
Ils étaient pleins d’espoir, mais se retrouvent aujourd’hui dans le flou. Lancé en 2023 par l’ancien ministre de la Santé, le Dr Kailesh Jagutpal, le programme TAVI (Transcatheter Aortic Valve Implantation) avait pour but d’offrir une intervention cardiaque innovante aux patients souffrant de sténose aortique sévère. L’objectif : leur permettre de vivre sans les complications de santé liées à une valve défectueuse. Mais un an plus tard, six patients sont toujours en attente d’être opérés, sans informations claires sur la suite du programme.
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Babita* (prénom modifié), habitante de Mont-Roches, fait partie des premières personnes à avoir été sélectionnées pour bénéficier de l’intervention. Depuis, elle attend. « Cela fait un an que j’attends d’être opérée. À chacun de mes rendez-vous au Centre cardiaque Center de Pamplemousses, on me fait comprendre que la décision n’a pas encore été prise. Je me sens perdue car j’avais l’espoir de retrouver une meilleure santé. Comme moi, il y a encore d’autres personnes qui attendent », confie-t-elle.
Pour comprendre la situation, nous avons sollicité des éclaircissements auprès du ministère de la Santé. Le Dr Sholan Bunwaree, responsable du programme et présent lors de son lancement en 2023, explique que même si aucune opération n’a été programmée pour cette année, le projet n’a pas été abandonné pour autant. « L’année dernière, nous avons pratiqué des interventions complexes sur quelques patients et, pour 2025, le programme tient toujours. Cependant, il faut savoir que c’est une équipe américaine qui se déplace pour ces interventions, et cela dépend aussi de leurs disponibilités », dit-il.
Selon lui, les opérations TAVI nécessitent une logistique bien précise et du matériel spécifique. À Maurice, les hôpitaux ne disposent pas d’équipements nécessaires ni de valves elles-mêmes. Le partenariat avec une équipe médicale américaine permet toutefois de réaliser entre six et huit interventions par mission, sans compter les cas jugés urgents ou complexes. « Pour préparer une éventuelle venue, cela demande une certaine logistique mais aussi la disponibilité des médecins. Nous ne disposons pas des équipements ni de la valve à Maurice, raison pour laquelle cela demande une certaine préparation », précise le Dr Sholan Bunwaree.
Le TAVI, ou implantation transcathéter de la valve aortique, est une procédure moins invasive que la chirurgie à cœur ouvert. Elle consiste à insérer une nouvelle valve cardiaque à l’aide d’un cathéter, souvent introduit par l’artère fémorale. À Maurice, cette initiative est menée en partenariat avec l’équipe américaine, dans laquelle figure le Dr Kapildeo Lothun, qui connaît bien le contexte local pour avoir exercé au sein du Centre cardiaque de Pamplemousses.
Le Dr Bunwaree se veut rassurant : « Nous ne donnons aucune date aux patients, mais le projet tient toujours, car l’équipe ne vient pas seulement pour le TAVI mais aussi pour couvrir d’autres procédures complexes nécessitant une autre expertise. » Il insiste sur le fait que la conjoncture internationale influence la venue de cette équipe, mais que les préparatifs sont en cours.
Les maladies cardiovasculaires à Maurice
Un mal silencieux mais bien réel
En 2021, les maladies cardiovasculaires ont représenté l’une des premières causes de mortalité à Maurice, avec 3 554 décès enregistrés, soit un taux brut de 279 décès pour 100 000 habitants. Ces chiffres, traduisent une réalité préoccupante pour un pays dont la population présente une forte prévalence de facteurs de risque : diabète, hypertension, obésité et sédentarité.
Parmi les statistiques les plus parlantes, on note une incidence standardisée de 625 nouveaux cas pour 100 000 habitants, ce qui reflète une augmentation des troubles cardiovasculaires dans les dernières années. De plus, 2 % des Mauriciens âgés de 30 à 70 ans présentent une probabilité de décès prématuré liée à ces pathologies, un chiffre stable mais qui reste élevé selon les standards internationaux.
À cela s’ajoute le fait que les infrastructures médicales spécialisées en cardiologie interventionnelle sont encore limitées. Le recours à des équipes étrangères, comme dans le cadre du programme TAVI, en est une illustration. Bien que les interventions à cœur ouvert ou par cathéter se soient développées, leur accessibilité reste conditionnée par la logistique, les équipements importés et la présence ponctuelle de spécialistes internationaux.

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