant de Port-Louis a démarré avec la vente de produits artisanaux. Au fil du temps, il a changé de stratégie. Il avait du mal à joindre les deux bouts, car la compétition était féroce.
Paniers, nappes brodées, bijoux, autant d’objets qu’il fabriquait à partir de coquillages et d’oursins. « J’aime rencontrer des gens et je peux parler différentes langues et ainsi développer un lien avec des clients. Ce travail m’a permis de faire la connaissance de diverses personnalités », raconte notre interlocuteur. Ensuite, sa vie a été chamboulée avec les deux confinements et la fermeture des frontières. Mais la situation a commencé à se détériorer bien avant la pandémie. « Les marchands ambulants doivent débourser Rs 3 500 pour un permis alors qu’auparavant c’était gratuit. Rien que sur la plage où je travaillais, il y avait 40 autres marchands. De plus, certains paient un permis à Rs 300 et opèrent près des gorges. Ce qui impacte sur nos ventes. Sans parler de la concurrence déloyale des 52 marchands qui travaillent illégalement sur l’île aux Bénitiers », relate-t-il. Parfois, il n’arrivait même pas à avoir de l’argent pour le carburant après une journée de travail.
Cette situation l’a incité à changer de domaine. Depuis trois ans, il vend des fruits sur la plage du Morne. Sa spécialité : la salade d’avocat et le cœur de palmiste. « J’ai appris à éplucher des ananas sur YouTube. Je cherche des fruits de qualité, dont la papaye que je cultive », poursuit notre interlocuteur. Selon lui, la vente des fruits l’a rapporté plus que les produits artisanaux. Malheureusement, les choses se sont empirées avec la Covid-19. Et pour ne rien arranger, Nassiruddin Nurwoolah, étant un patient dialysé, touche déjà une pension à cause de sa santé précaire. C’est pourquoi il n’a pas obtenu le Self-Employed Assistance Scheme (SEAS). « J’ai une famille à nourrir. J’ai dû me débrouiller pour faire bouillir la marmite. Je me suis lancé dans la vente de légumes que j’allais récupérer à Malenga ou Notre-Dame. On travaillait le matin pour manger le soir », avoue-t-il.
Son espoir pour retrouver une vie meilleure réside dans la réouverture des frontières et la venue des touristes. Il est conscient qu’il doit prendre ses précautions, surtout avec la présence du variant Delta. « Même avant la Covid-19, je portais des gants et je désinfectais mon couteau avec du limon pour mes commandes. Je garde espoir que notre sort va s’améliorer », conclut ce père de deux enfants.
23 817 touristes depuis le 1er octobre
Du 1er au 15 octobre, 29 341 passagers ont foulé le sol mauricien. C’est ce qui ressort d’un document de l’Airport Terminal Operations Ltd. Parmi 23 817 sont des étrangers.
Natasha Mangraja : « On essaye de survivre »
Avec son époux, Vishal Mangraja, connu dans le domaine de la pyrogravure, Natasha gérait une boutique de souvenirs, I Love Mahébourg. Cela fait deux ans que le magasin a fermé ses portes suite à la pandémie de Covid-19 et le naufrage du Wakashio. Natasha Mangraja était à deux doigts de baisser les bras, mais la réouverture des frontières représente un nouveau souffle.
« Les confinements et l'échouage du Wakashio ont eu un effet domino sur les opérateurs touristiques de Mahébourg. Dans ce village, les plaisanciers, les magasins de souvenirs et plusieurs autres personnes dépendent du tourisme pour subsister. Il y a un réseau de soutien et les opérateurs s’entraident. On avait du mal à sortir la tête de l’eau à cause des dégâts sociaux, économiques et psychologiques », explique-t-elle.
Après le décès de son époux, cette mère de deux enfants était sur le point de tout abandonner, mais elle a décidé de persévérer. « Tout était mort pendant deux ans. Je ne pouvais même pas payer le loyer pour ma boutique. La réouverture des frontières est une lueur d’espoir. J’ose croire que Mahébourg retrouvera sa joie de vivre et que les opérateurs pourront gagner leur vie. Ces épisodes m’ont permis d’apprendre à lutter et à tenir bon », précise-t-elle.
Avec son fils Jais, Natasha Mangraya, native de Mahébourg, essaye de relancer la boutique de souvenirs. Elle y propose des t-shirts et sacs, entre autres, avec l’emblème I LOVE MAHEBOURG. Elle explique que ce village a une importance capitale dans l’histoire de Maurice. « On essaye de valoriser notre endroit. Je me suis aussi affiliée avec deux autres femmes entrepreneures. On aspire à une vie meilleure en espérant que les produits locaux attireront davantage les étrangers aussi bien que les Mauriciens », conclut-elle.
Asraf Ali Ramdin : « Content, mais inquiet »
Asraf Ali Ramdin est le secrétaire de la General Taxi Owners Union. Selon lui, la situation est pénible pour les chauffeurs de taxi. « C’était vraiment dur avec la fermeture des frontières. Le Self Employed Assistance Scheme, de Rs 5 100, n‘était pas suffisant. C’est grâce aux aides de la famille que des chauffeurs de taxi d’hôtel comme moi ont pu survivre. N’empêche, on a accumulé du retard sur le paiement de nos emprunts. Heureusement que je n’ai pas de lease sur ma voiture, mais j’ai quand même un prêt immobilier à rembourser », fait-il remarquer.
Basé au Constance Prince Maurice, ce natif de Centre-de-Flacq pense que la réouverture des frontières permettra aux opérateurs touristiques de souffler. Mais, il ne cache pas son inquiétude. « Les touristes vont partout et quid du port du masque ? Dans un magasin, je vois mal les employés leur demander de porter un masque de peur de les offusquer et mettre en péril leur travail. Je crains que le variant Delta ne se propage et nous mette à genoux encore une fois », avance-t-il.
De plus, il y a également la concurrence déloyale des chauffeurs de taxi. « Ces derniers ont une base d’opérations. Toutefois, ils prennent les clients d’hôtel au détriment de ceux basés dans les établissements hôteliers ou encore à l’aéroport. Il y a aussi les contract car qui nous tuent à petit feu », évoque notre interlocuteur. Il souligne qu’une rencontre a été sollicitée avec le ministre du Transport, Alan Ganoo. Ainsi, il espère qu’une solution sera trouvée pour la survie des chauffeurs de taxi d’hôtels et de l’aéroport qui « souffrent. Pourtant, la situation aurait dû s'améliorer avec la réouverture des frontières ».
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