Le Conseil des ministres approuve l’usage temporaire de contenants plastiques non biodégradables dès janvier 2026, provoquant l’indignation des écologistes qui dénoncent cette marche arrière.
Le Conseil des ministres a approuvé, le vendredi 28 novembre, l’utilisation de gobelets, de bols et de barquettes à usage unique non biodégradables pour l’emballage local des produits alimentaires. Cette autorisation, accordée sous conditions à partir du 15 janvier 2026 pour une durée d’un an, suscite la surprise et l’indignation. Le ministère avait organisé il y a quelques semaines un atelier de validation consacré au National Strategy Plan. Ce projet, intitulé « Development of a Roadmap for a Plastic Pollution-Free Mauritius », vise à doter Maurice d’un cadre national pour lutter contre la pollution plastique et marine. Elle compte aussi renforcer les mécanismes politiques et juridiques et développer un inventaire des sources de production et d’usage du plastique.
Usage unique « J’accueille cette décision avec beaucoup d’amertume. Je pensais que nous allions progresser sur le plastique à usage unique avec les Environment (Control of Single Use Plastic Products) Regulations 2020. Mais malheureusement ce gouvernement est en train de faire tout à fait le contraire », avance Sunil Dowarkasing, consultant en développement durable. Très déçu, il évoque que le pays a vécu sans plastique durant ces dernières années. « Pourquoi les réintroduire aujourd’hui dans le système ? »
Le consultant se demande si le gouvernement ne subit pas une pression du secteur privé ou d’autres lobbyistes. Pour lui, cette décision constitue un grand recul par rapport à l’interdiction du plastique non biodégradable adoptée en 2020. Contrairement à ceux qui affirment qu’il n’existe pas d’alternative, Dowarkasing assure que les pays qui ont banni le plastique ont trouvé des solutions. Bernard Cayeux, membre de MRU25, estime que le gouvernement est « chef du changement, mais en décalé ». Malgré ses bonnes intentions, il prolonge d’anciennes volontés d’une année à l’autre. Selon lui, le gouvernement doit avoir ses raisons, qui n’ont pas encore été expliquées. « On cause beaucoup, mais il n’y a pas beaucoup d’actions pour l’heure et il n’y a pas beaucoup de changement par rapport à ce qui avait été dit », fait-il ressortir.
Sollicitée pour commenter la décision, la Junior Minister Joanna Bérenger a indiqué qu’un communiqué sera émis. Entretemps, les discussions s’animent sur la toile. Selon une source, cette décision ne découle pas de lobby, mais d’un manque d’alternatives pour l’emballage de certains produits et de préoccupations liées à la sécurité alimentaire. Certains aliments se conserveraient mieux dans du plastique que dans d’autres contenants à durée plus limitée. Les producteurs locaux n’auraient pas les moyens d’investir dans d’autres équipements et emballages. Il serait question d’une utilisation contrôlée du plastique non biodégradable par système de permis jusqu’à ce que des alternatives soient trouvées. Les écologistes ne comptent pas rester inactifs. Sunil Dowarkasing prévoit d’alerter dès lundi les organisations internationales pour dénoncer cette posture mauricienne. Pour lui, cette décision « déplorable » est venue « comme un cheveu sur la soupe » sans note explicative. « Je ne comprends pas la nécessité d’enlever l’interdiction d’utiliser ces produits, d’autant plus qu’il y a un mois des discussions ont eu lieu en vue d’élaborer une feuille de route pour une île Maurice sans pollution plastique », dit-il.
Suttyhudeo Tengur, président de l’Association pour la protection de l’environnement et des consommateurs, affirme que si une décision a été prise pour respecter et protéger l’environnement, il est dans l’intérêt de Maurice et de la planète de la maintenir.
Le président de l’Apec accueille très mal cette décision qu’il qualifie de recul. « Nos engagements en faveur de l’environnement vont régresser au lieu d’avancer », souligne-t-il. Il déplore que ceux qui ont approuvé cette mesure temporaire n’aient aucun « committement » vis-à-vis de la planète. « Les personnes qui ont pris cette décision sont en train de faire marche arrière par rapport aux décisions prises pour protéger l’environnement », conclut-il.
Discours et décisions : la contradiction du gouvernement
Au cours de l’atelier de validation consacré au National Strategy Plan dans le cadre du projet « Development of a Roadmap for a Plastic Pollution-Free Mauritius », le ministre de l’Environnement Rajesh Bhagwan a fait ressortir l’urgence de lutter contre la pollution plastique. Selon lui, c’est un « défi environnemental et sanitaire ». Il avait aussi rappelé que le plastique a infiltré tous les aspects de la vie quotidienne - terres, rivières, océans et chaînes alimentaires. Il a insisté sur la nécessité pour chacun : particuliers, entreprises et organismes, de réduire la consommation du plastique. Le ministre avait même affirmé qu’un changement durable ne peut reposer uniquement sur la législation : il doit aussi découler de la responsabilité individuelle et d’une prise de conscience collective.La décision prise par le Conseil des ministres le vendredi 28 novembre semble donc être en totale contradiction avec ce que souhaite entreprendre le ministère de l’Environnement. D’autant plus que le ministre de tutelle a avancé que la feuille de route ne doit pas rester un document théorique, mais devenir « un plan concret et réaliste pour orienter Maurice vers un avenir plus propre, plus sain et plus durable ». Selon lui, le pays peut encore inverser les effets de la pollution plastique et protéger les générations futures. La Junior Minister Joanna Bérenger avait, elle, rappelé que les petits États insulaires en développement, comme Maurice, figurent parmi les plus touchés par la pollution par le plastique, même s’ils ne sont pas de grands producteurs de déchets plastiques. Elle avait mis en avant le rôle actif de Maurice dans les négociations internationales au sein de l’Alliance of Small Island States et de la High Ambition Coalition to End Plastic Pollution. C’est pour l’élimination progressive des plastiques problématiques et l’amélioration de la conception des produits.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !

