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Leur vie après l’Avastin

L’actualité nous apprend que quinze patients ont perdu l’usage d’un œil, en Europe, à cause d’un produit chirurgical ophtalmique. Ce qui nous rappelle les cas de l’Avastin, où quatre Mauriciens avaient connu le même sort « pour cause de mauvaise manipulation ». Que sont-ils devenus ? C’est en larmes que Ravinduth Kassee, la cinquantaine, revient sur ce triste épisode qui lui a coûté un œil. « Ma vie ne sera plus jamais la même. Je me suis endetté pour les interventions et je suis dans l’incapacité de travailler. Mes démarches pour obtenir une allocation de l’État sont restées vaines. Je ne sais plus à quelle porte frapper », nous confie-t-il.
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/div> Le quinquagénaire affirme qu’il n’était pas au courant des risques que comporte l’injection de l’Avastin. Il soutient avoir signé le formulaire de consentement sans avoir compris les clauses. « Je ne sais pas lire et, ce jour-là, je n’étais pas accompagné. On a nous a donné ce formulaire à remplir, tout juste après nous avoir mis des gouttes dans l’œil pour faire dilater la pupille. Si j’avais su que cela m’allait coûter un œil, je n’aurais jamais accepté de faire l’injection. J’ai le sentiment d’avoir été trompé », lance Ravinduth Kassee. Krishna Appadoo ne compte pas, pour sa part, rester les bras croisés. « Ma vie a été bousculée depuis cette injection », martèle le sexagénaire, qui a eu à subir une ablation de l’œil gauche, suite à l’infection. Il se fait aujourd’hui le porte-parole des patients qui ont eu des complications après l’injection d’Avastin. « J’estime qu’il s’agit d’une erreur humaine qui ne doit pas se reproduire. Chacun doit assumer ses responsabilités », déclare-t-il.

« Mettre un terme à l’amateurisme »

 
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Krishna Appadoo soutient qu’il est maintenant temps de mettre un terme à l’amateurisme, surtout dans des domaines délicats tels que l’ophtalmologie. « Nous sommes tous passés par de dures épreuves. Notre vision a diminué et nous dépendons des membres de la famille pour survivre au quotidien. Il faut que justice soit faite et qu’on obtienne enfin réparation », avance le sexagénaire. À ce sujet, l’espoir semble s’être amenuisé pour Louis Sylvestre Antonio. « C’est très difficile de vivre dans une telle situation. Cela fait plus d’un an que nous attendons une réponse de la part des autorités. L’attente est très pesante. Je commence à me dire que la situation ne va pas changer pendant encore un bon bout de temps », lance-t-il.
[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"3834","attributes":{"class":"media-image wp-image-5782","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"250","height":"422","alt":"Sylvestre Antonio"}}]] Sylvestre Antonio

« Je ne suis plus la même personne. Plusieurs de mes projets sont tombés à l’eau et j’ai l’impression que ma vie roule au ralenti. Les autorités doivent s’assurer qu’une telle chose ne se reproduise pas, car il est injuste de faire subir de telles épreuves à un être humain », ajoute Louis Sylvestre Antonio.

Pas de retour en arrière possible

Ranjit Jowohir, le quatrième patient, semble, lui, s’être fait à l’idée, mais ne compte aussi pas laisser passer cette « injustice ». « Le mal est déjà fait. Il faut maintenant penser à l’avenir. Nous ne pouvons plus revenir en arrière », soutient-il. Il nous confie qu’il se bat pour que justice soit faite. « Les poursuites légales ont déjà été enclenchées. Une année est déjà passée et nous n’avons d’autre choix que d’attendre », lance le vieil homme. Ce dernier suit toujours son traitement, mais dit être conscient que les dégâts causés par l’infection sont irréversibles. « Je ne peux rien faire d’autre que de respecter les consignes du médecin. J’ai définitivement perdu l’usage d’un œil et cela m’a vraiment affecté, tant sur le plan physique qu’émotionnel. J’ai un emploi du temps programmé : je dois respecter le dosage prescrit par les médecins pour les gouttes », explique notre interlocuteur.

Mauvaise manipulation

Ces quatre patients avaient reçu l’injection d’Avastin au Subramaniam Bharati Eye Centre de Moka, en 2014. Les médecins avaient associé cette perte de vue à une infection dans l’œil, appelée l’endophtalmie. Il s’agit d’une inflammation des tissus internes de l’organe. En mars dernier, le rapport de la commission d’enquête, initiée un an plus tôt, a soulevé des manquements. Cette commission d’enquête était dirigée par le Dr J. Isabelle. Qui a conclu que la cause de l’infection n’était pas le produit lui-même, mais la façon dont il a été manipulé le jour de l’injection. Selon le rapport, l’Avastin a été utilisé sur plus de 4 000 patients sans qu’aucun cas d’infection n’ait été rapporté. Toutefois, c’est la manipulation qui pose problème, selon les experts. Les conditions d’hygiène n’auraient pas été respectées. Les patients auraient été exposés – sans masque, ni bonnet ou couvre-chaussures – à des sources d’infections. Par ailleurs, le matériel utilisé est jugé inapproprié par le comité d’enquête. Trente seringues ont été préparées en même temps, avant d’être réparties en lots de dix.

Les recommandations du rapport

  • Les injections doivent être faites dans un endroit spacieux et une salle confortable pour les patients.
  • Le personnel qui participe aux injections d’Avastin doit être réduit au minimum.
  • Le nombre de patients par séance d’injection doit être réduit.
  • Le protocole pour l’injection d’Avastin doit être respecté à la lettre.
  • Il faut utiliser des seringues à aiguilles détachables pour minimiser les risques.
  • Utilisation d’ampoules en verre, pas en plastique.
  • Une attention doit être accordée au plus vite aux patients ayant une douleur aigüe dans l’œil dans lequel l’Avastin a été injectée.
  • Les patients qui ne souhaitent pas avoir recours à l’Avastin doivent être informés des traitements alternatifs.

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L’œil, un organe complexe

[padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1] La manipulation des médicaments en ophtalmologie doit faire l’objet de précautions redoublées, lance, d’emblée, le Dr Leckhrajsingh Dhunnoo. « L’œil est un organe complexe et sensible. Il est strictement recommandé de respecter à la lettre les protocoles d’utilisation des médicaments. Il convient de rappeler que la structure de l’œil est différente de celle des autres parties de notre corps. Elle n’est pas protégée par plusieurs couches d’épidermes, d’où l’importance de redoubler de vigilance », explique l’ophtalmologue.

Dans le monde: ‘Ala Octa’ retiré de certains marchés européens

15 personnes – 13 en Espagne et 2 en France – ont perdu l’usage d’un œil après une chirurgie ophtalmique, utilisant le produit ‘Ala Octa’. L’affaire suscite actuellement une polémique en Europe. Le produit a été retiré du marché en juillet de cette année. Le 30 octobre dernier, l’Agence espagnole du médicament et des produits de santé signale que 41 autres personnes ont été affectées par ce médicament.

L’injection d’Avastin permet d’empêcher des saignements à l’intérieur de l’œil particulièrement chez les patients diabétiques, souligne le Dr Dhunnoo. Pour éviter des complications, il faut respecter les normes de l’Organisation mondiale de la santé. « Certains médicaments sont prescrits avec des consignes très strictes. Par exemple, le délai d’utilisation de certains médicaments est de 15 jours après l’ouverture », souligne le Dr Leckhrajsingh Dhunnoo.
 

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