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Meurtre d’Ayaan, 2 ans : un possible trafic de cadavres non-autopsiés intrigue la Santé

Elle aurait fait tout ce qu’il ne fallait pas faire.
  • Les actes de décès émis par le Dr Soobhug seront passés au peigne fin

Les tribulations de la doctoresse Nesha Soobhug et du caporal Moontaj Ally Emmamboccus ne font que de commencer. C’est le moins que l’on puisse dire. Car en sus de l’enquête policière, le ministère de la Santé compte initier des enquêtes internes pour faire la lumière sur des soupçons d’un trafic d’actes de décès douteux et de cadavres qui quittent la morgue sans autopsie.

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« No stone left unturned. » C’est le mot d’ordre au ministère de la Santé concernant le cas d’Ayaan. Le cadavre de cet enfant de 2 ans - tué par son beau-père -, a quitté la morgue de l’hôpital de Rose-Belle par des moyens illégaux. « Une enquête interne sur la morgue s’avère nécessaire pour situer les manquements. Sur la base des informations disponibles jusqu’ici, Dr Nesha Soobhug a fait tout ce qu’il ne fallait pas faire », laisse entendre un haut fonctionnaire ayant une longue carrière à la Santé. 

Primo, aucun médecin du privé n’est tenu de se rendre dans un établissement de santé publique pour délivrer un acte de décès. « With a little common sense, elle doit avoir suspecté qu’il y avait anguille sous roche. Cette pratique ne relève pas de notre ressort », fait ressortir l’intervenant. 

Secundo, tout laisse croire qu’elle n’avait pas examiné le cadavre pour la simple et bonne raison qu’il y avait des ecchymoses sur le visage du bébé.
Tertio, la somme qu’elle avait empochée est considérée comme étant non seulement exagérée mais plutôt suspicieuse. Selon nos recoupements auprès d’une dizaine de médecins généralistes du privé avec plus de 15 ans d’expérience, les ‘fees’ pour un acte de décès ne dépassent pas Rs 500. Un surplus pour le transport est réclamé, dépendant du trajet. « Dès que le chiffre de Rs 2 500 est apparu dans la presse, plus d’un ont été offusqués. Ça sentait la magouille », déclare l’un d’eux.

Pour ces trois raisons, le ministère de la Santé n’a d’autres choix que de faire un audit des actes de décès que la jeune doctoresse a émis depuis qu’elle exerce à Maurice. C’est une tâche considérée comme faisable, car tout est enregistré à l’état civil. 

Selon nos recoupements, la Santé compte également faire la lumière sur les failles du système à la morgue que le supposé axe Soobhug / Emmamboccus aurait exploité. Le caporal Moontaj Ally Emmamboccus est soupçonné d’avoir autorisé la Dr Nesha Soobhig à avoir accès au cadavre du petit Ayaan, permettant ainsi à la mère du petit et à son compagnon d’obtenir un faux certificat de décès. 

Au ministère de la Santé, on n’arrive toujours pas à comprendre comment le caporal Emmamboccus a pu laisser les proches quitter l’hôpital avec un cadavre qui aurait dû être autopsié. Cela d’autant plus que le médecin de service à l’hôpital de Rose-Belle avait référé ce cas au médecin légiste pour un examen approfondi. « Ce qui nous intrigue le plus, c’est qu’il a contacté un médecin du privé pour court-circuiter les procédures (…) Ce n’est pas normal. Il y a quelque chose qui cloche », déplore un haut fonctionnaire avant de se demander : « Combien de cadavres de victimes de ‘foul play’ ont quitté nos morgues illégalement ? »

Du coup, à la Major Crimes Investigation Team (MCIT), on n’écarte pas la possibilité de faire une demande en Cour suprême pour avoir accès aux appels téléphoniques entre ces deux protagonistes. « Un tel exercice pourrait s’avérer être une boîte de Pandore au cas où il y aurait une complicité entre eux dans le temps », nous dit un enquêteur.

Les conclusions de cette enquête interne de la Santé, nous dit-on, va permettre de resserrer les vis dans les établissements de santé publique afin qu’une telle chose ne se répète pas.

Dr Shyam Purmessur, président du Medical Council : «Un médecin du privé ne peut exercer à l’hôpital public»

Les procédures de certification d’un décès dans un hôpital public sont clairement définies par le ministère de la Santé. Un médecin du privé a certifié le décès du petit Ayaan Ramdoo, alors que la dépouille était sous la responsabilité de l’hôpital Jawaharlal Nehru. Pour les spécialistes du sujet, « un médecin du privé n’a pas le droit d’exercer dans l’enceinte d’un hôpital public, même pas pour ausculter un de ses clients qui s’y trouve », dit le Dr Shyam Purmessur. Le président du Medical Council est on ne peut plus clair à ce sujet. Un médecin du privé ne peut ausculter un patient dans un hôpital public, encore moins délivrer un certificat de décès ou examiner un cadavre. 


Cas de figure 1 

Mort d’un patient admis à l’hôpital

Le médecin résident, qui se trouve sur place, devra examiner le cadavre pour déterminer la cause du décès. Sa conclusion sera comparée au dossier médical du patient avant d’émettre un certificat de décès. 

Cas de figure 2 

Mort d’un patient qui arrive aux Urgences

Si la personne était malade à son arrivée, le médecin sur place devra enquêter sur ses antécédents médicaux. S’il suivait un traitement dans un hôpital public, le médecin devra consulter son dossier et déterminer si elle est morte des suites des complications liées à sa maladie. Si la personne était blessée à son arrivée, l’affaire sera référée au Police Medical Officer, pour une autopsie. C’est le médecin légiste qui certifie le décès et donne le feu vert à la famille pour récupérer la dépouille.  

Cas de figure 3

Un Brought-In Dead (BID)

Si un cadavre est transporté à l’hôpital, il sera examiné. La cause apparente du décès sera comparée au dossier médical, surtout si le défunt suivait un traitement. Au cas contraire, l’affaire est référée au médecin légiste qui émettra un certificat de décès après avoir pratiqué une autopsie. 

Cas de figure 4

Une personne qui décède à la maison ou dans une clinique privée

Dans ce cas, un médecin du privé peut délivrer le certificat si le décès est lié à la maladie dont souffrait le défunt. Dans la majeure partie des cas, c’est le médecin de la famille ou le médecin traitant qui vient certifier le décès. S’il y a un doute sur la cause du décès, l’affaire doit être référée à la police à travers l’Information Room. Une patrouille viendra, alors, récupérer le cadavre pour une autopsie. D’ailleurs, la section 42 du Code of Practice des médecins élabore sur l’octroi d’un certificat de décès et les conditions qui y sont rattachées. 

Une fois le certificat de décès obtenu

La famille doit se rendre au bureau de l’état civil pour déclarer le décès. Le service sanitaire du ministère de la Santé doit ensuite donner le feu vert pour la crémation ou l’inhumation. Les deux entités se basent sur le certificat de décès. 

Lorsqu’un cas est référé au Police Medical Officer

Un sergent de police comptant plusieurs années de service explique qu’il y a une procédure précise à suivre lorsque qu’un médecin réfère une affaire au médecin légiste. Le Permanent Mortuary Attendant est appelé de même que le policier en faction à l’hôpital. En attendant l’arrivée des deux fonctionnaires, le médecin, qui a constaté le décès, doit rester sur place et la famille doit rester à l’écart. 

Une fois que la dépouille a été placée à la morgue et que celle-ci ait été fermée à clé en attendant l’autopsie, un policier est placé en sentinelle devant la morgue pour que personne n’y accède. « La dépouille doit être escortée jusqu’à la morgue par un policier et son chef de service doit être informé d’un cas de mort suspecte », affirme le sergent.

 

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