Préservation - Patrimoine national : restaurer et valoriser le passé 

Préserver les patrimoines nationaux c’est conserver la mémoire du pays. De ce fait, la restauration de ces sites à valeur historique est une étape cruciale. Elle doit se faire selon une méthodologie précise. Certains vestiges attendent de retrouver leur lustre et d’autres sont tombés dans l’oubli. Et, la liste des sites décrétés patrimoine national s’allonge. 

À ce jour, Maurice compte 197 sites classés patrimoine national. Six autres s’ajoutent à cette liste. Le Conseil des ministres a décrété le Château Bénarès, Le Batelage à Bel-Ombre, le Lavoir et l’Abreuvoir à Mahébourg, l’ancien bâtiment en pierre à Krishnanand Seva Ashram à Calebasses et le site où le drapeau mauricien a été hissé pour la toute première fois au Champ de Mars patrimoine national. Ce dernier site sera délimité et un mémorial y sera érigé. 

« La population et les touristes pourront y découvrir l’histoire de Maurice moderne et indépendante », a annoncé Avinash Teeluck, ministre des Arts et du Patrimoine culturel. C’était lors d’une remise de chèque aux quatre musées privés le 21 décembre 2021. Cette classification au patrimoine national permettra aussi la restauration de ces sites. « Il ne suffit pas de restaurer ces sites. Il est également important de leur attribuer une identité économique et leur redonner leur usage d’antan », a-t-il indiqué. 

Ces six nouveaux sites seront bientôt répertoriés dans la National Heritage Fund Act. Pourquoi la restauration de certains sites tarde-t-elle ou n’a-t-elle pas encore démarré ? Shivajee Dowlutrao, Officer-In-Charge du National Heritage Fund (NHF), explique que la restauration consiste à conserver l’originalité et la valeur historique d’un patrimoine national. « Certains sites appartiennent au secteur privé et pas à l’État. Le Château Bénarès est sous la responsabilité du conseil du district de Savanne. Le conseil, par exemple, peut soumettre un cahier des charges au NHF et le « board » va éplucher le dossier pour s’assurer que les critères sont respectés. Ces critères veillent à ce que l’authenticité du bâtiment soit préservée. Une fois l’aval donné, les travaux peuvent démarrer », avance-t-il. 

Il ajoute que les travaux de rénovation de la Tour des Hollandais à Vieux-Grand-Port sont presque achevés. « Nous avons pour objectif de réunir les artisans de la région sur ce site une fois les travaux complétés. »
Des travaux pour résoudre le problème de fuite d’eau à Al Aqsa Mosque, à Port-Louis, sont aussi en cours. Après un état des lieux par les ministres Anwar Husnoo et Avinash Teeluck en février, des ingénieurs ont procédé à des analyses. Construite en 1805, il s’agit de la première mosquée de l’île. Elle a été classée patrimoine national le 3 mai 2016. 

D’ailleurs, la restauration coûte les yeux de la tête. Le NHF peut désormais compter sur deux mesures annoncées dans le discours budgétaire 2021/2022. Premièrement, la restauration d’un bâtiment désigné comme patrimoine national se trouve sur la liste des domaines d’intervention du Corporate Social Responsability (CSR) Programme. Puis, il y a quatre tirages spéciaux de loto qui serviront à financer la restauration de sites historiques et de musées désignés. Ainsi, le public contribuera à conserver l’histoire du pays, via les quatre tirages spéciaux de loto. 

Shivajee Dowlutrao fait ressortir que certains sites classés patrimoine national sont accessibles au public notamment lors de journées portes ouvertes. Il y en a dans le cadre de la journée internationale des monuments et des sites observés le 18 avril. 

Sur Rs 100 jouées, Rs 25 va au Consolidated Fund

Les deux premiers tirages spéciaux de loto ont eu lieu les 18 et 25 décembre 2021. Plus de Rs 13 millions ont été rassemblées. Cette somme, qui normalement est destinée au Consolidated Fund, sera reversée au Heritage Fund, afin de restaurer les sites historiques et musées. Ce qui représente approximativement 25 % de la vente.

« Cette démarche s’aligne parfaitement au principe de financement de bonnes causes à travers les jeux de Lottotech. Notre équipe apprécie fortement la collaboration des ministères des Finances et des Arts et du Patrimoine culturel sur ce projet. Il est d’autant plus stimulant, car il y a plus de transparence et de visibilité sur l’allocation des fonds générés à travers nos opérations destinés aux bonnes causes », indique Virginie Pasnin, Communications and CSR Manager pour Lottotech. Elle fait ressortir que depuis le lancement du Loto, Lottotech a reversé plus de Rs 6 milliards au Consolidated Fund. 

Pour inaugurer le premier tirage du loto spécial patrimoine, Lottotech a ajouté un bonus de Rs 12 millions. Rs 10 millions comme bonus ont été ajoutées pour le second tirage. « Le montant du jackpot dépend de s’il y a un gagnant ou pas lors du précédent tirage. Comme les montants se sont accumulés, avec le bonus nous avons atteint un jackpot de Rs 20 millions pour le tirage du 18 et Rs 40 millions pour celui du 25 décembre », dit-elle. Un heureux joueur a remporté la cagnotte de Rs 40 millions le jour de Noël. 

 « En période de fêtes et de fin d’année, il y a toujours une plus forte affluence dans les supermarchés qui explique une hausse en participation. Néanmoins, le concept semble plaire aux joueurs, car nous avons eu de bons feedbacks sur le terrain et les réseaux sociaux. Jouer pour une cause donne du sens à leur participation. » 

Sur Rs 100 joués, Rs 25 vont au Consolidated Fund. Virginie Pasnin rappelle que dans le cas du tirage spécial patrimoine, le montant du Consolidated Fund est reversé au Heritage Fund. Le reste du montant (Rs 75) est réparti comme suit : (notez que les chiffres ont été arrondis)

	Rs
Paiement des gains aux joueurs	49
Commissions aux détaillants	6
Coûts opérationnels	17
Profits	3

 Les deux prochains tirages seront effectués en 2022. Mais aucune date n’a été fixée et les montants qui seront mis en jeu ne sont pas connus.

 

Différence entre rénovation et restauration

Thierry Le Breton, représentant de S.O.S. Patrimoine et expert en valorisation des territoires, explique la nuance entre rénovation et restauration. La restauration est souvent confondue avec la rénovation à Maurice. 

« La rénovation consiste à remettre une infrastructure à neuf. La restauration concerne les bâtiments à qualité patrimoine historique. Ce processus sert à restaurer l’esprit de son époque. » En sus de la qualité esthétique de la façade extérieure, l’intérieur d’un patrimoine national doit refléter son histoire. 

La restauration commence par la documentation. Les experts doivent effectuer des recherches et éplucher des archives notamment sur la qualité architecturale, l’usage du site, les mx utilisés ou encore si le site est associé à d’autres. Puis, il faut définir le projet en incluant le modèle économique du site classé patrimoine. Ce qui se fait par un spécialiste en conservation de patrimoine. « Souvent, les parties prenantes omettent ces deux premières étapes cruciales », fait-il observer.

Ensuite, le cahier des charges est remis à un architecte. « Nous avons remarqué qu’au fur et à mesure que les travaux de rénovation progressent, la qualité du bâtiment patrimonial recule », déplore-t-il. Il fait ressortir que les parties prenantes doivent élaborer une bonne stratégie de conservation et de valorisation des sites du patrimoine national. Il faut aussi s’assurer que la méthodologie de conservation répond aux attentes du public. L’existence de ces sites doit être communiquée au public pour qu’il prenne conscience de l’histoire de son pays. 

Il salue l’initiative des quatre tirages spéciaux du loto. « Toutefois, un bon projet de restauration contribue automatiquement à la rentabilité des sites. Il faut respecter les étapes de la restauration pour y parvenir », conclut-il.