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Shakeel Mohamed : «Il faut penser à un monde politique sans Bérenger, Duval, Ramgoolam et Jugnauth»

Si le député de l’opposition dit comprendre la position du MMM et du PMSD concernant le leader du PTr, Navin Ramgoolam, il est, cependant, d’avis que le timing de cette démarche n’était pas le bon. Plaidant également pour un changement radical dans le système de gouvernance du pays, Shakeel Mohamed soutient qu’il est temps de réfléchir à un nouveau monde politique.

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Quel est votre sentiment après l’éjection du PTr de la plateforme réunissant les partis de l’opposition ?
Nous sommes certes des politiciens, mais nous sommes humains avant tout. Il est important de tout remettre dans son contexte. Cette entente des partis de l’opposition, c’était la volonté du Parti travailliste (PTr) et particulièrement de Navin Ramgoolam. C’est lui qui a créé la plateforme permettant à amener Bérenger et Duval à la même table. C’est aussi lui qui a ramené Roshi Bhadain dans cette équation. Donc, pour tout vous dire, c’est blessant. Je ne suis pas le politicien typique qui n’est pas blessé. J’ai, en ce qui me concerne, développé une excellente relation de travail avec le MMM ainsi qu’une relation sincère. La relation avec le PMSD, elle, est naturelle. C’est comme si on était dans le même parti. La relation avec Bhadain, malgré tout ce qui s’est passé avec la BAI et que je le soupçonne d’avoir été à la base de mon arrestation, j’ai su oublier tout ça d’autant que nous faisons aussi partie de l’équipe des « Avengers ». J’ai au fil du temps appris à connaître Bérenger pour lequel j’ai aujourd’hui beaucoup de respect. Je suis donc blessé, car au final, ils resteront des amis. Ce n’est pas à cause de cette exclusion de cette conférence de presse qu’ils vont cesser d’être mes amis.

Ma priorité est d’aider à unir ce beau monde. Je le ferai même si cela implique de me sacrifier."

Avez-vous anticipé cette prise de position du PMSD que vous considéré comme étant l’allié naturel du Ptr ?
Oui. Je voyais cela venir. J’avais déjà dessiné ce scénario au mois de janvier. En ce qui concerne Nando Bodha, je savais qu’il y avait des pourparlers depuis l’année dernière. Je suis sûr que Bérenger était tout aussi bien renseigné et, peut-être, plus que moi. 

En tenant compte de l’affaire des coffres-forts de Navin Ramgoolam et de ce qui s’est passé lors de son mandat premier ministériel, cette volonté exprimée du MMM/PMSD/Reform Party de réclamer son retrait n’est-elle pas légitime ?
Je dois dire que la campagne menée par le MSM contre Ramgoolam avait été bien faite. Il est évident que cette campagne ‘inn tas dan latet boukou dimounn’. Mais il est à présent temps de dépasser le cadre Ramgoolam. Beaucoup de jeunes qui iront voter pour la première fois aux prochaines élections ne sont pas au courant des cas de Navin Ramgoolam. Ils ont cependant envie d’un changement radical dans le leadership et veulent être représentés par des gens à travers lesquels ils se reconnaissent. En termes d’idéologie, de communication et l’utilisation de la technologie. Le débat est donc plus grand que Ramgoolam. Il n’est qu’un élément dans une équation. Jugnauth non plus n’est pas au diapason avec la volonté de la population. La population veut des nouveaux. 

Pour revenir au souhait exprimé par le MMM/PMSD/Reform Party, les leaders se sont expliqués et ont fait comprendre qu’ils ne s’immisçaient pas dans les affaires du PTr. Ils veulent présenter une personne autre que Ramgoolam au poste de Premier ministre. Je comprends ce qu’ils disent. Ils ont le droit. Soyons francs, j’ai été la première personne à dire que Ramgoolam devait partir en 2015. Je l’avais dit de manière abrupte. Je suis aussi le premier à penser qu’il faut non seulement avoir un changement à la tête du pays, mais aussi dans la manière dont on est en train d’administrer le pays. La priorité pour moi, c’est d’être à l’écoute de la population et de mettre en œuvre des changements radicaux dans notre système de gouvernance. Il faut aussi savoir que le PMSD le MMM le PTr et le Reform Party ont tous la volonté de mettre le gouvernement actuel à la porte. 

Vous avez admis avoir demandé le départ de Ramgoolam en 2015. Six ans après, il semble être toujours déterminé à s’accrocher à la tête du parti et se présenter comme Premier ministre. Il faudra attendre encore combien de temps pour voir le départ de Ramgoolam ?
Le souhait de la population est d’avoir un changement radical. Ils veulent voir des jeunes avoir l’opportunité de prendre en main la destinée du pays. Nous avons eu un Président jeune aux États-Unis avec Barack Obama. Cela a aussi été le cas au Canada et en Nouvelle-Zélande. Le rajeunissement de la classe dirigeante est un mouvement international. Mais à Maurice, il n’y a pas cette culture de donner la chance à la nouvelle génération. Que ce soit sir Seewoosagur Ramgoolam, sir Anerood Jugnauth. Paul Bérenger a presque le même âge que Navin Ramgoolam. Le changement de leadership ne s’opère donc pas avec facilité à Maurice. 

Le débat est donc plus grand que Ramgoolam. Il n’est qu’un élément dans une équation. Jugnauth non plus n’est pas au diapason avec la volonté de la population."
 

Ceci dit, j’estime que le timing du MMM/PMSD/Reform Party est malheureux. Nous sommes en février. Les élections générales ne sont pas pour demain. Pourquoi discuter du poste de Premier ministre maintenant ? La prochaine échéance sera les élections municipales et le poste de Premier ministre n’a rien à voir avec ces joutes. Nous aurions très bien pu aller en alliance pour les élections municipales sans pour autant avoir de leader. Pourquoi un tel empressement ? Bérenger et Duval se sont exprimés auprès de Navin Ramgoolam concernant le poste de Premier ministre depuis le mois de janvier. Pourquoi ne pas avoir donné le temps au PTr et à ses membres de réagir et prendre les décisions qui s’imposent ? Je ne suis pas le seul à plaider pour un changement radical, mais il faut avoir une période de transition pour que cela puisse se réaliser. Nous avions pourtant pu atteindre un ‘momentum’. J’ai entendu Reza Uteem évoquer le souhait des manifestants du 13 février de voir partir les dinosaures. Mais il y avait aussi des pancartes qui réclamaient le départ de Ramgoolam, Bérenger, Duval et Jugnauth. Mais ce serait déplacé pour moi de dire que Bérenger doit céder sa place de leader.

Que répondez-vous à ceux qui plaident pour un départ de Ramgoolam, Bérenger et Duval ?
Je suis d’accord avec le fait qu’il faut commencer à penser un monde politique sans Bérenger, Duval Ramgoolam et Jugnauth. Mais tout changement doit se faire dans le respect. Ce n’était, par exemple, peut-être pas l’intention du PMSD, mais la manière dont les choses ont été faites concernant l’exclusion du PTr démontre qu’il y a eu une atteinte pour humilier notre leadership. 

Xavier-Luc Duval a déclaré que la porte restait toujours ouverte pour le PTr…
Oui, la porte est ouverte. Merci beaucoup. Mais c’est le PTr qui a installé la table pour réunir l’opposition. C’est le PTr qui a ouvert cette porte. Je comprends qu’il faut mettre le pays avant tout. Mais tout changement doit se faire dans le respect. Je veux lancer un appel. Malgré le désaccord, nous avons un objectif commun qui est de mettre le gouvernement à la porte.

Il faut aussi savoir que le PMSD le MMM, le PTr et le Reform Party ont tous la volonté de mettre le gouvernement actuel à la porte."

Cette exclusion survient aussi une semaine après la déclaration d’Eshan Juman disant que le PTr peut, à lui seul, remporter toutes les villes. N’était-ce pas une bourde de sa part ?
Ce n’était pas dit méchamment. Il n’a pas remis en question la nécessité d’une alliance. C’est malheureux que cela ait été perçu ainsi. Mais il avait aussi présenté ses excuses sur les ondes de Top Fm.

La nouvelle configuration de l’opposition peut aussi faire perdre au PTr le poste de leader de l’opposition. Craignez-vous cette éventualité ?
Ce sera le droit de Bérenger et de Duval d’éjecter Arvin Boolell de son poste de leader de l’opposition. S’ils veulent le faire, je respecterai cette décision et je soumettrai aussi ma démission comme Whip de l’opposition. Mais j’estime que travailler ensemble au sein de l’opposition doit rester notre priorité. Si le poste de leader de l’opposition revenait à Bodha, j’espère qu’il sera disposé à révéler les informations dont il dispose, notamment sur le dossier Pack & Blister.

Seriez-vous prêt à œuvrer pour une nouvelle entente ?
Oui, je suis prêt à le faire. Ma priorité est d’aider à unir ce beau monde. Je le ferai même si cela implique de me sacrifier.

La démission de Nando Bodha a été chaleureusement accueillie par le MMM et le PMSD, mais il n’y a pas eu la même ferveur au sein du PTr. Sa démission est-elle un problème pour votre parti ?
À mon niveau, je suis d’avis que Nando Bodha doit venir s’expliquer sur plein de choses. Par exemple, en tant que député du No 3 (Port-Louis Maritime/Port-Louis Est), l’archipel d’Agaléga tombe dans ma circonscription. Et à chaque fois que nous l’avons interpellé comme ancien ministre des Affaires étrangères sur la situation sur Agaléga, il a toujours gardé le secret. J’ai envie que Bodha vienne nous éclairer sur ce sujet. J’apprécie aussi qu’il veuille maintenant faire les choses différemment, mais je trouve qu’il n’est pas allé très loin dans ses propositions. Il propose, par exemple, de préserver les chaînes publiques. Moi je dis non, car je suis pour la privatisation. J’observe qu’il se retient dans ses propositions car il est d’une génération qui arrive difficilement à comprendre ce que veut la nouvelle. 

 

 

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