Interview

Ny Hasina Andriantshenomamonjy : «Dans une démocratie réelle, la justice est pour tous…»

Ny Hasina Andriantshenomamonjy

Ny Hasina Andriantshenomamonjy est une jeune et brillante militante des droits humains. Traductrice professionnelle, elle est passionnée d’humanitaire et une des chevilles ouvrières de DIS-MOI Madagascar, organisation qui commence à faire son chemin lentement mais sûrement.

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Qui est Ny Hasina ?
Je suis Ny Hasina Andriantsehenomamonjy, de nationalité malgache, mère d’une fille. Je suis  devenue à 39 ans la secrétaire générale et coordinatrice de Dis-Moi Madagascar. Je suis aussi la leader de la « Commission des droits des personnes âgées » de l’organisation, depuis sa mise en place dans le courant de cette année. Angliciste de formation, j’ai entrepris des études supérieures en Lettres anglaises à l’université d’Antananarivo. À l’issue de mes études, j’ai obtenu la licence es lettres, j’embrasse la carrière d’enseignante dans des écoles à vocation humanitaire où sont éduqués des enfants issus des quartiers vulnérables de la capitale malgache. Ce qui m’a énormément aidé à acquérir des capacités d’écoute.

Comment êtes-vous tombée dans la marmite Dis-Moi et en quoi les droits humains sont-ils importants pour Madagascar?
Depuis mon enfance, j’ai toujours aspiré à travailler dans l’humanitaire, mais l’occasion ne s’est pas encore présentée. On m’a alors parlé de Dis-Moi Maurice et de ses activités, ainsi que la formation en ligne sur les droits humains à laquelle j’ai pleinement participé, presque avec avidité. Consciente de la réalité des droits humains à Madagascar, je me suis dit que c’est le moment de faire quelque chose pour le pays pour un changement de mentalité et de comportement.

Grâce à la formation en ligne proposée par Dis-Moi à laquelle j’ai participé passionnément, je me suis dit que c’est le moment ou jamais de me lancer pour apporter ma part de contribution pour mon pays où la démocratie règne en théorie et la culture des droits humains est totalement méprisée et la cohabitation des 19 ethnies encore très fragile.

Le peuple Malgache attend de ce nouveau gouvernement un renouveau total au niveau de l’administration surtout, ainsi que la remontée économique entre autres»

Dis-Moi Mada est encore un bébé qui vient de naître. Et l’organisation est dirigée essentiellement par des jeunes. N’est-ce pas dangereux de débuter une organisation uniquement avec des jeunes?
Malgré la jeunesse frappante des membres de notre équipe de Madagascar, je constate qu’ils ont vraiment le potentiel de gestion. En plus, ils sont motivés et espèrent apporter à leur tour quelque chose de positif pour le pays. Beaucoup d’activités ont été déjà réalisées depuis. Les avis des aînés sont toutefois les bienvenus.

Vous avez un nouveau gouvernement issu des urnes, ce qui est quand même un pas en avant par rapport à l’instabilité politique du passé. Qu’attendez-vous de lui ?
Avant de m’exprimer sur ce sujet, j’aimerais quand même préciser que Dis-Moi est une organisation apolitique qui ne s’aligne guère sur telle ou telle tendance politique. Effectivement, le peuple Malgache attend de ce nouveau gouvernement un renouveau total au niveau de l’administration surtout, ainsi que la remontée économique entre autres. Au sein de Dis-Moi, nous nous attendions à ce que le gouvernement fasse tout son possible pour que le pays fasse une avancée majeure dans la culture des droits humains parce que c’est la base de tout développement. Qu’il donne les moyens nécessaires à tous les acteurs locaux et nationaux. Dis-Moi Madagascar est prêt, en tout cas, à collaborer avec tous les partenaires qui aspirent aux mêmes valeurs.

En tant que jeune, quels  sont selon vous les principaux fléaux de Madagascar?
La citoyenne que je suis déplore gravement le taux prévalent de corruption à tous les niveaux de l’appareil de l’État. Ce n’est pas un secret que ceci est la cause principale de la légendaire lenteur administrative qui nous vaut le surnom péjoratif de «pays du moramora». Il y a aussi la culture de l’impunité pour des hautes personnalités qui reste selon moi inacceptable car dans une démocratie réelle, la justice est pour tous.

Vous êtes la responsable de la Commission des droits des personnes âgées pour Dis-Moi  Madagascar. Quelle est la situation des personnes âgées à Madagascar?
La situation des gens du troisième âge est paradoxale malgré la culture malgache qui prône le respect des aînés. C’est le contraire qui prévaut dans la vie de tous les jours. La société actuelle exclut les seniors sous toutes les formes : ils sont constamment victimes de violence passive et active, moralement et psychologiquement ; ils sont traités comme des objets et justement c’est sous cet angle-là que nous voulons frapper fort pour la restitution de leurs droits. Après des recherches sur la situation des personnes âgées par les membres de la Commission, nous sommes allés visiter l’ONG « Madagascar Alzheimer » et avons pu nous entretenir avec la présidente et la vice-présidente du centre d’accueil pour seniors et malades d’Alzheimer. Nous avons également participé aux ateliers d’animation avec les membres bénéficiaires.

Dans un premier temps, notre but, c’est de restaurer leurs droits bafoués à travers le projet « KARATRA MAINTSO » (cartes vertes) instauré initialement par l’OMA (qui nous a passé le relais).  Grâce à ce projet, des gens du troisième âge bénéficient de soins sanitaires de base et de transports communs gratuits. Par la suite,  des séances de sensibilisation et une conférence débat seront organisées dans les écoles, dans les fokontany et différentes entités pour un éveil de conscience profond. « Vieillir est un privilège et non un fardeau », telle est notre devise.

La citoyenne que je suis déplore gravement le taux prévalent de corruption à tous les niveaux de l’appareil de l’État»

Parlez nous de Dis-Moi  Madagascar et de vos activités présentes et passées.
A son actif, Dis-Moi Madagascar a organisé un séminaire dont le thème est « Les droits humains pour tous » en mars 2019, ainsi qu’un team building pour le renforcement des liens entre les membres, de la cohésion, et surtout des formations de haut niveau dispensées par des spécialistes du développement personnel, du leadership en juin 2019. 

La Commission des droits de la femme a lancé un débat sur le harcèlement de rue, suivi de cours de self-defense. Quant à notre Commission des droits de l’environnement, elle est active et nous avons déjà participé aux différentes activités organisées au niveau national par la société civile ou autres organisations qui œuvrent pour l’environnement. Il est bon de savoir aussi que Dis-moi Madagascar est membre du Réseau Climat Océan Indien.

En outre, nous projetons d’organiser un second séminaire avec le précieux concours de l’OIF (Organisation Internationale de la Francophonie) en décembre prochain, au cours duquel des certificats seront remis aux personnes ayant suivi la formation en ligne sur les droits humains.

Êtes-vous présents à l’université et dans les collèges?
Effectivement, c’est le projet majeur de Dis-Moi pour une éducation citoyenne permanente, vers un changement de mentalité et de comportement et une meilleure culture des droits humains à tous les niveaux. 

Le mot de la fin
Je suis très honorée de pouvoir travailler avec des gens de différents horizons, apprendre à vivre dans la diversité et la tolérance, des qualités humaines que j’estime indispensables pour un monde meilleur, et pour l’équilibre de soi. Vive les droits humains, la fraternité entre les peuples du monde et de l’océan Indien.


L’Équipe DIS-MOI Madagascar 

dis moi

DIS-MOI Madagascar a pris naissance en avril 2019 après le séminaire organisé par le Secrétariat régional à Antananarivo. Dirigé par Rado Rakotosamimanana, jeune homme brillant de 32 ans et Landy Rafalimanana, jeune présidente de 26 ans  de l’organisation des droits humains, elle a comme objectif premier de se forger une identité au sein de la société civile Malgache. Cela prendra du temps mais la passion, la conviction et le militantisme de ces jeunes gens (encadrés par Ny Onja et Holy, Malgaches résidant à Maurice depuis plus de 10 ans et membres actifs de Dis-Moi) sauront faire fleurir l’organisation et la placer au centre de la question des droits humains à Madagascar. Dans un premier temps, les Commissions Droits Personnes Agées, Droits Environnementaux, Droits Femmes/Enfants ont été mises en place mais, au fur et à mesure que Dis-Moi Madagascar se développe, d’autres questions cruciales des droits humains à l’instar des droits des travailleurs migrants, ou des droits des personnes à handicap, entre autres, seront créées.


Dis-Moi Mada était présente lors de la marche pour la terre

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Le 30 mars dernier, plus de 5000 personnes appartenant à différentes associations et ONG ont répondu présentes au grand événement mondial « Une heure pour la terre », initié par la WWF Madagascar. Ce grand rassemblement a démontré que les jeunes malgaches se sentent de plus en plus impliqués dans la préservation de l’environnement. Pour la petite histoire, « EarthHour » ou « Une heure pour la Terre » est un événement qui a vu le jour à Sydney en Australie en 2007. Aujourd’hui, c’est devenu le plus grand mouvement populaire environnemental au monde. La grande île a rejoint cette grande mobilisation en 2010 et a tenu sa première édition en 2011. 

Une marche placée sous le sceau de la bonne humeur 

Dis-Moi Madagascar était également présente ce samedi 30 mars pour « Une heure pour la terre » qui était incontestablement la plus grande mobilisation citoyenne pour l’environnement de ce début d’année. Membres d’ONG ou d’associations et simples citoyens ont décidé de frapper fort en chantant et en criant haut et fort leur solidarité au nom de la lutte contre le réchauffement climatique. T-shirts personnalisés, banderoles, sifflets, costumes… tout le monde a mis le paquet pour marquer le coup. 

La marche qui a commencé devant le stade municipal de Mahamasina s’est terminée dans l’enceinte de l’hôtel de Ville Analakely. Les organisateurs ont prévu une séance de Zumba, quelques speechs, une démonstration de slam et un mini-concert d’un artiste bien connu des jeunes afin d’animer la foule. Avec une telle ambiance, une chose est sûre, personne n’a eu le temps de s’ennuyer. 

La préservation de notre planète n’est plus une problématique réservée aux gouvernements et aux grandes entreprises. Désormais, il est impératif que tout le monde se sente concerné. Afin de léguer un monde encore vivable aux générations futures, nous devons faire tout notre possible pour changer nos mauvaises habitudes et commencer à penser et à agir autrement en faveur de notre planète.

Dis-Moi et protection de l’environnement

Dis-Moi compte bien devenir un acteur majeur dans la lutte contre le changement climatique à Madagascar à travers sa Commission écologie. Différents projets sont déjà en cours de discussion dont le but est de promouvoir la lutte contre la détérioration de l’environnement et de sensibiliser la population sur le rôle de chacun dans la préservation de la nature et surtout de respecter les droits environnementaux. 

Quelques chiffres officiels sur Madagascar d’après les statistiques 2019 

Superficie     :     587 295 / km2
Population     :    26 453 320 habitants

Croissante 

démographique     :    3,01% / an
Densité     :    45,04 habitants / km2
Esperance de vie     :     65,93 ans (2016)
Taux de natalité     :    32,1 / 1 000 hab (2016 estimation)
Taux de fécondité     :    4,36 enfants / femme
Taux de mortalité     :     6,7 / 1 000 hab (2016 estimation)
Taux d’alphabétisation     :     64,66% (2015)

Interview réalisée par Jenifa Lindor

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