
En vue des assises du travail et de l’emploi, annoncées par le ministère en septembre, un comité interministériel, présidé par Reza Uteem, a été mis en place pour repenser le système de permis de travail à Maurice. Voici les points forts d’un rapport qui pourrait redessiner le monde du travail.
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Il y a 45 300 travailleurs étrangers à Maurice, selon les données du ministère du Travail. Ils jouent un rôle central dans l’économie, principalement dans les secteurs du textile, de la construction, du tourisme et de la boulangerie, et viennent surtout d’Inde, du Népal, du Bangladesh et de Madagascar.
Cette dépendance croissante sur la main-d’œuvre étrangère s’explique par plusieurs facteurs. Il y a le taux de natalité en baisse, le vieillissement de la population, mais aussi le désintérêt des jeunes Mauriciens pour certains métiers jugés pénibles ou peu valorisants. Les entreprises locales, confrontées à une pénurie de main-d’œuvre, se tournent donc de plus en plus vers le recrutement d’étrangers.
Mais cette réalité pose de nombreux défis : comment garantir un système de permis de travail efficace, transparent et équitable, qui permette de répondre aux besoins des employeurs sans porter préjudice aux travailleurs locaux ? C’est à cette question que le comité interministériel sur les permis de travail, mis en place en janvier 2025, a tenté d’apporter des réponses.
Système complexe
Le rapport du comité interministériel dresse un constat clair : le système actuel de recrutement de main-d’œuvre étrangère est lent, complexe et parfois injuste. Les procédures administratives sont particulièrement lourdes. La Permission in Principle (PIP), le document que les employeurs doivent obtenir avant de déposer une demande de permis est un exemple parmi tant d’autres pour illustrer la lourdeur administrative qui retarde l’embauche.
Inégalités
Le rapport souligne également des disparités importantes. Selon le comité interministériel, le système de quotas favorise les grandes entreprises disposant d’un nombre suffisant d’employés locaux, tandis que les PME peinent à satisfaire les ratios imposés, malgré les mêmes difficultés de recrutement. De plus, bien que la loi prévoie l’égalité de traitement entre travailleurs locaux et étrangers, des écarts subsistent dans la pratique concernant les congés, les indemnités et les primes.
D’autre part, des milliers de migrants se trouvent en situation irrégulière et sont parfois exploités par des employeurs peu scrupuleux, avec confiscation de passeports dans certains cas. Le rapport pointe aussi un manque de coordination entre les organismes concernés : les ministères, l’Economic Development Board et le Passport and Immigration Office, entre autres. Ce qui est souvent la cause de lenteur et d’incohérences. Ces problématiques mettent en lumière un double impératif : il est plus qu’important de fluidifier les recrutements pour soutenir l’économie tout en protégeant les droits fondamentaux des travailleurs migrants.
Transparence
Pour répondre à ces enjeux, le comité interministériel formule une série de recommandations qui s’articulent autour de quatre grands axes. Premièrement, selon le rapport, les agences de recrutement devront désormais respecter des critères stricts : une preuve de solidité financière, un casier judiciaire vierge et une connaissance des lois mauriciennes. Le dépôt de garantie exigé passera de Rs 500 000 à Rs 1 million afin de couvrir d’éventuels frais de rapatriement.
Le gouvernement souhaite renforcer la coopération internationale par la signature d’un protocole d’accord (Memorandum of Understanding) avec les pays fournisseurs de main-d’œuvre. C’est dans le but d’instaurer un cadre transparent et éthique empêchant le paiement de frais de recrutement illégaux. Dans le cas du Bangladesh, très sollicité dans certains secteurs, le rapport recommande une levée progressive des restrictions.
Procédures
Une des propositions phares est la suppression du système PIP, considéré comme superflu. Les employeurs pourront désormais soumettre directement leurs demandes de permis, réduisant ainsi les délais de traitement. La durée maximale de séjour des travailleurs étrangers sera de dix ans, quel que soit le secteur.
Sur le plan technologique, le rapport met en avant le National E-Licensing System, qui deviendra la plateforme unique pour toutes les demandes. Les permis seront délivrés sous forme de cartes avec QR code, permettant de vérifier en temps réel la situation d’un travailleur. L’intégration de l’intelligence artificielle permettra également de montrer que les employeurs ont tenté de recruter localement avant de recourir à la main-d’œuvre étrangère.
Conditions de travail
Le comité insiste sur le respect de la dignité humaine en recommandant l’interdiction pour les employeurs de conserver les passeports. L’alignement des avantages comme les congés, les indemnités et les primes entre les travailleurs locaux et étrangers est préconisé. Un migrant qui fait l’expérience d’abus pourra être transféré vers un autre employeur.
De plus, un fonds de bien-être des travailleurs migrants sera alimenté par une contribution annuelle de Rs 500 roupies par employé, versée par les entreprises, afin de couvrir notamment les frais juridiques en cas de litige avec un employeur.
Le comité interministériel recommande des sanctions plus sévères contre les employeurs embauchant sans permis, incluant des amendes fixes pour éviter de longs procès. Une amnistie limitée pourrait être accordée aux travailleurs illégaux, leur permettant de rentrer dans leur pays d’origine sans pénalités. Un meilleur suivi des étudiants étrangers détenteurs de visa touristique est préconisé, afin d’éviter que ces catégories servent de couverture à un emploi dissimulé.
Dépendance sur les travailleurs étrangers
À Maurice, la main-d’œuvre étrangère représente un pilier essentiel de l’économie avec 45 300 travailleurs présents sur l’île. La répartition par sexe montre une nette prédominance masculine : 89 % d’hommes contre 11 % de femmes.
Ces travailleurs viennent principalement de l’Inde (37 %), du Népal (21 %), du Bangladesh (20 %) et de Madagascar (17 %). Ils sont majoritairement actifs dans des secteurs essentiels comme le textile, la construction, le tourisme et la boulangerie, où la demande de main-d’œuvre étrangère reste particulièrement forte.
Mesures phares pour un système de travail plus transparent
Le rapport du comité interministériel propose plusieurs mesures clés pour améliorer le recrutement et les conditions de travail des migrants à Maurice :
- Suppression du système Permission in Principle, afin de simplifier les démarches pour les employeurs.
- Carte de permis de travail avec QR code, permettant de vérifier en temps réel la situation des travailleurs.
- Fonds de bien-être des travailleurs migrants, financé par une contribution annuelle de Rs 500 par employé pour couvrir les frais juridiques en cas de litige.
- Sanctions renforcées contre les employeurs embauchant illégalement des travailleurs étrangers.
- Possibilité d’amnistie limitée pour les travailleurs migrants en situation irrégulière, leur permettant de régulariser leur situation ou de retourner dans leur pays d’origine sans pénalité.

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