Révolution - ChatGPT : quand le secteur éducatif s’y met aussi 

• Une utilisation intelligente prônée  

Que certains soient en faveur de son utilisation et d’autres contre, ChatGPT s’est déjà immiscé dans le secteur éducatif depuis quelques mois. Des enseignants et des élèves y ont recours. Son utilisation n’est pas officiellement encouragée, mais elle n’est pas non plus découragée. Si les acteurs du secteur estiment qu’il peut être bénéfique, ils prônent néanmoins une utilisation intelligente. 

ChatGPT révolutionne plusieurs secteurs. Celui de l’éducation ne fait pas exception. S’il suscite à la fois crainte et fascination, des enseignants et des élèves l’ont essayé et adopté. Son utilisation n’est pas officiellement encouragée, mais il est très sollicité sur le terrain. 

Nelson, enseignant d’anglais, fait partie des adeptes. Il soutient qu’il l’utilise régulièrement pour donner des devoirs à ses élèves. « C’est un outil révolutionnaire. En un rien de temps, tout est prêt. Il suffit de demander ce qu’il faut et comment il faut et la chose est faite. Je l’utilise souvent pour les devoirs sur table et pour la correction des rédactions », dit-il. 

Kristen Nallan, enseignant au Bocage International School, confirme que cette intelligence artificielle accomplit ce qu’on lui demande. « L’International Baccalauréat (IB) a autorisé les élèves à l’utiliser pour rédiger leurs rédactions », indique-t-il, avant d’apporter une précision : « En revanche, il est nécessaire d’informer les élèves que l’IB ne considérera pas les travaux rédigés par cet outil comme étant les leurs. » 

L’enseignant souligne que les élèves peuvent utiliser cette intelligence artificielle pour avoir une idée de ce qu’ils doivent écrire. « C’est un guide. Au Bocage International School, on sait que les élèves utilisent ce logiciel pour pratiquement toutes les matières, mais ils doivent mentionner leurs sources d’information. » Il précise que les enseignants peuvent, eux aussi, utiliser cet outil pour préparer un « lesson plan » qui, en général, prend du temps. 

N’y a-t-il pas un risque que les élèves perdent leur soif de connaissances ou leur capacité d’analyse ? « Nous devons trouver des solutions pour que nos jeunes continuent à avoir la faculté de réfléchir et d’écrire. Mais il ne faut surtout pas interdire une innovation qui peut nous aider dans le futur », répond Kristen Nallan. 

Quid des cas de tricherie ? N’y a-t-il pas un risque ? « Il y a des logiciels qui aident à déterminer si un travail a été fait sur ChatGPT. Ceux qui pensent tricher doivent donc y réfléchir à deux fois », prévient Kristen Nallan. 

Qualité 

Arvind Bhojun, président de l’Union of Private Secondary Education Employee (UPSEE), est d’avis que l’outil est utile, mais que la manière dont on y a recours importe beaucoup. Il ajoute que cet instrument aide les étudiants dans leurs recherches, à condition qu’il soit bien utilisé. 

« Certains ne l’utilisent pas comme il faut. Nous nous sommes, par exemple, rendu compte que la qualité des devoirs des élèves plutôt paresseux a changé. Ils sont mieux rédigés. Lorsque nous leur demandons la raison de ce changement, ils ne peuvent pas répondre. Nous savons exactement ce qui s’est passé », souligne le président de l’UPSEE. 

En effet, les facilités qu’offre ChatGPT sont si nombreuses que certains élèves ont tendance à penser qu’ils peuvent commander des rédactions au logiciel, lui demander de faire leurs devoirs à leur place ou d’autres travaux de recherche sans que leurs enseignants ne le sachent. Ces derniers sont unanimes à dire qu’ils peuvent reconnaître qu’un devoir, par exemple, a été fait sur ChatGPT puisqu’ils connaissent le niveau de leurs élèves. 

Fort d’une riche expérience dans la gestion des ressources humaines, Rajendra Patil Hunma, Corporate Trainer en Leadership Development et ChatGPT, entre autres, est d’avis que cet outil peut s’avérer très bénéfique s’il est utilisé à bon escient. « Les choses ont changé. Ce qui se faisait à la maison en termes de devoirs a évolué. Avec les moyens existants, les élèves doivent faire des recherches et des réflexions à la maison, mais la pratique doit se faire en classe », explique le pédagogue. 

Il prend l’exemple des enseignants qui, grâce à ChatGPT, peuvent en seulement quelques secondes réaliser leur plan de cours et expliquer des concepts aux élèves. « L’outil permet aussi de générer des tests pratiques avec des réponses et des explications. Pour corriger une rédaction, ChatGPT peut examiner les idées en quelques secondes. » 

Par rapport aux craintes émises au sujet du développement des élèves, le pédagogue estime que, bien au contraire, cela les aide à développer leur capacité d’écriture et d’analyse. « J’encourage donc son utilisation, mais j’insiste qu’il faut le faire intelligemment », soutient le pédagogue.

Paroles aux élèves

Noor M. Ruhomally, élève au collège St-Esprit : « Un outil dangereux s’il est mal utilisé » 

« D’après moi, ChatGPT pourrait devenir un outil très dangereux s’il venait à être mal utilisé. C’est très préoccupant en ce moment. Des élèves pourraient se servir de cet instrument pour tricher durant les examens. Des employés pourraient l’utiliser pour réaliser leur travail. ChatGPT peut aussi représenter une menace pour certains métiers, tels que celui d’écrivain, de journaliste et d’enseignants, en raison de sa capacité à produire des centaines de lignes en moins d’une minute sur n’importe quel sujet demandé. En revanche, s’il est bien maîtrisé, il sera l’un des outils les plus puissants au monde. Il pourra nous aider sur le plan académique et social, en nous donnant des conseils et en nous apprenant de nouvelles choses. »

Ashita Seenundun, élève au Seewa Bappoo SSS : « Disponible 24 heures sur 24, contrairement aux enseignants » 

« Je trouve que ChatGPT est un outil essentiel à mes études. Il m’aide à obtenir des réponses personnalisées à des questions et à résoudre des problèmes en utilisant un langage naturel. Il m’aide également à comprendre des concepts complexes. De plus, ChatGPT est disponible 24 heures sur 24 et sept jours sur sept, contrairement aux enseignants. Néanmoins, il y a un risque qu’il crée une dépendance excessive chez les jeunes utilisateurs. Ce qui pourrait réduire leur capacité à analyser les problèmes et à trouver des solutions par eux-mêmes. Cette intelligence artificielle, bien qu’étant très utile, a ses limites. Elle est incapable de comprendre les émotions et elle est dépourvue du facteur humain, qui est essentiel dans l’éducation. ChatGPT ne peut pas remplacer une interaction en face-à-face avec un enseignant qui guide et qui apporte un soutien émotionnel. »

Alexander Leste, élève du collège St-Esprit : « Quantité colossale de données lues et assimilées par ChatGPT » 

« De mon point de vue, ChatGPT n’est qu’un outil pour effectuer des tâches. Il ne nous aidera pas à développer nos sens intellectuels. On lui pose des questions et il répond. Le résultat est souvent étonnant lorsque, par exemple, on lui demande des textes ‘écrits dans le style de [telle personne]’ ou quand on l’interroge sur des questions techniques complexes. Cela illustre de manière publique les progrès importants des techniques connues sous le nom commercial d’IA, ainsi que la quantité vraiment colossale de données que ChatGPT a lues et assimilées. »

Tanya Gunnoo, élève du Forest-Side SSS : « L’Homme deviendra insignifiant sur terre s’il perd sa soif de connaissances » 

« J’utilise ChatGPT à certains moments. Il me permet d’obtenir rapidement des réponses et des informations sans nécessiter une recherche exhaustive, que ce soit pour des questions précises ou pour des détails concernant un sujet spécifique. De plus, il me permet d’explorer plus facilement plusieurs domaines en fournissant des informations générales. Cela favorise ma capacité d’acquérir des connaissances, tout en obtenant des perspectives variées. À première vue, ChatGPT semble très intéressant. Le problème est qu’il peut favoriser la perte de ce qu’on appelle l’artisanat. Il pourrait être un danger pour l’être humain. Si un jour l’Homme perd à la fois sa soif de connaissances et sa capacité intellectuelle, il deviendra la créature la plus insignifiante de la planète. »