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Une vie de SDF : Gerald, 29 ans, et son pari pour sortir de la rue 

Avec l'aide des travailleurs sociaux, Gerald a décroch◙é une entrevue et un emploi dans l'hôtellerie.

À 29 ans, ce jeune homme a passé plus de nuits à errer dans la rue qu’à apprécier une vie de famille. Ce n’est pas pour autant qu’il a baissé les bras. Bien au contraire, malgré tous les aléas de la vie, il veut prendre sa revanche même s’il a connu plusieurs échecs. Pensionnaire d’un abri de nuit, il vient de trouver un travail à plein temps qui lui permet aujourd’hui de rêver à une meilleure vie. 

Quand la vie vous donne des raisons de croire que de belles choses vous attendent malgré toutes les difficultés que vous avez pu rencontrer, c’est le temps de l’espoir. C’est ainsi que Gerald P. aborde la vie. SDF depuis toujours, il habite en ce moment à l’abri de nuit de St Jean. Son objectif est d’arriver à trouver une maison dans trois ans pour « enfin vivre », car pour le moment, il ne fait que « survivre », mais ne veut pas en rester là. 

Pour comprendre son histoire, il faut remonter à son enfance. Gerald est enfant unique. Lorsque son père délaisse sa mère, cette dernière en difficulté financière ne peut pas s’occuper de lui. Ainsi livré à lui-même, il devient un prédateur des rues. Les officiers responsables de la protection des enfants finiront par le placer dans un centre d’accueil, le taxant, avec de ‘Child Beyond Control’. Contrairement à ce que vous pouvez penser, cela le réjouit. « Je n’étais point triste de me retrouver loin de ma mère. Elle ne s’occupait pas de moi. » À 12 ans, ses épaules étaient trop frêles pour assumer ce rôle d’homme de la maison. Il n’a pas cessé de fuguer pour ne pas regarder la misère autour de lui. Une fois arrivé au centre d’accueil, il s’est fait des amis.  Il est nourri, a des vêtements propres, des jouets et des cahiers. Toutes ces choses lui plaisent, cependant, il dira « qu’il n’y avait pas d’amour ». 

Mo ti pe bizin kre enn zistwar parski seki nou viv personn pa anvi tande.»

Il passera huit années dans ce centre d’accueil qu’il considérait comme « une famille artificielle où chaque mois on changeait de frères ». C’est ainsi qu’il décrit avec tristesse le sentiment qui l’habitait quand l’un de ses compères ou un confident quittait le centre.  « À chaque fois que l’un d’eux partait, je commençais à ranger mes affaires dans un sac et je disais à mes amis que je serais le prochain à partir. Je pensais que ma mère viendrait me chercher. Mo ti krwar mo pou mank li. Selma sak nwel pase, sak banane pase, mo la mem ek mo ti sak apandan dan larmwar. Il m’arrivait d’inventer des choses. Par exemple, je racontais à mes amis que j’avais vu ma mère et qu’elle m’avait apporté diverses choses et des jouets. Mo ti pe bizin kre enn zistwar parski seki nou viv pou de vre personn pa anvi tande. Zot tou ti parey kouma mwa ek sepa latristes ki mo ti anvi partaz ek zot. » 

Abandonné une deuxième fois à 18 ans 

Lorsqu’il atteint sa maturité, n’étant plus légalement considéré comme un enfant, il doit quitter le centre. « Oui, on nous préparait, mais si sur les feuilles de papier, les officiers écrivaient des rapports interminables pour raconter nos vies et nos états d’âme, cependant ils étaient loin de refléter ce que l’on ressentait vraiment. Je me rappelle que lorsqu’on parlait de moi, on disait il était temps que l’aigle s’envole de ses propres ailes, mais des ailes je n’en ai jamais eu, avais-je envie de crier. Mo mama finn koup li kan li ti nepli la pou mwa ek enn sertin moman monn senti ki mo pou anvole be kan plas ki mo finn reste pandan huit an pe dir mwa ale, mekanims mo lezel napa kapav fonktione. Me ki mwete mwa pou al dir zot tou sa la ? », se remémore-t-il.

Derrière ses paroles profondes, se cache non seulement une âme blessée, mais également  un homme qui pense, qui existe, qui vit.  Exister c’est tout ce que Gerald a voulu toute sa vie. Après son départ du centre, il décide d’emménager avec la première femme qu’il rencontre. « Mo rod enn lakaz nou reste, deswit mo anvi gayn enn zanfan, fond enn fami, rod seki mo pann gagner ». Cependant, cela ne fonctionnera pas. Incapable de travailler «  parski mo pa tinn ena lamour pou seki mo ti fer », il va essayer de gagner sa vie juste pour se nourrir. Il habitera « parsi parla kot so lipie amen li » pendant des années avant de décider de frapper à la porte des associations. Cela fait quelques semaines qu’il est maintenant pensionnaire d’un abri de nuit. « Je rentre avant sept heures et je dois quitter les lieux à huit heures. Je peux prendre un bain, dormir et avoir des repas. Je ne demande rien de plus ». 

Avec l’aide des travailleurs sociaux, il a décroché une entrevue, suite à laquelle il a obtenu un  nouvel emploi dans le domaine de l’hôtellerie. Il va commencer la semaine prochaine. « C’est vraiment l’univers dans lequel je voulais travailler, mais quand je me regardais dans le miroir, je me disais que je n’étais pas assez bien pour eux. Aujourd’hui, j’ai envie de me donner une chance », dit-il. 

Gerald semble être bien parti. Il a, cependant, besoin d’un coup de pouce : quelques vêtements, une paire de chaussures, un sac à dos, un peu de sous pour les premiers jours de transport et pour son déjeuner ainsi que « d’un vieux téléphone pour qu’il soit joignable quand on fait appel à lui ». Comme il ne dispose pas de moyens de communication, si vous souhaitez lui venir en aide, appelez à la rédaction au 207 0666. 

 

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