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Vijranand Kallooa : l’enfant des champs devenu maître des fourneaux

Il est fier d’avoir pu assurer l’avenir de sa famille.

Né dans les champs, Vijranand Kallooa est devenu un chef reconnu internationalement. Grâce à sa passion, sa discipline et sa soif d’apprendre, il inspire aujourd’hui les jeunes générations.

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Dans les sillons brûlants de Caroline, petit village battu par le vent au cœur de l’île Maurice, un enfant d’ouvriers agricoles rêvait en silence. Il ne savait pas encore lire les cartes, mais il savait déjà où il voulait aller : plus loin que les champs, plus haut que la canne, plus large que l’horizon qu’on lui traçait.

À 67 ans, titulaire du titre World International Chef, Vijranand Kallooa peut regarder derrière lui et sourire : il a parcouru un demi-siècle d’excellence culinaire à travers les continents, des cuisines modestes de Belle-Mare aux prestigieux concours internationaux où il a siégé en tant que jury. « Je suis né dans les champs, j’ai grandi dans les cuisines », dit-il avec ce sourire tranquille de ceux qui ont tout traversé.

Le début ? Brut. Terrien. Dès son Certificate of Primary Education (CPE) en poche, Vijranand Kallooa, l’aîné d’une fratrie de huit enfants, rejoint ses parents dans les champs. Les journées commencent à l’aube, la machette à la main. Il sarcle, récolte, transpire. « C’était l’époque des coupes à la main. J’ai appris le respect du travail et de la terre là-bas. »

Mais la vie, parfois, ouvre des portes inattendues. En 1975, il entre dans un hôtel de la côte Est avec son père. Leur premier job ? Servir le thé. « On faisait un peu de tout. Éplucher les légumes, laver la vaisselle, nettoyer les plans de travail… Rien ne me faisait peur. » Dans l’arrière-cuisine, Vijranand Kallooa observe, apprend, absorbe. Il n’a pas de diplôme, mais il a une arme redoutable : la volonté.

Son sérieux attire l’attention. En 1979, il est recommandé pour intégrer l’École Hôtelière des Casernes à Curepipe. « Reprendre les études après le CPE, c’était un défi. Mais je voulais y arriver. » Il y parvient brillamment, puis grimpe les échelons : commis, sous-chef, chef exécutif. Chaque poste devient un tremplin, chaque obstacle une leçon. « Je voulais pouvoir rédiger mes menus, envoyer des mails aux directeurs. J’ai appris l’anglais, le français, la bureautique. J’ai tout fait par moi-même. » 

Sa curiosité insatiable le pousse à franchir les frontières : formations en France, Belgique, Inde, Malaisie, Afrique du Sud, Japon… Partout, il perfectionne son art, affine son palais, noue des amitiés gastronomiques, laisse une impression forte de professionnalisme et d’humilité. Il devient jury pour plusieurs concours gastronomiques internationaux, une consécration pour celui qui, adolescent, récoltait encore les légumes à l’aube dans les champs familiaux. On lui décerne plusieurs trophées et médailles, tant à Maurice qu’à l’étranger, jusqu’à recevoir le prestigieux titre de World International Chef, une reconnaissance rare dans ce domaine.

Installé dans sa maison à Caroline, fidèle à ses racines, Vijranand Kallooa mesure aujourd’hui le chemin parcouru. Marié, il est père de deux garçons : l’un est banquier en Australie, l’autre, titulaire d’un master en informatique, vit à Maurice. « Mes enfants ont pu étudier, voyager. Moi, j’ai commencé en lavant des légumes. Je suis devenu chef avec un CPE. »

Sa plus grande force ? La soif de connaissance. Il lit toujours des livres de cuisine, des articles spécialisés, des essais sur la gastronomie moderne. « On n’a jamais fini d’apprendre », dit-il simplement. 
Vijranand Kallooa continue de transmettre, conseiller. À 67 ans, Vijranand Kallooa ne cherche pas la gloire, mais à inspirer. Ses médailles, ses certificats, ses titres ? Il les garde soigneusement rangés dans un classeur. « Ce ne sont pas les titres qui comptent, mais ce que tu en fais. J’ai toujours essayé de former les jeunes, de leur transmettre ce que j’ai appris, comme d’autres l’ont fait pour moi. »

Il reçoit encore des appels d’hôtels et d’écoles de cuisine pour donner des conférences, animer des ateliers, partager son expérience. « Je leur dis toujours : même si vous n’avez pas beaucoup de diplômes, si vous avez la volonté, la discipline et l’amour de ce que vous faites, vous pouvez aller loin. »

Et son plus beau trophée ? Il sourit : « C’est quand un ancien apprenti m’appelle pour me dire : “Chef, grâce à vous, j’ai réussi.” Là, je sais que j’ai fait ma part. »

Vijranand Kallooa n’est pas simplement un chef. Il est une leçon vivante. Une preuve que la passion, l’endurance et l’envie d’apprendre peuvent transcender les origines, les diplômes et les frontières. Un homme né dans les champs, devenu citoyen du monde, à force de couteaux bien affûtés… et d’un cœur immense.

Ajagen Koomalen Rungen et Azeem Khodabux 

 

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