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Pouvoir d’achat vs Covid-19 - Compensation salariale : le gel de l’exercice réclamé en raison de la récession

Argent L'an dernier, un quantum de Rs 300 avait été accordé.

Les consultations tripartites en vue du paiement de la compensation salariale polariseront les débats la semaine prochaine. Si au niveau des syndicats, on propose un quantum de Rs 500 pour compenser la perte du pouvoir d’achat des Mauriciens, chez les entreprises, on se prononce pour le gel de l’exercice dans un contexte dominé par l’impact profond de la Covid-19. Mais, il reviendra au gouvernement de trancher sur la question.

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Rs 300

C’est le quantum de la compensation salariale accordé l’an dernier aux employés avec un salaire allant jusqu’à Rs 50 000 par mois. Un montant supérieur aux Rs 180 proposées par le patronat, mais inférieure à la demande oscillant entre Rs 600 et Rs 1 250 des syndicats en 2019.

Les consultations tripartites se tiennent cette année dans un contexte particulier, à savoir une nette détérioration de la performance des entreprises à cause de la Covid-19. À tel point que l’État a dû intervenir pour payer une partie des salaires. L’impact de la crise se ressent aussi sur les employés, qui ont vu leur pouvoir d’achat s’effriter avec la hausse des prix. D’ailleurs, à fin octobre, l’inflation s’élevait à 2,1 % contre 0,7 % durant le mois correspondant en 2019. Quant à l’inflation en glissement annuel, elle se chiffre à 3,2 % en octobre, selon les dernières données de Statistics Mauritius.

D’ailleurs, comme le souligne  Rajeev Hasnah, il y a une montée de l’inflation. Toutefois, l’économiste estime que c’est la santé économique du pays et des entreprises ainsi que la capacité à payer et le cash-flow des compagnies qui doivent être les premiers critères à être pris en considération lors des réunions tripartites. « Dans la situation délicate et inédite dans laquelle nous nous trouvons, c’est la santé, la stabilité et la viabilité des entreprises et de l’économie qui doivent être mises en avant », recommande-t-il.

L’industriel François de Grivel est du même avis. «  Nous sommes, depuis plusieurs mois, affectés par la pandémie et beaucoup d’activités tournent au ralenti. Dans un tel contexte, la relance économique, la réduction du chômage et la capacité des entreprises à faire face à leur obligation financière et  de production doivent être en première ligne. Une augmentation de salaires ne me paraît pas justifiée dans les conditions actuelles », soutient l’opérateur. Selon lui, toute augmentation est « délicate à accepter ». « Maintenir l’emploi avec les salaires actuels est mieux que la perte de certains emplois avec une augmentation de salaires. Dans le contexte actuel, il n’est pas souhaitable d’augmenter les coûts des entreprises pour des raisons politiques », argue-t-il. D’où son appel pour un gel de l’exercice dans l’optique d’une relance économique.

Quant à Rajeev Hasnah, il estime que le report de l’exercice aurait été idéal. « C’est mieux d’agrandir le gâteau avant de le partager que de le partager davantage au risque de ne plus en avoir. Que 2021 soit l’année de la reconstruction. Cependant, il faut arriver à une entente afin qu’en 2022 et 2023 la compensation qui sera fixée prenne en compte les sacrifices faites en 2021. C’est la solidarité nationale qui doit primer », préconise-t-il.  Une idée qui rejoint celle de François de Grivel. « L’effort doit être fait par l’ensemble des partenaires sociaux et, en particulier, les employés. Ceci permettrait de relancer en partie l’économie en prenant en considération que les frontières doivent être ouvertes dans les meilleurs délais », ajoute-t-il.

Du côté des petites et moyennes entreprises (PME), on ne cache pas son inquiétude autour du paiement de la compensation salariale. « Peu importe le montant qui sera décidé, ce sera très difficile pour les PME de payer la  compensation. Il faut que l’État soutienne les PME. D’une part, nous continuons à payer les salaires et à maintenir l’emploi. De l’autre, nous avons réduit nos prix de l’ordre de 25 % à 30 % pour être compétitifs. Si l’État nous aide au niveau du paiement du boni, on sera quelque peu soulagé financièrement », soutient Nadiim Bhoyroo, directeur de Hamilton Furniture et membre de la Fédération des PME.
Comme quoi, il est clair que la traversée du désert sera longue.

Ces dates à retenir

  • Lundi 23 novembre : En marge des consultations tripartites, le ministre du Travail, Soodesh Callichurn, présidera le Technical Committee. La directrice de Statistics Mauritius, Li Fa Cheung Kai Suet, sera aussi présente et annoncera le taux d’inflation pour 2020.
  • Mercredi 25 novembre : C’est le ministre des Finances, Renganaden Padayachy qui présidera les consultations tripartites ce mercredi où la question autour du quantum de la compensation salariale à accorder sera débattue.
Années* Montants obtenus
2010 3,5 % (jusqu’à Rs 12 000) et Rs 420 (salaire au-delà de Rs 12 000)
2011 3,2 % (salaire jusqu’à Rs 5 000), Rs 175 (salaire de Rs 5 000 à Rs 12 000) et Rs 190 (salaire entre Rs 12 000 et Rs 30 000)
2012 Rs 330 (salaire jusqu’à Rs 5 000), 6,6 % (salaire entre Rs 5 000 et Rs 7 000) et Rs 460 (entre Rs 7 000 et Rs 30 000)
2013 Rs 300 (salaire jusqu’à Rs 7 000), 4,3 % (salaire entre Rs 7 000 et Rs 8 000) et Rs 345 (salaire au-delà de Rs 8 000)
2014 Rs 300 (salaire jusqu’à Rs 8 100) et 3,7 % (salaire entre Rs 8 100 et Rs 20 000)
2015 Rs 600
2016 Rs 250 (jusqu’à Rs 10 000) et Rs 150 (au-delà de Rs 10 000)
2017 Rs 200 (salaire jusqu’à Rs 15 000) et Rs 125 (salaire entre Rs 15 000 et Rs 50 000)
2018 Rs 360
2019 Rs 400
2020 Rs 300 (salaire jusqu’à Rs 50 000)

*Années où les montants ont été payés.
Source : Ministère du Travail


Ce que réclament les syndicalistes

Rashid Imrith : « Des aides indirectes si la somme demandée ne peut être accordée »

« Nous n’avons pas fixé de quantum. Mais, si la somme demandée ne peut être accordée, il faudrait des aides « indirectes » comme une baisse des tarifs des services publics tels que l’eau et l’électricité », recommande Rachid Imrith. Le syndicaliste recommande que le Premier ministre préside les consultations tripartites. « Il pourra prendre des décisions immédiates. Il faudra aussi élargir le débat et y inclure l’aide aux entreprises en difficulté », préconise-t-il.

Reeaz Chuttoo : « Il faut considérer ceux qui sont dans le besoin »

Au niveau de la Confédération des Travailleurs du Secteur Privé, on réclame une compensation de Rs 500. « Certains travailleurs sont dans le besoin. Il faut considérer leur cas », insiste Reeaz Chuttoo. Interrogé sur les entreprises qui réclament le gel de salaires, il soutient : « Certaines entreprises ont raison quand elles disent qu’elles ne peuvent pas payer. C’est le cas pour le secteur hôtelier, où c'est déjà l’État qui paie les salaires ».

Ivor Tan Yan : « La compensation doit être à la hauteur de l’appauvrissement des Mauriciens »

Ivor Tan Yan est catégorique. «  Le taux d’inflation sera supérieur aux estimations prévues dans un contexte de récession et de chômage. Il y a eu une perte importante du pouvoir d’achat. Le taux de change – influé par le soutien financier de la BoM aux grandes entreprises et la hausse de la dette publique – a sévèrement impacté le porte-monnaie du Mauricien. Il faudra prendre tous ces facteurs en considération avant de fixer la compensation salariale qui doit être à la hauteur de l’appauvrissement des Mauriciens », réclame le syndicaliste.

 

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