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Projet de loi à l’Assemblée nationale - Révision du Code de la route : entre mesures dissuasives et chaos anticipé

Le Road Traffic (Amendment) Bill sera présenté en deuxième lecture à l’Assemblée nationale ce mardi.

Le projet de loi visant à amender le Road Traffic Act suscite débats et préoccupations alors qu’une série d’amendements, incluant une augmentation du montant des amendes et l’élargissement de la liste des infractions cumulatives, est prévue. Ces changements, qui seront soumis à une deuxième lecture ce mardi à l’Assemblée nationale, introduisent la possibilité de suspension du permis de conduire pour certains délits cumulatifs. 

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Une quarantaine d’amendes seront bientôt revues à la hausse et la liste des délits cumulatifs a été rallongée pour en contenir 32 au lieu de 11. Ces amendements prendront effet une fois que le Road Traffic (Amendment) Bill, qui sera présenté en deuxième lecture à l’Assemblée nationale ce mardi 25 juin 2024, aura été voté. 

Lors d’une conférence de presse à Port-Louis le vendredi 21 juin, le ministre du Transport et du Light Rail, Alan Ganoo, a annoncé « le risque de la suspension du permis de conduire pour les Cumulative Road Traffic System ». Il a précisé que sept infractions, parmi les nouveaux délits inscrits sur la liste, concernent les motocyclettes et les mobylettes. Si certains voient dans cette révision du Code de la route des mesures salutaires, convaincus qu’elles auront un effet dissuasif, d’autres, en revanche, redoutent un chaos. 

Alain Jeannot, président de l’organisation non gouvernementale Prévention Routière Avant Tout (PRAT), est de ceux qui accueillent favorablement ces amendements. « Réviser à la hausse les amendes pour les infractions au Code de la route directement liées à la prévention des collisions est une mesure dissuasive courageuse. C’est salutaire parce que la situation de la sécurité routière à Maurice est inquiétante », dit-il. 

Pour étayer son argument, il s’appuie sur le fait que la police a servi 529 502 contraventions de janvier 2019 à décembre 2022, et ce malgré une circulation grandement réduite de mai 2020 à juin 2022 en raison des restrictions liées à la COVID-19. « Cela représente une contravention toutes les quatre minutes ! Cela indique clairement que le respect du Code de la route laisse à désirer », avance-t-il. 

Selon lui, ce manque de discipline pourrait bien contribuer au nombre explosif d’accidents, d’autant plus que le volume de véhicules motorisés augmente de 4 % chaque année. Il fait ressortir qu’en 2023, la route a été le théâtre de 36 400 accidents. Il ajoute qu’il y a eu une hausse de 13 % du taux de décès par 100 victimes au cours des quatre dernières années par rapport aux quatre précédentes. 

« Cela révèle une violence croissante des collisions. Or, la violence de l’impact est liée à la vitesse excessive. Cela justifie pleinement l’accent mis sur les amendes liées au non-respect des limites de vitesse, mais aussi celles relatives au port de la ceinture de sécurité », martèle Alain Jeannot. Il va plus loin et plaide pour une sensibilisation accrue et avant-gardiste couplée à ces amendements (voir encadré). 

Effet domino

Barlen Munusami, expert en sécurité routière, fait, lui, partie de ceux qui redoutent un chaos. Il s’attarde sur les infractions cumulatives. Selon lui, les 21 nouveaux délits inscrits sur la liste n’ont pas leur raison d’être. Il est persuadé que cela aura un effet domino sur l’ensemble du système. 

« Le permis à points a été remplacé par les Cumulative Road Traffic Offences. Les 11 infractions initiales figurant sur la liste passeront à 32. Le nombre de disqualifications créera un chaos parmi les conducteurs », estime-t-il. Il souligne que « des dizaines de milliers de personnes perdront leurs permis de conduire en raison des délits inscrits sur la nouvelle liste ». 

Barlen Munusami insiste sur le fait que les nouvelles infractions figurant sur la liste n’ont rien à voir avec la sécurité routière. « C’est juste une question de discipline. C’est un système qui va de pair avec un mécanisme permettant la réhabilitation des conducteurs. L’introduction de cette mesure aura définitivement un effet domino. Un bon nombre de conducteurs ne voudront pas payer la Fixed Penalty. L’affaire ira en Cour. Le système judiciaire finira par être engorgé au fil du temps », anticipe-t-il.

Ces 21 nouvelles infractions inscrites sur la liste des Cumulative Offences

  • Ne pas céder le passage en sortant d’une route de moindre importance et en entrant dans une route plus importante
  • Ne pas porter de vêtements de haute visibilité en tant que conducteur d’un cycle automobile
  • Ne pas porter de vêtements de haute visibilité en tant que conducteur d’un motocycle
  • Ne pas dépasser un véhicule sur la droite 
  • Enseigner à titre onéreux la conduite d’un véhicule à moteur sans permis d’instructeur
  • Entrave à la circulation en sens inverse lors d’un dépassement
  • Conduite ou déplacement sur un terre-plein central
  • S’arrêter sur un terre-plein central 
  • Permettre au véhicule de rester à l’arrêt sur un terre-plein central 
  • Transporter une ou plusieurs personnes dans la zone de ramassage ouverte d’un pick-up à double cabine ou d’un véhicule à double usage 
  • Auto-cycle et motocycle non équipé d’un rétroviseur de la manière prescrite
  • Conduire un motocycle à côté d’un autre véhicule à deux roues 
  • Rouler sur un motocycle à la hauteur d’un autre véhicule à deux roues 
  • Ne pas respecter les panneaux de signalisation en conduisant, en ne se conformant pas à la flèche de sélection de voie
  • Transporter plus d’une personne en tant que passager d’un cycle automobile
  • Transporter plus d’une personne en tant que passager sur un motocycle
  • Plaque d’immatriculation non conforme aux prescriptions 
  • Taille, affichage et espacement des caractères d’une plaque d’immatriculation non conformes aux spécifications prescrites 
  • Infraction à la discipline de la voie sur une route à deux chaussées 
  • Infraction aux conditions imposées par le commissaire de police lors de la participation à une course ou à une épreuve de vitesse entre véhicules à moteur sur une route
  • Participation à une course ou à une épreuve de vitesse entre véhicules à moteur sur une route sans le consentement du commissaire de police 

Accent sur une sensibilisation avant-gardiste 

Face au nombre d’accidents enregistrés d’année en année, Alain Jeannot plaide pour une sensibilisation accrue. « Il serait souhaitable que la révision des amendes soit soutenue par une sensibilisation accrue, bien ciblée et avant-gardiste. Il est décevant de constater que l’usage de la plateforme digitale est sous-exploité », constate le président de PRAT. 

Il prend l’exemple du site Web « respe.mu », de sa page Facebook, de sa chaîne YouTube et d’Instagram. Il fait ressortir que le site Web n’est pas alimenté régulièrement, alors que le développement de cet outil en 2020 était porteur d’espoir. « La dernière campagne qui y figure date de l’année dernière. Sa chaîne YouTube ne compte que 47 abonnés et sa page Facebook 23 000 followers, tandis que Le Défi Media Group a atteint un million de followers ! » dit-il.

  • LDMG

 

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