L’intelligence artificielle s’impose graduellement dans tous les secteurs à travers le monde, et Maurice ne fait pas exception. Derrière cette technologie souvent perçue comme accessible se cache pourtant une grande complexité que chercheurs et experts tentent encore de percer. C’est dans cette optique que le Dr Heman Mohabeer publie « AI Without Illusions ». L’ouvrage vise à mieux faire comprendre les multiples facettes de l’IA. Le livre est déjà disponible en ligne.
« AI Without Illusions » est un livre du Dr Heman Mohabeer, AI Resilience Strategist, fondateur et directeur de Intelligent Africa Solutions Ltd. Le livre est disponible sur Amazon, Kindle eBook, ainsi qu’en version papier. Cet ouvrage de réflexion stratégique est écrit pour durer et susciter un débat informé autour de la place réelle de l’IA (intelligence artificielle) dans la société.
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Dr Heman Mohabeer explique que l’idée de « AI Without Illusions » est née d’un constat clair : le discours mondial sur l’intelligence artificielle est dominé par le marketing, la peur et des affirmations souvent déconnectées de la réalité.
« Certains y voient une menace pour l’humanité ; d’autres un outil quasi magique. J’ai voulu écrire un livre honnête, lucide, sans emphase. Un ouvrage qui ramène la discussion à l’essentiel : l’IA est une infrastructure, pas une fiction. Elle doit être comprise, gouvernée et adaptée à nos contextes économiques et culturels », dit-il. « AI Without Illusions » vise à redonner une lecture rationnelle de cette technologie pour en faire un levier de progrès, pas de dépendance.
Il fait ressortir que le livre démonte trois illusions. « Il y a d’abord l’illusion de l’AGI (Artificial General Intelligence), c’est-à-dire croire qu’une intelligence générale est imminente alors que nous travaillons encore avec des systèmes étroits, dépendants des données et du contexte », avance notre interlocuteur. En deuxième lieu, il existe l’illusion du « toujours plus grand » - penser que multiplier les paramètres suffit à créer de l’intelligence ; en réalité, cela augmente la fragilité et les coûts.
Ensuite, il y a l’illusion de la préparation mondiale : supposer que tous les pays sont prêts pour l’IA, alors que beaucoup n’ont ni l’infrastructure ni la gouvernance nécessaires. « L’objectif est simple : replacer l’IA dans une logique de résilience, d’efficacité et de souveraineté. C’est un appel à concevoir des modèles utiles, traçables et économiquement viables, plutôt qu’à courir derrière la taille ou le prestige », soutient l’auteur.
« AI Without Illusions » a nécessité près d’un an de travail, mais appuyé sur plus de dix années d’expérience. « L’écriture a été progressive, entre projets, recherches et missions pour la Commission de l’Union Africaine. Chaque chapitre est issu d’observations concrètes : la fragilité des modèles géants, l’absence de souveraineté numérique, la difficulté pour les décideurs de relier innovation et réalité opérationnelle. Le livre m’a permis de synthétiser tout cela dans une approche claire : passer du discours à la méthode », partage-t-il.
D’ailleurs, Dr Heman Mohabeer travaille depuis plus d’une décennie à la croisée de la technologie, de la stratégie et de la gouvernance. Il a accompagné plusieurs institutions, dont la Commission de l’Union africaine, dans leurs démarches d’intégration de l’IA et de transformation numérique. En 2023, son partenaire et lui ont fondé Intelligent Africa Solutions Ltd pour développer des solutions d’IA adaptées aux besoins des organisations africaines et mauriciennes.
Il est également l’inventeur du EvoTransformer, une architecture d’intelligence artificielle auto-évolutive actuellement en instance de brevet (« patent pending »). « Cette technologie explore la capacité d’un modèle à adapter sa propre structure pendant l’apprentissage, afin d’améliorer sa performance sans tout réentraîner. Mon objectif reste le même : faire émerger une intelligence artificielle africaine, responsable et souveraine », dit-il.
Dr Heman Mohabeer est d’avis que l’IA représente l’avenir. Selon lui, celle-ci redéfinit les bases mêmes du fonctionnement des sociétés modernes. L’intelligence artificielle n’est plus un simple outil ; elle devient l’infrastructure silencieuse sur laquelle reposent les économies, l’éducation, la santé, la finance et la gouvernance publiques. « Comme l’électricité ou Internet autrefois, elle façonne la manière dont nous produisons, décidons et interagissons », fait-il ressortir.
Mais l’avenir de l’IA ne se jouera pas entre ceux qui possèdent les modèles les plus vastes, il se jouera entre ceux qui sauront la comprendre et la gouverner. Ce n’est pas une question de puissance brute, mais de maîtrise, d’éthique et de stratégie. Notre interlocuteur ajoute : « C’est ce que je défends : transformer l’IA en un système de résilience et de souveraineté, capable de renforcer nos institutions, d’améliorer la prise de décision et de soutenir la stabilité économique. Si elle est gouvernée avec intelligence, elle deviendra un pilier du développement ; sinon, un facteur de dépendance ».
Pour utiliser judicieusement l’IA, Dr Heman Mohabeer explique que trois leviers sont essentiels. Il est important de former les utilisateurs et les décideurs : une culture numérique claire permet d’éviter les dérives et les malentendus. Ensuite, il recommande de mettre en place une gouvernance éthique : transparence et règles de redevabilité. Puis, il faut renforcer la souveraineté numérique : héberger nos données, encourager la recherche locale et créer des modèles enracinés dans nos langues et nos valeurs. « L’IA doit renforcer la société, pas la fragiliser. Utilisée avec discernement, elle peut devenir un accélérateur d’autonomie et de compétitivité », dit-il.
Il trouve qu’à Maurice, nous avons le talent pour utiliser l’IA. Il suggère toutefois une infrastructure nationale de données et de calcul, pour réduire la dépendance vis-à-vis de serveurs étrangers, des compétences locales avancées, pas seulement dans l’usage d’outils, mais dans la conception, l’audit et la régulation, ainsi qu’une vision de long terme, qui ancre l’IA dans l’intérêt public : éducation, santé, services citoyens, productivité économique. « Avec ces trois leviers, Maurice peut devenir un modèle d’IA résiliente et responsable, adaptée à l’échelle d’un petit État insulaire, mais connectée à la dynamique mondiale », relate-t-il.
Dr Heman Mohabeer conclut que « l’important n’est pas une IA plus grosse, mais une IA plus forte : maîtrisée, efficiente et faite pour durer ».
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