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Koshal Chummun, détenteur d’un BSc en Tourism & Management : l’appel de la terre

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Il a choisi de bouder le confort d’un bureau climatisé pour embrasser un métier qui exige une bonne dose de patience et un zeste de persévérance : cultiver la terre-mère. Koshal Chummun, détenteur d’un BSc en Tourism and Management, a tout quitté pour reprendre le flambeau de son dada… et de son père. Plutôt qu’un stylo ou un laptop, il a préféré manier pioche, faucille et râteau pour faire pousser des légumes 100 % bio.

Le soleil peine à percer les nuages au-dessus du village de Montagne-Longue, dans un coin appelé Valton. En ce matin hivernal, l’air est frais, des gouttelettes de pluie ruissellent doucement, mais ce jeune homme de 30 ans est déjà à l’œuvre dans son jardin, devenu sa patrie intime.

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Koshal Chummun se consacre pleinement à ma passion: l’agriculture bio. « La terre est l’or des humbles », lance-t-il avec conviction.

Sur un peu plus d’un arpent qu’il loue à bail auprès d’une organisation socioculturelle, Koshal s’affaire avec sa pioche, son râteau et sa faucille — des outils indispensables à la culture de légumes et de fines herbes. Grand gaillard à la barbe soignée, il pourrait dérouter certains esprits BCBG. Il s’exprime en créole, mais ponctue ses phrases de termes techniques en anglais, propres à l’agriculture bio.

Sa maman, Jayantee, 53 ans, fait glisser une grande porte coulissante en tôle, dévoilant un véritable trésor potager : des étals, des tables, des paniers géants débordant de légumes fraîchement récoltés.

Parmi, carottes, choux, calebasses, maniocs, laitues, pommes d’amour de deux calibres différents, bananes vertes pour le curry, chouchous, concombres blancs, betteraves, poivrons jaunes, et même du concombre anglais. Sans oublier les queues d’oignons, la menthe, la coriandre, le brocoli, le thym, le persil — qu’il soit frisé ou plat. Et tout au fond du champ, on aperçoit des bananiers, des papayers, de la patate douce, de l’arouille et encore du manioc. Ce dernier, d’ailleurs, est particulièrement réputé dans la région de Montagne-Longue : on dit que c’est ici qu’on trouve le meilleur du pays.

Bref, un véritable bazar du coin, qui rend bien service aux habitants de Valton, souvent approvisionnés dès l’aube grâce à un concept quasi 24/7.

Koshal et sa maman le tiennent depuis quelques années, mais derrière ces étals bien garnis se cache un arpent et des poussières de terre, cultivés avec amour et rigueur.

Le jeune homme nous raconte sa reconversion, de diplômé en BSc de l’Université de Technologie de Maurice (UTM) à Petit-Raffray, à petit planteur de Valton dans le Nord : « Quand j’ai obtenu mon diplôme à l’UTM, j’ai intégré un hôtel du Nord comme valet de chambre. Par la suite, j’ai été promu coordinateur, chargé du suivi des chambres nettoyées et prêtes à accueillir les clients. Mais je ne m’y sentais pas à ma place. Au bout de six mois, j’ai décidé de tout quitter pour me poser les bonnes questions sur mon avenir. »

Une thèse sur l’élimination d’intermédiaires

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Le jeune planteur peut compter sur le soutien indéfectible de sa mère Jayantee.

Comment peut-on faire des études poussées en tourisme et management, pour finalement se tourner vers la terre comme voie de sortie ? Koshal esquisse un sourire, trouvant notre question un brin bébête : « Quand j’ai soumis ma thèse à l’UTM, son thème était justement : « The linkages between agriculture and tourism ». « J’y expliquais pourquoi il était essentiel de repenser le lien entre planteurs et hôteliers. Je défendais l’idée qu’il fallait contourner les encanteurs, ces intermédiaires qui achètent les produits agricoles à bas prix pour les revendre à prix d’or aux établissements hôteliers — sans se salir les mains, sans subir les aléas du climat, sans rien faire, et en empochant des profits énormes, pendant que les petits planteurs, eux, peinent à s’en sortir. »

Pour ce trentenaire, comme le dit le dicton, « travailler la terre, c’est semer la vie ». Koshal a un amour fou pour ce qu’il fait. Tout crasseux, les genoux de son jeans bleu virés au marron foncé, les mains pleines de boue, ses « boots » de motard montant jusqu’aux chevilles, il incarne l’attachement viscéral à la terre. « La terre est l’or des humbles. Les jeunes qui rechignent à prendre la relève de leurs parents pensent peut-être que planter, c’est dégradant. Mais moi, je leur dis que semer la terre, c’est récolter la vie », affirme-t-il, sans détour.

En parallèle de son champ de légumes et de fines herbes, Koshal élève aussi, avec sa maman Jayantee, quelques cabris et moutons dans leur arrière-cour. « C’est une passion pour nous de les voir évoluer dans l’enclos. On va leur chercher à manger, ça prend du temps, mais le temps, c’est aussi la vie », glisse la quinquagénaire, toute fière de voir son fils perpétuer une tradition familiale où la terre reste une source d’amour et de dignité.

Une maman collée aux basques du fils

Elle a 53 ans et reste la plus fervente supportrice de son fils Koshal. « Mon mari s’occupe d’un grand terrain à Les Mariannes et pratique une culture traditionnelle, contrairement à Koshal qui fait du bio avec du compost maison ou importé. Moi, je m’occupais de son champ quand il n’était pas au pays.

aintenant qu’il est rentré définitivement à Maurice avec ma bru, je lui donne un coup de main, mais il se débrouille très bien. Je sens qu’il aime vraiment la terre, à l’inverse de certains jeunes qui pensent qu’être planteur est dégradant. C’est une mauvaise perception », confie Jayantee.

Chaque jeudi, mère et fils vont à l’Auction Market de Wooton, non seulement pour s’approvisionner en légumes qu’ils ne cultivent pas à Valton, mais aussi pour vendre les produits de leur propre champ.

Le va-et-vient entre l’Angleterre et Maurice

Koshal Chummun est un homme heureux, mais il admet avoir connu une légère tracasserie ces dernières années : il devait faire l’aller-retour entre Maurice et l’Angleterre à intervalles réguliers. « Ma femme est l’une des directrices de PricewaterhouseCoopers. Elle avait été affectée à Londres, ce qui m’obligeait à voyager tous les six mois. Pendant mes absences, c’est ma maman qui s’occupait du jardin. Mais depuis un mois, elle est revenue à Maurice dans le cadre de son travail chez PWC, ce qui me permet de rester ici et de me consacrer pleinement à ma passion : l’agriculture. »

Tout sourire, Koshal évoque son parcours scolaire. Après avoir fréquenté l’école primaire Mohabeer Fagooa, il poursuit ses études secondaires à la Rabindranath Tagore SSS. « En Form II, j’ai rencontré Oushna, celle qui est devenue ma femme. Elle me soutient énormément. Elle dit ne pas avoir la main verte, mais elle vient quand même m’aider aux champs. Et curieusement, le jour où elle a semé des graines de voème, j’ai eu l’une de mes plus belles récoltes. Comme quoi, la terre reconnaît les gestes faits avec amour. »

 

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