Pourquoi rendre l’éducation obligatoire dès l’âge de trois ans et en priver certains ? à l’instar d’un petit bout de chou de 4 ans qui ne souhaite qu’une chose : aller à l’école. Question que se pose le couple Lamport, les parents du petit Thomas, 4 ans, atteint de trisomie 21. Ces derniers dénoncent le système éducatif dit inclusif à Maurice.
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«Thomas a soif d’apprendre. à quatre ans, il est prêt pour l’école. Mais, l’école ne veut pas de lui. » Propos accablants et désespérants de ses parents. Le couple Lamport explique que le fait que leur fils soit né avec un chromosome en plus (la trisomie 21) fait qu’il ne puisse être considéré comme un élève comme les autres par certaines écoles. à savoir que la trisomie 21 (ou syndrome de Down), est une anomalie chromosomique congénitale provoquée par la présence d’un chromosome surnuméraire pour la 21e paire.
Blessés par cette situation, ces derniers se battent corps et âme pour que leur fils ne soit pas rejeté du système éducatif mauricien. Selon eux, c’est une suite logique que leur enfant soit admis dans une école maternelle. « Thomas a toujours grandi dans un environnement où il a été traité comme tous les autres enfants. Il a toujours été un enfant comme les autres, rempli d’énergie, amical avec tout le monde. Certes, il a un peu de retard au niveau du parler et porte encore des couches parce que justement il n’arrive pas encore à bien se faire comprendre quand il veut aller aux toilettes. Cependant, il n’a aucune autre difficulté, aucun handicap », soutiennent les parents.
Durant les premières quatre années de sa vie, Thomas s’est bien intégré dans la société, relatent ses parents. « On sort ensemble. On va à des concerts, aux restaurants. Jusqu’ici, personne ne nous a fait des commentaires désobligeants. » Cependant, ajoutent-ils : « les choses ont commencé à se corser lorsqu’ont démarré les démarches pour l’admission du petit Thomas dans une école maternelle. »
Réflexions désobligeantes
Habitant le village de Dagotière, ils vont frapper aux écoles de leur quartier avoisinant. « Toutes les écoles privées de notre localité lui ont refusé une admission. Elles nous disaient qu’elles ne peuvent pas s’occuper d’un enfant malade. Que notre enfant n’est pas comme les autres enfants et qu’il va déranger la classe. » Les parents de Thomas sont choqués par ces propos et réflexions désobligeantes. « Qu’en est-il du système éducatif dit inclusif à Maurice ? », s’interrogent-ils.
Devant le refus des écoles privées et pour en savoir plus sur ce que dit la loi, le couple Lamport a approché le ministère de l’éducation. « On nous dira d’abord qu’ils ne peuvent rien faire pour notre enfant car il n’a pas cinq ans. Une autre instance finira par nous conseiller de l’enregistrer auprès d’une école maternelle gouvernementale de la région », raconte la mère de Thomas. « Je me suis donc dirigée vers l’école de Verdun où il y avait uniquement quatre élèves pour deux enseignants. À ma grande surprise, ils n’ont pas voulu l’accepter. J’ai eu droit à de nombreuses remarques malveillantes qui m’ont vraiment touchée. Heureusement qu’il est encore petit et qu’il ne comprend pas », dit-elle. Pis encore, comme leur fils Thomas a la peau blanche, les parents ont eu droit à de telles questions : « a-t-il des problèmes de peau ? Est-il contagieux ? » Ces derniers sont tristes de constater que des professionnels travaillant avec des enfants ne savent pas ce qu’est la trisomie 21. « Le pire dans tout cela c’est que ce sont les enseignants qui font preuve de discrimination alors que ce sont eux qui doivent inculquer des valeurs aux enfants. »
Plusieurs refus plus tard et grâce à l’intervention de l’Early Childhood Care and Education Authority (ECCEA), Thomas est finalement admis à l’école de Verdun. « Cependant, les enseignants avaient exigé que je sois présente en classe tous les jours. J’ai choisi alors de ne plus travailler et d’accompagner mon fils à l’école », précise la mère. Cette dernière est déçue car « une fois en classe, on ne s’occupait pas de Thomas. Et c’est moi qui le faisais. On ne le faisait pas participer aux activités ».
L’Ombudsperson enquête
Lorsque la mère de Thomas ne peut se rendre à l’école, elle ne peut même pas se faire remplacer par son époux. « Les enseignants ont refusé l’accès à l’école au père. De ce fait, nous sommes obligés de garder Thomas à la maison », raconte cette mère de famille attristée.
Face aux difficultés rencontrées, les parents se sont rendus au bureau de l’Ombudsperson for Children pour dénoncer ce qu’ils qualifient de discriminatoire. Contactée à ce sujet, l’Ombudsperson Rita Venkatasawmy avance qu’une enquête est en cours et qu’elle fera part de ses recommandations sous peu.
Pendant ce temps, le petit Thomas ne va pas à l’école. Mais, il attend impatiemment de reprendre son cartable pour rejoindre ses petits camarades…
Création d’une Special Needs Authority
Special Needs Authority Bill. L’objectif de ce projet de loi est de créer une Special Needs Authority afin d’assurer la scolarité des enfants avec des besoins spéciaux. On apprend que le ministère concerné travaille d’arrache-pied afin qu’une structure soit mise sur pied dans les plus brefs délais. À ce jour, plusieurs rencontres ont eu lieu avec des ONG et d’autres autorités. L’objectif est de répondre aux besoins des enfants nécessitant non seulement les moyens et l’accès aux écoles mais aussi des ressources telles que des carers et des éducateurs spécialisés.
Dr Tadebois : « Il n’y a aucune raison pour qu’il soit exclu »
D’emblée, le Dr Tadebois, médecin généraliste, n’a pas manqué de souligner que c’est triste et choquant de constater qu’en 2018 les enseignants en savent si peu sur la trisomie 21 : « Un enfant atteint de trisomie 21 est un enfant comme les autres. Au niveau de la maternelle, il n’y a aucune raison pour qu’il soit exclu. Si sa peau est parfois différente, c’est parce qu’elle est sèche et a besoin d’être hydratée. Nous sommes en 2018 et les gens ne savent toujours pas que le syndrome de la trisomie 21 enfants n’est pas contagieux ? » Selon le médecin, les parents devront, au contraire, être encouragés à enregistrer leurs enfants trisomiques à l’école maternelle. « Nous luttons pour qu’ils puissent aller à l’école avec les autres enfants, car cela aidera énormément à leur développement. Auparavant, il y avait plus d’écoles spécialisées qui militaient pour l’intégration de ces enfants dans la société afin que ces derniers aient l’occasion d’intégrer la communauté. »
Le ministère fait le suivi avec les instances concernées
L’attaché de presse au ministère de l’éducation, Deenesh Seeharry, a tenu à aporter son soutien à la famille : « Avec la réforme, il faut faire ressortir que le système éducatif prône l’inclusion, donc la non-discrimination. Il est attendu que toutes les institutions soient conformes à ces principes. En ce qu’il s’agit des établissements pré-primaires, ils sont tous enregistrés auprès du ministère de l’éducation ». Le représentant du ministère ajoute que « dans le passé, les enfants trisomiques ont eu des carers pour pouvoir aller à l’école et cela n’a pas changé ». Deenesh Seeharry fera le suivi avec les instances concernées afin que l’enfant puisse se rendre à l’école le plus vite possible. « Cet enfant doit avoir la chance de grandir et de s’épanouir dans un environnement propice à son développement. »
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