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Violence sociale - Punition corporelle à l’école : 15 cas en 2018

Punition corporelle

Dans la nuit du 29 au 30 novembre derniers, l’Assemblée nationale française a adopté une loi interdisant les « violences éducatives ordinaires ». Maurice n’est pas en reste. Il existe les Education Regulations de 1957 qui proscrivent le châtiment corporel à l’école. Mais la pratique est loin d’avoir disparu, si on s’en tient à la quinzaine de cas recensés pour 2018. Comment offrir à nos enfants une éducation sans violence ? Le point dans le dossier qui suit.

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La situation à Maurice

Le ministère mauricien de l’Éducation a enregistré une quinzaine de cas de punitions corporelles pour l’année 2018. Ce ne sont là que les cas qui sont rapportés, précise un responsable. Pourtant, il existe les Education Regulations de 1957 qui proscrivent tout châtiment corporel. « No corporal punishment shall be inflicted on any pupil in any school », stipule la section 13(4) des regulations.

Les responsables du ministère émettent régulièrement une circulaire en guise de piqûre de rappel à l’intention des enseignants des écoles et des collèges. « The Child Protection Act 1994, para. 13 (1) provides that: - “Any person who ill-treats a child or otherwise exposes a child to harm shall commit an offence », peut-on lire dans le document.

Malgré tout, il existe toujours des cas impliquant des élèves ayant reçu des gifles, des fessées et d’autres sanctions de la part de leurs enseignants. D’ailleurs, dans la mesure où un élève reçoit un châtiment corporel à l’école, le cas doit être immédiatement rapporté au ministère. Le responsable de l’établissement doit s’assurer d’avoir une explication écrite et que des actions soient prises.

Loi adoptée en France

Une proposition de loi interdisant les « violences éducatives ordinaires » a été adoptée à l’Assemblée nationale française, en première lecture, par 51 voix contre une et face à trois abstentions. La France serait d’ailleurs l’un des cinq derniers pays d’Europe à se doter d’une telle loi.

Concrètement, il n’est plus permis de donner une fessée à son enfant, de le gifler et de lui crier dessus. Il est également interdit de lui dire qu’il est nul, qu’il n’est pas capable de réussir, qu’on ne l’aime pas et qu’on regrette de l’avoir fait. Tout ce qui relève de l’humiliation est proscrit.

Cependant, il y a encore des résistances sur la question. Environ 85 % des Français disent avoir déjà donné une claque ou une fessée à leurs enfants. L’idée qu’un père ou une mère fasse ce qu’il ou elle veut avec « ses » enfants perdure. (Source : Internet)

Ce que prévoit le protocole 

Selon le protocole établi, chaque cas doit être traité avec sérieux. Lorsqu’il est confirmé, l’enseignant est officiellement avisé de ses responsabilités. Il est rappelé à l’ordre par écrit. Une médiation se tient aussi entre l’école et les parents. Cependant, il faut s’assurer que toutes les conditions sont respectées avant d’appliquer la loi.

Un préposé du ministère souligne que pour tous les cas rapportés, une enquête est ouverte au sein de l’établissement concerné. Le protocole veut que chaque cas signalé soit rapporté par le chef d’établissement au ministère. Il revient au responsable de l’établissement de veiller à ce que les conditions soient suivies à la lettre. Ce n’est qu’après enquête que des actions sont prises.

«Il faut définir des paramètres», disent des enseignants

Krishan Kurmoo, qui est instituteur, a un avis mitigé sur la question de la punition à l’école. « De nos jours, tous les enfants connaissent leurs droits. Ils n’ont pas peur de leurs profs. Ils réagissent comme ils veulent. Souvent, les parents leur conseillent sur la manière de piéger un prof… »

Selon lui, « un ou deux coups de bâton ne tueront ni ne traumatiseront un enfant. En revanche, cela permettra au prof d’imposer le respect. Les enseignants savent bien quand gâter un enfant et quand le corriger ». D’un autre côté, Krishan Kurmoo est contre le châtiment corporel à l’école, parce qu’autrefois, dit-il, il y avait des abus et certains enseignants faisaient subir des atrocités aux élèves.

Bhojeparsad Jhugdambee, président de l’Union of Private Secondary Education Employees (UPSEE), se dit contre les punitions corporelles. Il est convaincu que cela a de graves conséquences sur l’enfant. Il croit dans le dialogue et la sagesse de l’enseignant pour trouver des solutions. « Si vous favorisez le dialogue avec un enfant, cela devrait marcher. Au cas contraire, il faut appeler les parents pour décider de la marche à suivre. Pourquoi ne pas avoir recours aux classes d’arrêt ? »

Le président de l’UPSEE conseille aussi aux jeunes profs de faire très attention lorsqu’un élève se comporte mal. « Il faut apprendre à maîtriser sa colère. Les enfants sont de plus en plus provocateurs. Il faut agir de façon professionnelle pour gérer la situation. »

Raison pour laquelle il insiste sur la nécessité de définir des paramètres. « La loi dit que la punition corporelle est interdite, mais ce n’est pas explicite. Donner 500 lignes à copier est aussi une forme de punition corporelle si l’enfant vient rapporter qu’il a mal aux doigts ou au cou. »

Les enseignants s’accordent à dire qu’il faut d’abord comprendre l’enfant, lui parler, apprendre à connaître sa situation à la maison et en dehors de l’école. L’enfant suit l’exemple. Il faut le respecter pour qu’il puisse, à son tour, respecter les autres. Il faut aussi dialoguer avec l’enfant en lui demandant ce qui est bon ou mauvais pour la société.

Rozy Khedoo, travailleuse sociale à Baie-du-Tombeau, est d’avis que la colère apporte trop de blessures à l’enfant. « Les enfants n’ont pas besoin d’être battus pour comprendre les choses. Je préfère un dialogue franc et sincère et la punition restrictive pour l’amener à comprendre. Je dis toujours aux parents : ‘Si vous ne voulez pas être blessé, ne blessez pas votre enfant. »

Celle qui travaille auprès des jeunes conseille de punir l’enfant en le privant de ce qu’il aime, comme son téléphone. On peut aussi le priver de sorties ou exiger qu’il rentre à des heures fixes.


Virginie Bissessur, psychologue clinicienne : «Les fessées ont un effet dévastateur sur le développement du cerveau»

virginieFaut-il avoir recours à la fessée pour corriger un enfant ?
Absolument pas. Un enfant n’a pas le même cerveau qu’un adulte. Son cortex n’est pas encore fonctionnel avant sept ou huit ans. Il ne lui permet pas de maîtriser ses émotions. Donc, on lui demande de se contrôler alors qu’il n’en a pas les moyens.

De plus, quel est l’exemple qu’on donne de la maîtrise de soi quand on en vient à frapper ? Les récentes études prouvent que les raclées et les fessées entravent le développement normal du cerveau d’un enfant. Il existe d’autres moyens de l’inciter à obéir.

Que proposez-vous comme options aux parents pour faire comprendre à un enfant qu’il doit obéir ?
La discipline positive nous éclaire de ce côté. On peut imposer des limites sans violence. Quand l’enfant fait une bêtise, on lui rappelle le règlement et on peut lui demander ce qu’il compte faire pour rattraper son erreur. Vous serez étonné de voir les réponses pleines de bon sens que peuvent fournir les enfants. Si l’enfant s’entête ou provoque, on peut aussi appliquer des punitions, toute proportion gardée.

Quels sont les effets de la fessée sur l’enfant ?
Les dernières études en psychologie soulignent l’effet dévastateur des fessées sur le développement du cerveau et, plus précisément sur certaines parties du cerveau, notamment celles chargées de contrôler les émotions. Dans les cas de grande maltraitance, cela se voit à l’œil nu sur les images médicales. Bref, toute forme de violence envers les enfants les ampute de leur potentiel de développement.

Est-ce qu’il peut le reproduire, voire faire pire dans sa vie d’adulte ?
Ce n’est pas une généralité mais il arrive que les enfants ayant subi des maltraitances et qui n’ont pas eu la chance d’être protégés et écoutés reproduisent ces violences quand ils atteignent l’âge adulte. C’est surtout dû au fait que ces enfants n’ont pas eu la possibilité d’exprimer leur souffrance et de trouver des personnes bienveillantes sur leur route.

Pensez-vous qu’un enfant pourrait abuser de la loi pour agir à sa guise ?
Les droits des enfants vont de pair avec des devoirs. Il est facile pour un enfant de dire qu’il connaît ses droits mais il a aussi le devoir d’être respectueux envers les adultes et ses parents. De toute façon dans toute relation, le respect doit être à double sens. Un parent ne peut exiger l’obéissance s’il ne respecte pas les besoins affectifs de son enfant.

 

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