Live News

Me Vinod Boolell, ancien juge : «Un traité d’extradition n’est pas nécessaire pour envoyer quelqu’un vers un pays ami»

Me Vinod Boolell.

Maurice pouvait-il envoyer à La Réunion Jean Hubert Celerine, alias Franklin, et Jérémy Désiré Décidé, alias Nono, condamnés, en juillet 2021, à sept ans de prison dans un jugement prononcé en leur absence par le tribunal de Saint-Denis ?

Publicité

Pour l’ancien juge Vinod Boolell, la réponse est clairement oui. Et cela même si ce n’est que le 10 novembre 2022 qu’un traité d’extradition a été signé entre la France et Maurice. « Même en absence d’un traité formel, au nom des bonnes relations entre deux pays et en s’appuyant sur le principe de droit international, on peut extrader une personne vers le pays qui le demande. S’il y a une demande de la France pour envoyer Franklin à La Réunion pour purger sa peine, je ne vois pas où se situe la difficulté. D’ailleurs, Maurice est signataire de la Convention des Nations Unies sur la répression du trafic de drogue. Celle-ci demande aux pays signataires de coopérer en matière de trafic de drogue. Mais pour l’assistance mutuelle, il faut que les pays soient de bonne foi. On vient invoquer l’absence d’arrangement et de traité, mais il y a la Mutual Assistance in Criminal and Related Matters Act et diverses conventions auxquelles nous sommes signataires. » Les procédures administratives entre les deux pays sont actuellement au stade de finalisation dans le cadre de ce traité. 

Maintenant qu’il y a un traité d’extradition, il y a encore moins de raisons pour ne pas extrader ces deux personnes. « Le traité est là, les personnes concernées sont à Maurice aujourd’hui. La France demande leur extradition. Je ne vois vraiment pas ce qui peut empêcher l’exécution de cette demande. »

Quant aux raisons invoquées par Me Maneesh Gobin, Attorney General, lors de sa conférence de presse de mercredi 8 février, à l’effet que la confidentialité absolue doit être observée sur ce genre de dossiers, « car cela risque de mettre toute l’enquête en danger », Me Vinod Boolell nuance aussi. « En principe, quand il y a des requêtes de Mutual Legal Assistance, on n’étale pas ça en public pour que les personnes concernées ne soient pas mises au parfum. Mais, dans le cas Franklin, l’affaire est déjà publique. On sait qu’il est à Maurice, que ses avoirs ont été saisis et gelés par la Cour, qu’il a été condamné à La Réunion et qu’il y a une requête pour l’extrader vers La Réunion. Pour quelle raison faudrait-il observer la confidentialité sur ce dossier ? » s’interroge-t-il.

Me Milan Meetarbhan, constitutionnaliste et ancien Haut-commissaire de Maurice aux Nations Unies affirme que « le problème est que le gouvernement n’explique pas clairement ce qui se passe dans cette affaire. Personne ne veut dire officiellement ce qui a été demandé par la France. L’Attorney General est resté très vague. »

Me Meetarbhan avance que même sans traité d’extradition, rien n’empêche aux autorités mauriciennes d’extrader une personne condamnée vers un autre pays. « D’ailleurs dans beaucoup de cas, il y a des accords entre États qui permettent à un condamné de purger sa peine dans son État de résidence », explique-t-il. Peut-on dresser un parallèle avec l’affaire du Slovaque Peter Uricek, condamné dans son pays pour un délit de drogue, qui avait été expulsé du territoire mauricien le 26 avril 2022 pour être embarqué dans un avion du gouvernement slovaque à Plaisance ?

Me Milan Meetarbhan affirme qu’on « peut faire une comparaison dans la mesure où dans un cas, le gouvernement a donné des détails à travers un communiqué émanant du Bureau du Premier ministre, alors que dans l’autre, on parle de confidentialité. C’est au gouvernement de nous dire s’il y a eu une demande spécifique pour qu’il y ait une confidentialité sur un sujet qui n’était pas confidentiel auparavant ».

  • LDMG

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !