Interview

Zaid Ameer : «Les voitures de seconde main ont contribué au développement de Maurice»

L'avenir de la voiture d'occasion est-il menacé par le Metro Express ? Non, répond Zaid Ameer, président de l’association Dealers in Imported Motor Vehicles, car les Mauriciens auront encore besoin de ce mode de transport pour leurs sorties familiales, mais aussi dans une île Maurice qui témoigne des mutations au niveau des horaires de travail.

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Comment le marché des véhicules seconde main s’est-il comporté  en 2017 ?
Cette année, le marché a été plutôt résilient, si on tient compte de la mesure contenue dans le Budget 2016-2017, qui a fait passer la dépréciation de 25 % à 5 % sur les véhicules japonais. Mais, à ce jour, les chiffres montrent des ventes qui varient entre 7 000 et 8 500, ce qui est assez bien - en 2014/15, elles montaient jusqu'à 10 000 vehicules. Sauf qu’il existe quelque 25 % d’importateurs individuels directs. En ce moment, on travaille de concert avec les autorités pour mettre un frein à cette pratique, car on souhaite que les importations se fassent par des agences qui apportent des garanties grâce aux lettres de crédit et d’autres documents fiables.

Quelles sont les particularités du marché automobile mauricien ?
Il ne diffère pas des autres marchés étrangers, où il y a trois profils de clients. D’abord, ceux qui achètent leur première voiture - après avoir obtenu leur permis - peuvent dépenser à hauteur de Rs 100 000. Puis, il y a la catégorie des fonctionnaires qui, eux, changent de voiture tous les 4-5 ans, et la classe moyenne, qui dépense en fonction de sa poche et qui va acquérir une voiture peu coûteuse et facile à entretenir mais qui lui revendra au même prix quelques années plus tard. Enfin, il y a les chauffeurs de taxi qui, eux aussi, changent de voiture tous les 4-5 ans pour s’offrir de nouveaux modèles. Car ils disposent de la patente hors-taxe qui, elle, n’a pas connu de dépréciation. Compte tenu de cette clientèle et de son mode de consommation, je pense qu’il faut surtout retenir le fait que les voitures de seconde main ont contribué au développement de Maurice, à un moment où les Mauriciens n’avaient pas les moyens de s’acheter une neuve. Nous avons contribué à remplacer les vieilles marques devenues inconfortables, trop chères à renouveler et grosses consommatrices à la pompe. La flotte des taxis des hôtels est tout de même composée à 90 % de voitures de seconde main, à la fois viables et fiables pour la clientèle étrangère.

La voiture figure-t-elle dans la liste des priorités du Mauricien ?
Oui, mais il regarde le coût du véhicule, parce qu’il a d’autres priorités, notamment l’investissement dans l’éducation de ses enfants, l’achat d’un premier terrain ou d’un prêt-immobilier pour beaucoup et, pour d’autres, d'un deuxième terrain, toujours pour ses enfants. Mais dans n’importe quelle circonstance, un véhicule lui est indispensable, car c’est un moyen de se déplacer à n’importe quelle heure et partout. Il faut savoir que durant ces dernières années, le paysage résidentiel et professionnel mauricien s’est redessiné, avec des espaces plus excentrés et qui exigent que les individus ou familles qui y sont affectés possèdent un moyen de locomotion. Même dans les villes, on voit davantage de familles possédant leurs voitures. Donc, nous avons un parc-automobile qui reflète parfaitement le développement de Maurice à tous les niveaux. Un exemple : certains secteurs d’activités installés à Ébène, comme l’externalisation, les finances et la banque, entre autres, ont des horaires de travail qui s’étendent jusqu'à fort tard. Leurs employés ont forcément besoin d’un véhicule pour rentrer chez eux, certains utilisant le transport de l'entreprise, d’autres se servant de leurs voitures. C’est un exemple. Il existe d’autres avec des projets de micro-villes et des appartements. Ce constat fait, on comprend aisément que la voiture est tout, sauf un luxe.

On répète souvent que nos routes sont devenues saturées…
C’est un faux débat. Ce qu’il faut, c’est une planification intelligente et harmonieuse de notre réseau routier, en tenant compte du trafic, des utilisateurs de nos routes, des écoliers aux salariés, des heures de congestion et des fameux points noirs qui sont des zones d’accidents. Il faut une véritable éducation de tous les utilisateurs des routes, automobilistes, motocyclistes et auto-cyclistes, et piétons. Il faut, dans le même temps, remettre sur le tapis la question de la décentralisation de certains de nos services publics, sans pour autant déserter la capitale.

Les accidents sont aussi imputés au nombre de voitures sur nos routes…
Là, il faut absolument revoir notre procédure d’octroi des permis de conduire. Il faut que tout nouveau détenteur d’un permis passe avec succès une période de moratoire imposée. Savez-vous que le Mauricien qui veut conduire au Canada et qui, pourtant, détient un permis international, doit d’abord repasser par l’école canadienne de conduite ?

La construction du Metro Express ne va-t-elle pas freiner l’utilisation des voitures et, par ricochet, impacter sur ce secteur ?
Non, parce que ce moyen de transport est un alternatif moderne  qui était devenu indispensable pour la décongestion du trafic urbain. Mais, le Metro Express ne desservira pas toute l’île, la voiture et autres types de transport seront encore essentiels pour joindre tous les endroits du pays à n’importe quelle heure. Les Mauriciens ont besoin de ces véhicules, car ils peuvent transporter tous les membres de leurs familles pour des fonctions sociales, familiales ou religieuses, mais aussi lorsqu’il y a une urgence médicale.

Est-ce qu’il n’est pas temps de passer à une vitesse supérieure dans notre politique d’alternative à l’essence ?
Je suis d’accord pour passer à la voiture hybride avec batterie, mais le coût reste encore très cher en raison de la taxe, mais je ne suis pas partisan de la voiture électrique, car la production électrique à Maurice reste très fragile. Avec une voiture hybride avec batterie, on peut aisément imaginer les économies réalisées à long terme sur notre facture énergétique et aussi l’impact positif sur l’environnement où les émissions de CO s’en trouveront réduites de moitié. Mais comment faire comprendre cela à l’Hôtel du gouvernement ?

 

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