Interview

Salvator Niyonzima, directeur pays à l’Onusida: «La prévalence du VIH chez les détenus est de 19 %»

Salvator Niyonzima, directeur pays à l’Onusida
Maurice a la capacité d’être parmi les premiers pays à éliminer le VIH/Sida. Pour y parvenir, il faut prendre les bonnes actions. C’est l’avis de Salvator Niyonzima, nouveau directeur pays de l’Onusida pour les Comores, Madagascar, Maurice et les Seychelles. Il était en visite à Maurice la semaine dernière. Cela fait un mois et demi que vous assumez les fonctions de directeur pays à l’Onusida. Quel était le but de votre visite ? C’était pour une prise de contact avec les autorités nationales et les différents acteurs pour me faire connaître et pour voir avec eux quelles sont les priorités et les domaines où l’Onusida pourrait les appuyer. J’en ai profité pour faire quelques visites de terrain également pour voir leurs sites de travail et ceux qui sont gérés par le ministère de la Santé. Je suis satisfait de la qualité des débats que j’ai eus avec les divers interlocuteurs et plus important encore, sur les étapes prochaines sur lesquelles nous avons discuté. Peut-on savoir lesquelles ? On doit travailler pour continuer la riposte et l’accélérer. Dans votre pays il y a une corrélation entre la lutte contre le sida et l’utilisation des drogues injectables qui est un des moteurs de l’épidémie du VIH. Là, il y a des questions ou des interventions particulières qui doivent être résolues en direction de ce que nous appelons les populations clés, c'est-à-dire les utilisateurs des drogues injectables, les professionnels du sexe, les homosexuels et les détenus. Les autorités nationales ont la responsabilité ultime de la réponse de la lutte contre le VIH. Il est important que cela reste à l’agenda politique des autorités nationales. Beaucoup a été fait concernant la lutte contre le VIH à Maurice. Que reste-t-il, selon vous, à faire pour gagner le combat ? Maurice est sur la bonne voie. Il s’agit maintenant d’accélérer la lutte, de maintenir les programmes qui sont en place et d’augmenter les interventions là où c’est nécessaire. Par exemple, dans les prisons il y a un certain nombre de services qui sont disponibles et  il y en a d’autres qui ne le sont pas encore. Le gouvernement est invité à travailler sur ces questions là. Tout en tenant compte de la loi. Le gouvernement décidera s’il faut apporter des réformes ou non. Car il ne faut pas transgresser la loi. Dans le cadre des mesures prises pour la réduction des risques, y compris l’utilisation des drogues injectables, les autorités avaient appliqué le programme de distribution de méthadone dans les prisons. Mais la distribution a été discontinuée. Et je crois qu’il n’y a pas encore d’autorisation pour la distribution de préservatifs dans les prisons. Ce sont autant de questions qui doivent être analysées et voir qu’elles sont les valeurs ajoutées pour ce genre d’intervention. La suspension de la distribution de la méthadone aux nouveaux patients dans le cadre du programme de réduction des risques a fait grand bruit. Est-ce que les experts de l’Onusida ont complété l’exercice d’évaluation de ce programme mis en place en 2006 ? D’abord, je dirai que le gouvernement a lui-même dit qu’il ne remet pas en cause le programme de réduction des risques. Il souhaite revoir certaines choses et propose de changer les produits et souhaite changer la stratégie concernant l’échange de seringues. L’évaluation que le gouvernement a demandée est en préparation. Il est encore prématuré de se prononcer là-dessus car on n’a pas encore les résultats de cet exercice.  Mais nous sommes déjà en contact avec les autorités nationales pour la préparation du rapport et l’annoncer. Plusieurs pays ont adopté des traitements préventifs pour éviter de nouvelles contaminations, la prophylaxie pré-exposition (PrEP). Pensez-vous que Maurice devrait leur emboîter le pas ? La PrEP, l’utilisation de médicaments à titre prophylaxie, sont des choses qui sont appliquées dans certains pays. La recherche scientifique a montré que cela marche. Chaque pays les adopte en fonction de ses lois et de sa situation particulière. Le gouvernement de Maurice est au courant de ces avancées scientifiques. Mais il faut donner le temps au gouvernement d’inclure cela dans ses politiques ou de revoir ses politiques de réduction des risques actuelles. Ce travail est en préparation. Les stratégies qui marchent le plus avec le progrès qu’il y a eu dans le monde ce sont  les traitements antirétroviraux (ARV), le dépistage d’au moins 90 % de personnes vivant avec le VIH. Car en faisant cela, plus de personnes connaîtront leur statut sérologique et pourront bénéficier d’un traitement plus rapidement. Cela entraînera une suppression virale complète de la concentration du VIH dans le sang. Les trois grands axes sont donc : le dépistage, le traitement ARV et la qualité et l’efficacité de ces traitements.   Les instances internationales proposent aussi d’aller vers les populations en fonction de leur localisation et de leur nature. À Maurice la prévalence du VIH chez les détenus est de 19 %. C’est presque 20 fois la prévalence de la population en général de Maurice. C’est dire que c’est une population particulièrement vulnérable dont il faudrait s’occuper tout en ne négligeant pas les autres. Les ONG comme les autorités gouvernementales veulent œuvrer pour atteindre zéro nouvelle infection comme le préconise l’Onusida. Quel est le chemin pour y parvenir ? Maurice a la capacité d’être parmi les premiers pays à éliminer le VIH/Sida parce que le fardeau du risque a été maîtrisé relativement avec le nombre de nouvelles infections qui a été stabilisé. Pour le faire, il faut prendre les bonnes actions, renforcer les programmes qui sont mis à exécution, appliquer les nouvelles recommandations et adopter les nouvelles stratégies qui sont proposées. Je suis convaincu que Maurice a cette capacité et je souhaite que cela se réalise pour le pays.
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