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Dr Prithiviputh Rittoo, médecin engagé auprès de l’ONG Hep Support : «L’hépatite C en hausse chez les jeunes»

Une des causes du rajeunissement de l’hépatite C est le partage de seringues lors de l’usage de drogues. Les jeunes ne mesurent pas les conséquences de leur acte par naïveté, déni, ignorance ou méconnaissance des dangers.

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« Une seule piqûre avec une seringue souillée que les jeunes se partagent peut transmettre la maladie, si l’un d’eux est infecté par l’hépatite C », explique le Dr Prithiviputh Rittoo.
Mais cette maladie ne cible pas uniquement les usagers de drogue par voie intraveineuse, fait ressortir le médecin. Nul n’est à l’abri et nombreux sont ceux qui, dans le passé, ont été contaminés sans le savoir et ont porté la maladie sans s’en rendre compte, jusqu’à ce qu’elle se manifeste. Ce qui peut prendre dix à vingt ans dans certains cas.

L’hépatite est une inflammation du foie. C’est une maladie silencieuse qui peut causer une cirrhose et même engendrer un cancer, si elle n’est pas dépistée. Outre le rajeunissement des malades, la maladie est aussi en hausse, indique le Dr Rittoo. Le Health Statistics Report 2016 du ministère de la Santé indique cependant le contraire.

Il y a les cinq types d’hépatites : A, B, C, D et E. Mais ce sont les hépatites B et C qui sont plus communes et dangereuses. L’hépatite se transmet de différentes manières (sang, sperme ou liquide biologique) selon le type, mais en aucun cas en attrapant la main d’une personne infectée. « Il ne faut pas fuir une personne atteinte d’hépatite comme on fuit la peste », souligne le Dr Rittoo.

Les signes de la maladie sont presque les mêmes pour les divers types de virus et c’est le foie qui sera affecté. « Les différents types d’hépatite : A, B, C, D et E se partagent les symptômes à différents degrés », dit-il. Cela peut être une grippe, un état de fatigue plus grand que d’habitude, accompagné d’un manque d’énergie sans cause apparente. La personne infectée peut aussi avoir des douleurs au ventre, la perte d’appétit, la nausée, ainsi que la fièvre et la diarrhée dans certains cas.

« La personne peut avoir également des sautes d’humeur, sans raison apparente, ainsi que des douleurs d’estomac et musculaires et ressentir des démangeaisons sans qu’il n’y ait des séquelles sur la peau », ajoute-t-il. Parmi les autres symptômes significatifs de l’hépatite : une urine de couleur jaune au réveil le matin est une indication que le foie commence à être affecté. La selle sera, quant à elle, décolorée, blanche ou jaune pâle. Un examen des yeux et de la peau peut compléter les premiers constats des signes de la maladie. En cas de présence de l’hépatite, ils seront jaunâtres.

Le Dr Prithiviputh Rittoo.

Le Dr Rittoo précise toutefois que, dans certains cas, les patients ne présentent pas de symptômes, ce qui fait que la maladie peut progresser insidieusement et se manifester uniquement quand elle est à un stade avancé. D’où le fait que l’hépatite est considérée comme une maladie silencieuse. Cela peut alors entraîner une cirrhose et même un cancer.

Avoir une bonne hygiène de vie à travers une alimentation saine et équilibrée et une activité physique régulière permettent de diminuer les risques de complication, selon le médecin.

Les personnes les plus susceptibles d’être infectées par l’hépatite sont les travailleuses du sexe, les usagers de drogue avec des seringues souillées, les personnes qui vivent avec la maladie, car une personne vivant avec l’hépatite B peut être co-infectée par l’hépatite C. Cela peut être un risque pour son partenaire, s’il ne prend pas de précautions, comme l’utilisation de préservatifs.

Il est à noter qu’avec les divers traitements disponibles, il est possible de guérir à 100 % de l’hépatite C. Le traitement ne dure que trois mois, précise le Dr Rittoo. Ceux qui ont l’hépatite B ont des médicaments pour contrôler la maladie et empêcher le foie d’être infecté et éviter les complications de santé.

La Journée mondiale contre l’hépatite a été observée le vendredi 28 juillet.

L’Organisation non gouvernementale (ONG) Hep Support s’occupe de l’encadrement et du soutien des personnes atteintes d’hépatite. L’ONG a un numéro pour une aide en ligne pour toute personne désireuse d’avoir des informations ou un soutien. Il s’agit du 5701 5828. Hep Support est aussi joignable sur le réseau social Facebook. L’organisation aura, dans quelques semaines, un centre où divers services seront proposés. Parmi, des tests de dépistage gratuit de l’hépatite.

Les types d’hépatite

A — L’hépatite A n’est pas tellement répandue. Elle peut être transmise à travers l’eau ou la nourriture contaminée. Elle est aussi due à la mauvaise hygiène, car elle peut être présente dans les selles. Une personne peut alors attraper l’hépatite A si elle ne s’est pas bien lavée les mains. Mais ces cas sont rares à Maurice.

Le signe de la maladie, c’est la jaunisse. Mais une personne peut ne pas présenter de symptômes si ses anticorps arrivent à lutter efficacement contre la maladie.

B — L’hépatite B est très infectieuse. Dans ce cas, la maladie est transmise par le contact avec du sang contaminé, le sperme ou le liquide biologique de la personne infectée. Le fait que la maladie se transmet par le sang, elle touche les usagers de drogues par voie intraveineuse. Mais les professionnels de santé peuvent aussi être touchés s’ils se piquent par inadvertance avec une seringue souillée.

Les signes de l’hépatite B sont un état de fatigue inexpliqué, une perte d’appétit, la jaunisse. Le corps ne peut pas former des anticorps et le malade doit prendre des médicaments.

C - L’hépatite C se transmet uniquement par le sang. Cela peut être lors d’une transfusion sanguine, comme cela a été le cas il y a une vingtaine d’années. Mais ce n’est plus le cas de nos jours, affirme le Dr Rittoo. La contamination peut aussi se faire après un tatouage dans des conditions peu hygiéniques et où les aiguilles n’ont pas été stérilisées convenablement. D’où la recommandation que les aiguilles doivent être à usage unique. Il est possible d’être infecté par l’hépatite C lors d’un rapport sexuel par voie anale.

Pour ceux qui ont l’hépatite B ou C, il est recommandé de ne pas partager de brosse à dents et de rasoir, car si la personne s’est blessée, la maladie peut se transmettre à travers le sang contaminé. Les usagers de drogues ne doivent pas se partager leurs seringues. Ils ne doivent pas avoir de relations sexuelles non protégées avec différents partenaires, car ils vont propager la maladie. Une personne non infectée est à risque également si elle ne se protège pas.

L’hépatite peut aussi se transmettre dans de rares cas de la mère à l’enfant lors de l’accouchement. Le vaccin contre l’hépatite est désormais disponible gratuitement et tous ceux qui le désirent peuvent se faire immuniser.

Une personne atteinte de l’hépatite B est susceptible d’avoir l’hépatite C, car elle est déjà fragilisée. Il y a le risque également de co-infection chez les personnes vivant avec le VIH/Sida.
Les hépatites D et E sont extrêmement rares.

S’informer sur l’hépatite

Le premier rapport mondial sur l’hépatite, produit par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 2017, indique que 325 millions de personnes vivaient avec une infection chronique causée par les hépatites B ou C à fin 2015.

Près de 70 millions d’entre elles se trouvaient dans la région africaine. C’est le tableau que brosse le Dr Laurent Musango, représentant de l’OMS à Maurice, concernant l’hépatite.

Selon les estimations, la maladie a causé plus de 136 000 décès rien qu’en Afrique en 2015. Le rapport de 2017 montre aussi que 9 % seulement des personnes ayant une infection due au virus de l’hépatite B et 20 % de celles touchées par celui de l’hépatite C ont été testés et diagnostiqués. Parmi les personnes diagnostiquées pour l’hépatite B, 8 % étaient sous traitement, alors que 7 % l’étaient pour l’hépatite C en 2015.

L’hépatite virale est un problème de santé publique majeure à l’échelle mondiale qui nécessite des réponses urgentes, estime le Dr Musango. Parmi les mesures il y a :

  • la vaccination des nourrissons contre l’hépatite B, afin de réduire l’incidence de nouvelles infections chroniques par ce virus ;
  • la prévention de la transmission mère-enfant de l’hépatite B, qui inclut la vaccination par l’administration de la dose à la naissance ;
  • la sécurité de l’approvision-nement en sang ;
  • l’amélioration de la sécurité des injections dans les établissements de santé ;
  • l’introduction de services complets de réduction des risques pour prévenir la transmission des hépatites B et C parmi les usagers de drogues injectables ; et
  • le traitement des hépatites B et C. 

Il ajoute que le Programme de développement durable à l’horizon 2030 demande à la communauté internationale de combattre l’hépatite et d’adopter des approches inclusives favorisant l’équité et la couverture sanitaire universelle. Cela afin que personne ne soit laissé pour compte. En mai 2016, l’OMS a présenté à l’Assemblée mondiale de la santé la première stratégie mondiale du secteur de la santé contre l’hépatite virale, centrée sur l’élimination.

Dr Laurent Musango

Le Dr Musango précise aussi que les états membres de la région africaine ont adopté un cadre d’action (2016-2020) pour aider les pays à mettre en œuvre la stratégie mondiale. Les pays sont appelés à renforcer leurs programmes nationaux en y introduisant des services de lutte contre l’hépatite au moyen d’une approche de santé publique pour que tout un chacun en bénéficie, et de développer rapidement les services de dépistage et de traitement. L’éducation reste la clé principale. 

« La population doit s’informer sur l’hépatite virale, recourir au dépistage et se faire soigner le cas échéant », souligne le représentant de l’OMS à Maurice. Pour lui, la société civile et le secteur privé doivent être parties prenantes en sensibilisant l’opinion publique, en plaidant en faveur d’investissements suffisants et en œuvrant avec les états membres pour la réalisation des principales interventions de prévention et de traitement. 

Il soutient également que la plupart des personnes atteintes d’hépatite virale chronique ne sont pas au courant de leur statut sérologique, et très peu de gens accèdent aux services de dépistage et de traitement dans la région africaine. « L’objectif d’éliminer l’hépatite virale d’ici 2030 ne se réalisera que par cette mouvance collective », indique le Dr Musango.

 

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