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Admission en Grade 7 : quand le doute s’installe

Eleves Trois critères sont déterminants pour une accession dans un ‘bon’ collège dès le 12 décembre prochain.

À 10 jours de la proclamation des résultats du PSAC, ils sont nombreux à s'interroger. Malgré tous les efforts de communication des autorités par rapport aux conditions d'admission en Grade 7 pour 2018, ils soutiennent que le ministère de l'Éducation aurait pu faire davantage, puisqu’ils sont restés dans le flou sur certains aspects, avec plusieurs questions demeurées en suspens. Le troisième critère de proximité est particulièrement commenté.

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« À l'approche des résultats, je sens monter la pression. J'ai peur pour mon fils... Dans quel collège sera-t-il admis ? » se demande Anil. Ce père de famille soutient que son enfant a l'habitude d'avoir plus de 95 points dans chaque matière. Cependant, il croit qu'avec les conditions établies pour l'obtention d'une place en Grade 7, l'enfant n'obtienne pas son premier choix. « Je n'ai pas de doute que tous les collèges ont leur mérite, mais moi je souhaiterais que mon fils obtienne une place dans le collège que nous avons choisi en premier recours… », martèle Anil.

« On nous avait fait croire que le PSAC allait être une évaluation, le contraire du Certificate of Primary Education (CPE), examen très compétitif. Pourtant, le PSAC s’est avéré un leurre pour de nombreux parents », précise-t-il.

Avec la réforme éducative, il y a eu l'élimination du CPE, examen de fin d'études du cycle primaire. Il est remplacé par le Primary School Achievement Certificate (PSAC). Après les épreuves qui se sont tenues auxmois d'août et d'octobre dernier, les résultats seront proclamés le 12 décembre prochain. Déjà, la crainte est ressentie parmi les parents, malgré toute l'assurance donnée par les officiers du ministère de l'Éducation.

Comme Anil, nombreux sont les parents qui soulignent que le choix des « bons collèges » est restreint, avec la conversion des douze collèges d'État en académie.

« Personnellement, j'aurais souhaité que ma fille soit admise au Queen Elizabeth College (QEC), tout comme moi, à l'époque, mais elle n'aura pas cette chance. Je me demande si cette réforme ne me causera pas de problème pour avoir un bon collège pour ma fille... », se demande Ingrid.

Le PSAC s’est avéré un «leurre» pour de nombreux parents

Ces parents, tout comme d'autres, se disent maintenant conscients de l'enjeu de la réforme avec l'élimination de la notation d’A+. « En éliminant l’A+, c'est le nombre de candidats qui obtiendront le Grade 1 qui va augmenter. Autrefois, l’A+ permettait à quelques-uns d'avoir accès aux 'stars colleges'. Aujourd'hui, ces institutions n'existent plus et le nombre d’élèves qui obtiendra le meilleur résultat sera plus grand, puisqu'il concerne la catégorie de ceux qui obtiendront 75 à 100 points dans une matière... Cela risque de faire très mal lorsque nous allons recevoir les résultats le 12 décembre... », explique Salim, dont la fille souhaitait être admise au Dr Maurice Curé State College.

Critères d'admission

À maintes reprises, la ministre de l'Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun, a souligné que le collège qui sera alloué à un élève en Grade 7 en 2018 sera déterminé après l’examen de trois critères : choix des parents, résultats obtenus et proximité de la résidence avec l’établissement secondaire. Il est aussi indiqué que, si deux candidats ont obtenu les mêmes résultats, c’est la proximité de la résidence qui entre en jeu. Cet aspect est très commenté en ce moment. Plusieurs se demandent comment tous les élèves avec des résultats différents, à l'exemple de ceux qui obtiendront entre 75 et 100 points, peuvent être traités sur un même pied d’égalité ? Les élèves seront départagés par la distance qui sépare leur résidence par rapport à un établissement secondaire. À noter que ces candidats représentent ceux qui, dans le défunt CPE, obtenaient entre 20 et 24 unités. En 2016, ils étaient au nombre de 6 458, dont 2 943 garçons et 3 515 filles, dans cette catégorie. La question cruciale que se posent quelques parents concerne la proximité de résidence.

A titre d’exemple, concernant l’admission à Ébène SSS Girls, une fillette ayant obtenu 75 points et habitant Belle-Rose aura-t-elle préséance sur une autre fillette, celle-ci ayant obtenu 90 points, mais résidant à Beau-Bassin, sachant que les deux étudiantes sont des habitantes de la Zone 2 ?

Leçons particulières

La politique du PSAC veut que tous les enfants de Std VI passent par la suite en Grade 7. Ceux qui n'obtiendront pas les résultats requis passeront en 'extended stream' et feront leur Form III au bout de quatre années d'études, contrairement aux autres qui le feront en trois ans. Il y a également des parents qui souhaiteront que leurs enfants soient admis dans une académie au bout de la troisième année. Comme stipulé dans la réforme, ce sont les étudiants qui auront brillé qui seront admis dans ces académies. Selon le président de la Government Secondary School Teachers' Union (GSSTU), cette situation provoquera une recrudescence vers les leçons particulières. Roshan Boodnah prévoit que, dès le début de 2018, les parents se tourneront vers les enseignants pour ces leçons. "Les parents seront prêts à débourser énormément pour que leurs enfants obtiennent une place dans une académie. Le stress, qui était présent au niveau du CPE, le sera au niveau des Grades 7,8 et 9. »

Jusqu'à maintenant, les spéculations vont bon train. Et la rumeur voudrait que l’on privilégie la proximité de résidence sur les résultats. « Un enfant avec 90 points doit avoir la priorité pour l’obtention d’une école sur un autre avec 80 points. Sinon, le PSAC ferait un tort immense à ces enfants utilisés comme cobayes », martèlent d’autres parents.

Exercices de simulation

Certes, même si la ministre a rassuré les parents qu'il y a de la place pour tout le monde, puisqu'il y a 136 collèges régionaux qui admettront ces élèves, des officiers dudit ministère se demandent si les parents vont accepter que leurs enfants soient admis dans un autre collège que celui indiqué comme premier choix.

Un préposé du ministère de l'Éducation nous a confié que toutes les dispositions ont été prises pour assurer le bon déroulement de l'exercice d'admission. Les fonctionnaires ont travaillé d'arrache-pied pour assurer que tous les enfants aient un collège. D'ailleurs, ils ont fait des exercices de simulation afin de s'assurer que tous les cas de figure soient pris en considération. Le ministère continue à communiquer. Une brochure explicative sera distribuée dans les prochains jours pour donner aux parents et enseignants les dernières informations et les dispositions prises.


Le privé inquiet

Malgré l'assurance donnée par la ministre aux directeurs des collèges privés, ces derniers soutiennent qu'ils ne sont pas pour autant rassurés. Des 68 collèges d'État qui existent, 12 seront convertis en académies. Ils n'admettront pas d'élèves en Grade 7, mais en Grade 10 en 2021. De ce fait, le ministère a fait comprendre que les enfants, qui devaient y être admis, seront dirigés vers les autres collèges d'État et ceux du privé. Cependant, Houmayoun Soobadar, président de la Managers of Private Secondary Schools Union (MPSSU), fait ressortir que plusieurs collèges privés vont souffrir. « Certains collèges d'État font provision pour accueillir d'autres élèves en construisant des salles de classe... D'un côté, on nous donne une assurance et, de l'autre, les autorités font le contraire. » Comme lui, d’autres directeurs sont d’avis qu’ils ont été leurrés, car la construction bat son plein à la James Burty David SSS pour accueillir des élèves de Grade 7 en 2018.

Secpticisme des collèges privés

Ce directeur insiste aussi, qu'en règle générale, les collèges privés n'auront pas autant d'élèves en Grade 7, malgré toute l'assurance donnée. Il met l'accent sur la diminution du nombre d'élèves et la construction de nouvelles salles de classe dans certains collèges d’État. Il soutient que les autorités doivent se souvenir que les collèges privés ont joué un grand rôle au sein de la société mauricienne. « Nos collèges ont encore leur rôle à jouer, que ce soit au niveau de la discipline que des résultats du School Certificate (SC) et du Higher School Certificate (HSC)… »

Avec la réforme, il y a aussi l'introduction de nouvelles matières au secondaire. Afin de les enseigner, les directeurs sont invités à construire de nouvelles salles de classe ou encore des salles spécialisées. Houmayoun Soobadar avance que plusieurs responsables hésitent à investir parce qu'ils sont dans le flou. «Nous n'avons eu aucune assurance en écrit, comment allons-nous investir? Ce sera une perte si le nombre d'élèves attendu n'est pas admis chez nous... »

L'éducation est un tout et ne se résume pas au fait d'apprendre

Pour sa part, Harris Bachwa, porte-parole des directeurs des collèges privés, se veut rassurant. Il avance que les collèges privés vont toujours exister. « Les collèges devront accueillir les recalés du PSAC et, avec la conversion des collèges en académie, il faudra trouver de la place pour tout le monde. » Au niveau des investissements pour la construction de nouvelles salles de classe, il soutient que c'est en 2019 que les nouvelles classes devront être prêtes. Dans le même élan, le technical working group pour la révision des 'grants' alloués aux collèges privés se réunira en 2018. Les managers espèrent que le montant qui leur sera proposé soit à l'avantage des élèves. « Il était temps d'avoir une réforme dans l'éducation. Nous croyons que cela fera du bien à nos enfants. Il fait aussi comprendre que l'éducation est un tout et ne se résume pas au fait d'apprendre... »

Au niveau des collèges catholiques, il n'y a pas de changement dans les conditions en vigueur pour les élèves de Form I. Pour l'admission des élèves avec les conditions de
50 %, l'enfant doit avoir obtenu un grade aggregate entre 4 et 16 unités. L'enfant doit s'inscrire seulement dans le collège/les collèges de la zone de l'école primaire qu'il fréquente. Ceux ayant déjà obtenu un collège catholique sur la liste du ministère ne seront pas éligibles pour un autre collège catholique.


Questions à Suttyhudeo Tengur : «La méritocratie doit régner parce qu'elle valorise l'élève»

Le président de la Government Hindi Teachers Union (GHTU), Suttyhudeo Tengur, nous livre ses impressions sur la réforme éducative.

Quelle différence fondamentale y a-t-il entre les critères d'admission en Form I et Grade 7 ?
Il y a un monde de différence entre l'exercice d'admission de Grade 7 pour 2018 et celui de Form I en 2017. La principale est que l'admission pour la prochaine rentrée de Grade 7 se fera sur le critère régional, alors que l'année dernière, elle était basée sur le critère de mérite. Aujourd'hui, c'est le lieu de résidence qui aura préséance sur la méritocratie.

Pourquoi défendez-vous le critère de la méritocratie ?
La plupart des Mauriciens qui occupent des postes de responsabilité aujourd'hui et tous les autres sont des produits du critère de mérite. Je peux vous dire qu'ils n'ont rien eu en cadeau, ce sont leurs efforts qui sont reconnus. Lorsqu'il n'y a pas de mérite, il n'y a pas d'équité. Ce changement dans l'exercice d'admission est le vœu de l'électorat que je respecte, mais cela va nous faire du tort. La méritocratie doit régner, parce qu'elle est transparente et valorise l'élève.

N'êtes-vous pas convaincu lorsque la ministre de l'Éducation affirme que la réforme éducative prend en considération tous les enfants de la République de Maurice ?
La réforme éducative prend en compte tous les enfants mauriciens. En allant en profondeur, nous constatons que l'enfant qui aura plus de 90 points sera traité comme l'enfant avec 75 points. L'A+ a été aboli. En tant que pédagogue, cela va faire une grande différence dans la gestion de la classe. Ce sera un problème pour tous les partenaires de l’éducation.


Interrogation des enseignants

Les enseignants du privé, comme ceux de l'État, craignent que les choses ne prennent une mauvaise tournure à partir du 12 décembre prochain. Le président de l'Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE) affirme que les parents ont raison d'avoir peur. « La réforme devait venir, mais il est désolant que la ministre n'ait pas privilégié la communication avec ses partenaires. En tant qu'enseignants, nous aurions mis l'accent sur les craintes des parents. Le jour de l'admission, les parents recevront une douche froide. Avec cette réforme, il y aura des 'star regional schools' qui ne pourront pas admettre tous les enfants, malgré leurs bonnes performances ».

Un instituteur du primaire nous explique que, lorsque les parents ont rempli leurs formulaires d'admission pour une place en Grade 7, ils ont demandé à être guidés sur les meilleurs établissements de la région. «Il ne faut pas se voiler la face, ceux qui habitent une région connaissent la réputation de ses établissements. C'est en fonction de cela que le choix a été effectué », dit-il.

Roshan Boodnah, le président de la Government Secondary School Teachers' Union (GSSTU), déplore que tous les collèges n'aient pas été rénovés. «Il y a encore du travail à faire au niveau des établissements publics. Tous les collèges ne sont pas du même niveau. Il y a encore du travail à faire. La rénovation des collèges aurait dû se faire en même temps du processus de la réforme. »

 

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