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Le transfert des terres de l’État : des procédures davantage verrouillées 

Il est devenu plus compliqué de transférer un bail en vendant les actions d’une compagnie qui en est la propriétaire, en raison d’une clause comprise dans le contrat. Désormais, le gouvernement doit donner son aval. Ce qui, en théorie, rend la spéculation sur les terres de l’État plus compliquée. À moins d’avoir des connexions politiques qui aident à contourner ces procédures.

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L’astuce est bien connue dans le giron politique : obtenez un bail sur un terrain de l’État sur le nom d’une compagnie, puis transférez les actions vers une tierce partie contre une somme juteuse pour vous remplir les poches. Une astuce qui permettait de contourner l’interdiction de faire changer le bail de mains dans les termes du contrat signé avec l’État. Sauf que, désormais, il est bien plus difficile de faire de la spéculation sur les terres de l’État. Du moins, en théorie. Il faut une autorisation signée de l’autorité responsable, à savoir le ministère du Logement et des Terres, pour un transfert substantiel des actions.

L’ancien Senior Adviser au ministère de tutelle, Robin Appaya, explique qu’aucun texte de loi ne régule les conditions dans lesquelles les terres de l’État sont cédées à bail. Le contrat de bail est le seul cadre légal qui existe. 

« Dans le passé, des personnes ont usé de ce stratagème pour vendre des terres aux étrangers notamment, explique le légiste, par la suite, le gouvernement a commencé à insérer une clause dans les contrats, obligeant les bénéficiaires à obtenir l’autorisation du ministère de tutelle au préalable. »

Dans un premier temps, tout changement d’actions dépassant 49 % devait obtenir l’aval du ministère. Cette limite est passée à 30 % aujourd’hui. En-deçà de cette limite, le propriétaire du bail se doit tout de même d’informer les autorités des changements d’actionnariat, même s’il n’a pas besoin de leur autorisation. 

Sauf que cette mesure ne suffisait pas non plus. Il existe trois étapes pour l’obtention d’un bail : l’obtention d’une lettre de réservation, suivie de la lettre d’intention avant d’aboutir au bail en soi. Or, la clause interdisant les transferts se trouvait uniquement dans le contrat de bail. « Certains transféraient les actions dès l’étape de la lettre d’intention », explique Robin Appaya. Une autre lacune qu’il a fallu combler. 

Depuis 2016, la clause en question se trouve déjà dans la lettre de réservation. « Ce n’est qu’un an après que le projet qui devait être développé sur les terres concernées ait été complété que les actions peuvent être vendues », explique l’homme de loi. Qu’en est-il des compagnies qui changent de propriétaires pour des raisons légitimes ? Ici encore, il faut l’autorisation du ministère.

L’avoué Anwar Abbasakoor explique qu’effectivement depuis au moins une dizaine d’années, la clause interdisant de transférer des actions est comprise dans les contrats standard d’obtention de baux. « Cette clause indique que, s’il y a un changement dans l’actionnariat qui affecte la direction de la compagnie, il faut l’autorisation du ministère concerné », confirme-t-il. 

La clause en question se lit comme suit : « In case of change of ownership or transfer of shares in the company which would impact on the control of the company and any change in the purpose of the lease, the agreement would be automatically cancelled if the prior consent of the lessor is not obtained in writing. » 

L’avocat Neil Pillay estime cependant qu’il faut se montrer prudent dans la manière dont on s’attaque aux abus faits dans le passé. « Il n’y a pas de solution tranchante sur ce genre de question, explique l’homme de loi, il faut faire très attention à ne pas porter atteinte au droit à la propriété, garanti par la Constitution. » L’avocat est toutefois d’accord pour que les autorités aient un droit de regard sur le transfert des actions des compagnies qui ont des baux. Il rappelle d’ailleurs qu’une personne a tout à fait le droit de vendre sa compagnie si elle le souhaite. 

Qu’en est-il des liens des institutions financières sur les terres concernées ? Anwar Abbasakoor explique que cela requiert également l’aval du ministère : « C’est une pratique courante. Généralement, les personnes qui obtiennent des baux ont un projet de bungalow ou d’hôtel pour lequel il faut trouver un prêt. Les banques demandent à obtenir l’autorisation en écrit du ministère pour cela. »

 

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