Il n’y a pas un jour qui passe sans qu’on entende parler de cas de vols sur les personnes âgées. Les voleurs n’hésitent pas à se montrer violents envers elles. Une situation jugée inquiétante.
« Ma femme, qui a ouvert exceptionnellement la porte, s’est retrouvée en face d’un homme qui tenait un couteau à la main. Quand il nous a vus, il a pris la fuite, mais je n’ai pas pu voir son visage à cause de l’obscurité »
Gaston est un habitant de Rose-Hill âgé de 73 ans. Il a été victime de vols à cinq reprises. Mais celui qui a bouleversé sa vie à jamais, c’est le vol survenu dans les années 2000. Cet incident, qui le hante toujours, s’est déroulé durant une soirée où il pleuvait des cordes. Alors que son épouse et lui rentraient d’une soirée, ils sont tombés nez à nez avec un individu qui avait pénétré leur maison par effraction. « Ma femme, qui a ouvert exceptionnellement la porte, s’est retrouvée en face d’un homme qui tenait un couteau à la main. Quand il nous a vus, il a pris la fuite, mais je n’ai pas pu voir son visage à cause de l’obscurité. Au final, il a volé Rs 300 et n’a pas pu mettre la main sur des objets de valeur lorsqu’il a entendu notre voiture arriver », relate Gaston.
Elle fuit Maurice pour oublier son traumatisme
Certes, le temps a passé, mais ce vol a laissé des séquelles à vie sur la femme de Gaston. « Les années ont passé, mais ma femme est toujours traumatisée. Au début, elle a arrêté de sortir de la maison et elle avait toujours peur le soir. Il fallait laisser les lumières allumées. Quand, le soir, elle entendait des gens marcher dans la cour, elle gardait les yeux ouverts. En la voyant dans cet état, je lui ai proposé de prendre des vacances et elle est partie en Angleterre. Se sentant davantage en sécurité là-bas, elle a décidé de s’établir là-bas. Désormais, pour la voir, je fais des va-et-vient entre Maurice et le Royaume-Uni. Elle vient aussi à Maurice, mais elle est toujours traumatisée par ce vol », relate-t-il.
L’histoire de Jacqueline et de son sauveur, un ressortissant anglais de 61 ans, a défrayé la chronique récemment. Cet incident prouve aussi que de plus en plus de voleurs opèrent dans les petites ruelles à bord d’une motocyclette. Ils sont aidés par un acolyte. Le vendredi 15 janvier dernier, cette senior âgée de 61 ans, qui habite dans le Ward IV, à Port-Louis, s’est rendue au travail en empruntant le même trajet.
L’agression de Jacqueline
« Je marchais tranquille-ment quand des voleurs, à motocyclette, ont tenté de s’emparer de mon sac. J’ai résisté, mais l’un des voleurs m’a malmené et je suis tombée à terre. J’ai crié et c’est cela qui a attiré l’attention d’un homme qui se trouvait dans une voiture. Il a volé à mon secours, aidé de deux hommes. Ils ont réussi à maitriser l’un des voleurs », raconte la victime.
Malheureusement, tout le monde n’a pas eu la même chance que Jacqueline, notamment un pensionnaire de 74 ans. Celui-ci, qui réside à Coromandel, a été victime d’une agression à l’arme blanche après avoir récupéré sa pension à la poste. Le senior, blessé, a porté plainte à la police, mais jusqu’à ce jour, son agresseur n’a pas été retrouvé. Aujourd’hui, par mesure de précaution, il se fait accompagner par sa fille de 42 ans, quand il va récupérer sa pension à la poste. Et il a raison, car les pensionnaires, avec l’argent de leur pension en poche, sont les proies idéales des voleurs.
« Je marchais tranquillement quand des voleurs, à motocyclette, ont tenté de s’emparer de mon sac »
Le manque de réactivité de la police déploré
Les proches d’un senior âgé de 71 ans sont toujours sous le choc. Il s’est fait attaquer, le 17 janvier dernier, par un jeune homme de 25 ans dans les rues de Poste-de-Flacq où il réside. « Je suis allée quitter Rs 3 500 chez ma mère quand le voleur a apparu devant moi. Il m’a bousculé et je suis tombé sur une brique. Je me suis cogné la tête. Comme j’étais déboussolé, le voleur a profité pour voler mon argent et prendre la fuite », explique la victime.
Le septuagénaire, blessé, a été transporté d’urgence à l’hôpital de Flacq par ses frères. Il est outré par l’inaction de la police lors de son agression. « J’ai tout de suite appelé le 148 lorsque j’ai été blessé, mais je n’ai reçu aucune assistance », dit-il, indigné.
Travail de « Grassroot »
Le président de la Savanne Senior Citizens Association, Deven Goundan, inquiet pour les personnes âgées, plaide pour des campagnes de sensibilisation plus agressives. « Toutes les associations et organisations de personnes âgées doivent aborder ce problème avec leurs membres. Malheureusement, il y a des seniors qui restent à la maison et qu’on n’arrive pas à atteindre. Il y a un travail de grassroot à effectuer pour parler au maximum de personnes possible. Pour cela, il faut l’apport des elderly care assistants qui rendent visite aux seniors », indique Deven Goundan. Il croit, par ailleurs, qu’il faut des campagnes de sensibilisation télévisées en sus du soutien des neighbourhood watch pour protéger nos seniors.
Les caméras Safe City opérationnelles fin 2021
« Les forces de l’ordre sont sur le pied de guerre, notamment les limiers du CID, des Field Intelligence Officers, sans oublier les Neighbourhood Officers, qui font un suivi avec les personnes à risques »
Pourquoi les personnes âgées sont-elles la proie des criminels de toute sorte ? C’est parce qu’elles sont vulnérables, explique l’inspecteur Shiva Coothen, de la cellule de presse de la force policière. « Au fil des années, nos réflexes s’amoindrissent et les voleurs en sont conscients. Dans leur quête pour trouver de l’argent facilement et sans effort, ils s’attaquent aux seniors, et parfois avec violence », fait-il remarquer.
Il explique que les policiers, à travers la Crime Prevention Unit, animent des campagnes de sensibilisation régulières pour alerter les personnes âgées et expliquer les précautions qu’elles doivent prendre. Il se veut rassurant.
« Le Commissaire de police est très à cheval sur la sécurité. D’ailleurs, au courant de la semaine, il a rencontré des hauts gradés pour passer en revue la criminalité et les tendances. Les forces de l’ordre sont sur le pied de guerre, notamment les limiers du CID, des Field Intelligence Officers, sans oublier les Neighbourhood Officers, qui font un suivi avec les personnes à risques », ajoute l’inspecteur. Il se veut rassurant, car, selon lui, « tout est sous contrôle. Certes, il y a des enfants, sous l’emprise la drogue, qui volent leurs parents ou grands-parents, mais la situation n’est pas alarmante. »
Que pense-t-il du geste de bravoure de ce ressortissant anglais qui a aidé Jacqueline ? Évidemment, comme de nombreux Mauriciens, il salue aussi le geste de cet homme. De plus, il fait remarquer qu’il y a plusieurs personnes qui ont à cœur la sécurité des seniors. D’ailleurs, l’inspecteur demande aux personnes détenant des infos sur un quelconque cas de vol d’appeler sur le 148 pour aider à élucider le crime.
Selon Shiva Coothen, en sus de la police, c’est le devoir de tout un chacun de veiller à la sécurité des aînés. « Ces derniers sont des trésors et il faut s’assurer qu’ils ne deviennent pas des victimes par excellence », explique-t-il.
L’inspecteur Shiva Coothen précise : « Certes, les caméras Safe City font actuellement polémique, mais je tiens à indiquer qu’un bon nombre d’entre elles sont opérationnelles. Quant aux caméras qui ne le sont pas encore, d’ici la fin de cette année, elles seront opérationnelles », soutient l’inspecteur. Il fait remarquer que les policiers ont pu élucider certains cas de vol grâce aux caméras de surveillance.
La bike patrol renforcée
Afin d’accroître la visibilité de la police, l’accent est mis sur les patrouilles policières. « Notre unité de bike patrol sera renforcée afin que davantage d’officiers puissent patrouiller dans les centres-ville, les quartiers résidentiels et les régions à risques », ajoute l’inspecteur.
Des astuces pour se protéger
- Éviter de sortir avec une forte somme d’argent.
- Ne pas s’afficher avec des bijoux de valeur qui attirent les voleurs.
- Ne pas conserver de l’argent et d’autres objets de valeur dans la maison. C’est mieux de les mettre dans un coffre à la banque.
- Utiliser les guichets automatiques pour retirer de l’argent et de préférence de petites sommes.
- Éviter de marcher dans les endroits isolés.
- Ne pas garder le pin code avec la carte.
- Quand vous allez à la banque, faites-vous accompagner par une personne de confiance.
- Si vous constatez qu’une motocyclette approche, demander de l’aide tout de suite.
Vers une caring society
Vijay Naraidoo, le directeur de DIS-MOI, est également président de la commission des droits des personnes âgées de l’organisation. Il conseille aux personnes âgées d’entretenir de bonnes relations avec les gens de leur entourage, car la solidarité est de mise, si on veut mettre un frein à cet inquiétant phénomène. « On a besoin d’un caring society. Les personnes âgées doivent faire preuve de solidarité pour faire face avec efficacité contre celles qui sont mal intentionnées. Elles doivent se regrouper en réseau et s’assurer du bien-être de tout le monde. Prenons un simple exemple. Un senior qui fréquente un club ne vient plus aux réunions. Dans ce cas, il faudrait prendre de ses nouvelles en lui rendant visite. Les personnes âgées pourraient aussi aller à leur rendez-vous médical en groupe », recommande le directeur de DIS-MOI. Et d’ajouter : « Il faut toujours prendre des précautions, même si les seniors habitent avec leurs enfants ou avec des proches. Et c’est encore plus important pour ceux qui habitent seuls. »
Manque de respect
Pour sa part, Armoogum Parsuramen, président-fondateur de la Global Rainbow Foundation, évoque une dégradation des mœurs. « Il y a un manque de respect envers les aînés. L’érosion des valeurs et le fléau de la drogue contribuent à accentuer le problème de vols sur les seniors », fait-il remarquer.
Face à ce problème, Armoogum Parsuramen souligne qu’il faut aller à la source du problème pour y remédier. Il préconise une étude en ce sens. « À Maurice, il n’y a pas d’étude approfondie pour comprendre la situation sociale. Ce serait utile pour cerner le problème de vols sur les seniors », croit fortement notre interlocuteur. Il condamne, par ailleurs, le laxisme des autorités qui, selon lui, « n’envoient pas un signal fort aux criminels, surtout à ceux qui s’attaquent aux personnes âgées ». « De plus, il y a de nombreux récidivistes parmi ces voleurs et à mon avis, il faudrait faire un système pour les suivre et les empêcher de repasser à l’acte », indique Armoogum Parsuramen.
Perte d’emploi, drogue…
Senior lecturer en Social Policy à l’université de Maurice, Asrani Gopaul explique qu’il existe plusieurs facteurs pour expliquer le nombre croissant d’agressions sur les personnes âgées. « En premier lieu, dans le passé, les personnes âgées étaient toujours accompagnées quand elles devaient se rendre quelque part, mais de nos jours, les enfants sont occupés. Ensuite, avec la pandémie de Covid-19, le chômage a augmenté et les gens sans emploi ont besoin d’argent. Idem pour les consommateurs de drogue. Dès lors, ils s’attaquent aux seniors, qui sont des proies faciles, surtout quand ils vont toucher leur pension.
Évidemment, aucun pays ne peut déployer un policier par personne et c’est pourquoi il faut augmenter la neighbourhood watch et expliquer aux personnes âgées de faire leurs transactions bancaires en groupe », indique Asrani Gopaul. Il déplore aussi le manque de civisme : « Jadis les aînés étaient considérés comme des institutions et on les respectait. Aujourd’hui, ce sont des victimes. Je suis d’avis qu’il faut revoir notre modèle de société pour réintégrer les seniors afin qu’ils se sentent en sécurité. Pour cela, il faut de la volonté et du respect. » Selon lui, les travailleurs sociaux ont un grand rôle à jouer. Ils peuvent encadrer nos aînés. Ceux-ci, affirme-t-il, « ne peuvent pas être livrés à eux-mêmes maintenant, car c’est eux qui se sont occupés de nous quand nous étions petits ».
Les visites à domicile
Magalutchmy Cunjamalay est la présidente de l’Elderly Watch de Rivière-des-Anguilles. Elle indique qu’elle fait régulièrement des visites à domicile aux personnes âgées en détresse, accompagnée par des officiers de la Sécurité sociale et des policiers. « Quand on nous signale des cas de maltraitance envers les seniors par leurs enfants, nous intervenons. Pour nous, c’est la sécurité des aînés qui doit primer », ajoute-t-elle.
Prem Seebaruth : « Laissez-nous vivre en paix. Nous avons travaillé dur toute notre vie »
« Changez votre mentalité et n’oubliez pas que vous aussi, vous avez une maman, une grand-mère, un grand-père ou d’autres proches qui sont âgés »
Et les personnes âgées dans tout ça ? Que pensent-elles de cette recrudescence dans le nombre de vols avec violence envers elles ? Prem Seebaruth est le président du Senior Citizen Council. Il indique que plusieurs causeries sont organisées, en collaboration avec la police, entre autres, pour sensibiliser les personnes âgées sur les précautions à prendre.
Indigné par la situation, il lance un appel aux personnes qui commettent cette agression : « Laissez-nous vivre en paix. Nous avons travaillé dur toute notre vie. Aujourd’hui, on a droit à une belle pension avec laquelle nous vivons. Changez votre mentalité et n’oubliez pas que vous aussi, vous avez une maman, une grand-mère, un grand-père ou d’autres proches qui sont âgés. Nous comprenons que vous soyez en difficulté, mais ce n’est pas pour autant que vous devez vous attaquer à nous. Quand les personnes âgées sont victimes de vol, surtout avec violence, elles sont traumatisées à vie. »
Des services user-friendly proposés par des fournisseurs de caméras de sécurité
« Grâce à des applications installées sur votre téléphone ou ordinateur portable, il est possible de surveiller votre maison en direct »
Security & Alarm System Co. Ltd propose des solutions et des services intelligents depuis 10 ans. Ce fournisseur propose également des produits user friendly, faciles à utiliser et qui ne nécessitent pas forcément une grande maitrise de la technologie, notamment le Remote Viewing. C’est l’une des options les plus populaires chez les fournisseurs de caméras de sécurité, explique Omar Lalloo, Project Engineer chez Security & Alarm Co.Ltd. « Le Remote Viewing est devenu une option de base de la CCTV. C’est ce que nous faisons depuis plus de 10 ans. Les fonctionnalités sont faciles à utiliser en quelques clics. Grâce à des applications installées sur votre téléphone ou ordinateur portable, il est possible de surveiller votre maison en direct. Depuis 2008, les caméras de sécurité avec l’option Remote Viewing sont passées de Rs 120 000 à Rs 30 000. Le prix est désormais plus accessible », fait-il ressortir.
Il explique que, depuis cinq ans déjà, les caméras de sécurité dotées de technologie d’IA (intelligence artificielle) sont devenues plus abordables. « Ce type de caméras avec intelligence artificielle possède d’innombrables fonctionnalités, comme la détection d’apparence, entre autres. De plus, les alertes peuvent être combinées avec la sirène, la lumière ou simplement des alertes SMS. L’option de reconnaissance faciale facilite la tâche des policiers pour retrouver les voleurs. Cette technologie est à la portée de tout le monde, car à notre niveau, on fait le nécessaire selon le budget de nos clients », conclut-il.
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