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Myriam Narainsamy: aux petits soins

Myriam Narainsamy
Au début d’octobre, son engagement au service de la petite enfance lui a valu une distinction. À 78 ans, Myriam Narainsamy n’est pas près de tirer sa révérence. À un âge où on aspire à une retraite bien méritée, Myriam, infirmière puéricultrice, n’a pas un moment à elle. Entre ses activités sociales, les cours qu’elle dispense aux aspirants puériculteurs, ses recherches sur Internet et ses lectures, la septuagénaire vient de se lancer dans un ambitieux projet d’écriture, un livre hommage à France Boyer de la Giroday, pionnière du bénévolat et militante des droits de la femme. Le lundi 5 octobre, la Early Childhood Care & Education Authority Employees Union lui a témoigné  leur reconnaissance, gratitude et appréciation pour engagement exceptionnel, son dévouement et son soutien à la cause de la petite enfance. La sixième née de Soopaya Hervé et Idea Narainsamy a vu le jour et grandi au Ward IV à Port-Louis. Enfance heureuse certes, mais aussi difficile par manque de moyen. Son père, chauffeur et sa mère, femme au foyer, ne s’épargnaient aucun sacrifice pour que Myriam, ses frères et ses sœurs ne manquent de rien. Et surtout aucune concession pour l’éducation des enfants. L’éducation primaire se fera à l’école de Bon Secours et c’est au Collège Lorette de Port-Louis puis au collège Bhujoharry que Myriam terminera son School Certificate. « Le manque de moyens financiers m’a forcée à quitter le Collège Lorette pour fréquenter le collège Bhujoharry. Qu’à cela ne tienne, je comptais  parmi les meilleures », se rappelle-t-elle avec fierté. Déjà, dit Myriam, quand elle était à l’école de Bon Secours, son enseignante, Soeur Marie de Jésus, avait dit à ses parents qu’elle était « la plus intelligente de sa classe ».

Vocation d’infirmière

À l’âge de 14 ans, Myriam perd sa sœur. Un choc pour elle et sa famille. Un chagrin qui lui ouvre la voie. « Je m’étais alors promis que je serais infirmière pour soigner et soulager les souffrances des autres. » À 19 ans, contre l’avis de son père et de son frère Guy Narainsamy, Myriam s’engage en tant qu’étudiante. « C’était par vocation. Ma mère m’a encouragée et surtout soutenue dans mon choix. Elle savait que j’avais raison de m’engager dans cette voie. » Infirmière, Myriam le sera pendant plus de 40 ans. 40 ans à soigner, à soutenir, à soulager ceux dans le besoin. Et autant d’années aussi à s’investir dans le social. « Je ne compte pas le nombre de patients à qui j’ai tenu la main. Parmi, un jeune scout qui est mort d’une septicémie. Il est mort dans mes bras. Sa mort aurait pu être évitée, mais, par manque d’information, il n’a pas eu accès aux soins qu’il fallait au moment qu’il fallait. » Alors qu’elle était infirmière, Myriam a eu la chance de travailler avec France Boyer de la Giroday en tant que responsable du Day Care Centre pour les enfants de Bethléem situé au centre Misereor à Port-Louis. « Grâce à France Boyer de la Giroday et au diocèse de Port-Louis, j’ai décroché une bourse pour me parfaire en tant qu’infirmière puéricultrice. J’ai eu la chance de me rendre à Paris, en Grande-Bretagne et au Danemark. » À son retour, elle prend en charge le centre et assure la formation. Alors qu’elle ne devait y rester qu’une année, elle y passera quatre ans. « Après j’ai dû faire un choix qui n’a pas été compris par tous. Je suis retournée à mon premier amour. J’ai repris ma coiffe d’infirmière », nous confie Myriam avec un large sourire aux lèvres. Parallèlement à son dévouement à son travail, Myriam s’engage de plain pied dans le social. Elle devient membre de l’Association des femmes mauriciennes. D’ailleurs, elle en assumera la présidence plus tard. « J’ai fait beaucoup de lobbyings pour que le statut de la femme soit revalorisé. Une tâche pas facile, mais j’étais tenace. Je n’ai pas lâché prise », lance Myriam sur un ton espiègle. Elle s’engagera aussi dans la Mauritius Alliance of Women et militera aux côtés de Shirin Aumeeruddy-Cziffra, Lady Ursule Ramdenee, Lady Pushpa Burrenchobay et Gyan Ghoorah, entre autres. Myriam compte aussi parmi les membres fondateurs de Media Watch, siège sur le board du Shelter for Women and Children in Distress, est membre du Muvman Pou Liberasyon Fam, de Elderly Watch, du Macoss et du NGO Trust Fund pour ne citer que ceux-là. Très active, le travail ne lui fait pas peur. « Présidente, vice-présidente, secrétaire, trésorière... les responsabilités me conviennent. C’est ma seconde nature. » La famille aussi tient une grande place dans sa vie. « J’ai connu une enfance pauvre, mais l’amour ne manquait jamais dans notre petite maison. Ma mère faisait elle-même notre pain qu’elle confectionnait dans un « touk tol » trafiqué pour faire office de four. Elle préparait les nouilles qu’elle mettait à sécher et cuisinait ensuite. La soupe était préparée dans une large marmite en fonte que j’ai gardée. Nos vêtements étaient repassés à l’aide d’un fer qu’on chauffait au charbon. Les repas étaient préparés au feu de bois qu’on ravivait avec un poukni. C’est cela mon enfance. Je n’ai pas honte de la raconter. J’en suis même très fière. »

Femme indépendante

Myriam ne s’est jamais mariée. Et ce n’est pas parce qu’elle n’en a pas ressenti le besoin, c’est juste qu’elle était tellement occupée à changer la mentalité des autres, à s’engager et à aider qu’elle n’a pas vu le temps passer. « Maintenant en y repensant, je me dis que j’avais et j’ai toujours un caractère trop indépendant pour composer avec le mariage. Je ne me vois pas sous la domination d’un homme », lance-t-elle dans un grand éclat de rire. Elle aurait certes aimé connaître les joies de la  maternité. « C’est un plaisir que je vis par procuration, à travers les neveux et les nièces, les petits-enfants. Mais je n’ai aucun regret. » Myriam dédie son accomplissement à ses parents et aussi à France Boyer de la Giroday. « Elle m’a ouvert la voie, d’où ce livre hommage que je vais lui dédier. Je pense aussi à toutes ces femmes, qui comme moi, ont milité pour que le statut de la femme soit revalorisé. Aux jeunes d’aujourd’hui, Myriam conseille le respect, la discipline, le savoir-vivre. « Il faut un changement de mentalité. Je ne juge pas, mais parfois je suis choquée par certains comportements et langage. Je lance un appel aux parents pour qu’ils ne démissionnent pas devant leurs responsabilités. »
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