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Maurice critiqué après l’exportation de 500 singes vers les USA

Mansa Daby, présidente de l’ONG Monkey Massacre in Mauritius, dénonce l’opacité entourant l’exportation des singes mauriciens vers les laboratoires étrangers.

L’exportation récente de 500 macaques mauriciens vers un laboratoire californien met en lumière une activité discrète, mais sensible. Il s’agit du commerce de primates destinés à la recherche biomédicale. L’opération, révélée à la mi-septembre par l’ONG Action for Primates, suscite de nouvelles critiques d’associations locales et internationales, alors que Maurice occupe une place croissante dans cette filière.

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Selon les informations disponibles, ces singes ont été expédiés depuis la ferme d’élevage Les Campèches Ltée, à Rivière-Noire. Leur destination était Valley Biosystems, une entreprise contractuelle de Sacramento, spécialisée dans la fourniture de primates à des laboratoires. Le transport, d’une durée estimée à quarante heures, a impliqué un passage par Paris-Charles-de-Gaulle puis un acheminement vers Chicago avant d’atteindre la Californie. Ces conditions, qui combinent stress, confinement et multiples escales, préoccupent les défenseurs des animaux.

Cette opération ponctuelle s’inscrit dans un volume bien plus large. Durant le premier semestre de 2025, plus de 5 700 macaques mauriciens ont été exportés, principalement vers les États-Unis, mais aussi vers l’Europe. En juin, 1 459 spécimens ont été envoyés hors du territoire. Ces chiffres confirment le rôle central de Maurice dans le commerce mondial de primates de laboratoire, rôle qui reste méconnu par une grande partie du public.

Pour Mansa Daby, présidente de l’ONG Monkey Massacre in Mauritius, il est urgent d’ouvrir le débat. Elle rappelle que les États-Unis représentent la destination principale de ces exportations, avec environ 11 000 macaques importés l’an dernier sur les 15 000 expédiés depuis Maurice. « Derrière ces chiffres, il y a des animaux vivants, transportés sur de longues distances et destinés à des expérimentations qui font l’objet de contestations dans les pays importateurs », avance-t-elle.

La militante relève aussi une contradiction. Les États-Unis ont annoncé une feuille de route visant à éliminer progressivement l’expérimentation animale d’ici à 2035. Pourtant, Maurice continue à renforcer sa position de fournisseur. « Le précédent gouvernement avait parlé de réduire ce commerce. Aujourd’hui, non seulement il n’en est plus question, mais les discussions autour d’un Biomedical Hub montrent qu’il existe une volonté de développer encore davantage ce secteur », estime-t-elle.

Le projet de faire de Maurice une plateforme biomédicale refait surface à travers le Mauritius Institute of Biotechnology et des partenariats internationaux. Des sociétés de sous-traitance comme Clinglobal et Charles River, déjà présentes sur l’île, pourraient bénéficier d’un accès élargi à la ressource locale. Pour Mansa Daby, ce scénario fait peser des risques importants. « Nous passons du statut d’exportateur à celui de site potentiel d’expérimentation. Ce qui se fait sans débat public, alors que des expérimentations sur des chiens et des chats ont été recensées dans le passé. »

L’Animal Welfare Act de 2013 encadre l’expérimentation animale à Maurice et limite la pratique aux rongeurs, aux lapins et aux macaques. Des discussions récentes laissent entrevoir une révision du texte, pouvant élargir la gamme des espèces utilisées. Pour les ONG, il y aura une multiplication d’expériences controversées, alors que les alternatives scientifiques se développent rapidement : cultures cellulaires, organoïdes, bio-impression et modélisation informatique.

La question de l’utilité nationale de cette industrie est aussi posée. Maurice ne produit pas de médicaments et ses hôpitaux publics connaissent régulièrement des pénuries de traitements essentiels. « On parle de recherche biomédicale et de développement, mais ces activités profitent surtout à des compagnies étrangères. Pendant ce temps, les besoins de santé publique du pays ne sont pas comblés », fait observer Mansa Daby.

Les risques sanitaires ne sont pas négligeables. Les macaques peuvent être porteurs de maladies transmissibles à l’homme. Le transport massif d’animaux vivants sur de longues distances est considéré par plusieurs experts comme un facteur aggravant pour la propagation de zoonoses. Ces préoccupations sont partagées par des publications scientifiques internationales, qui alertent sur la vulnérabilité de la filière à des dérives ou à des circuits parallèles.

Les autorités mauriciennes, elles, se montrent prudentes. Le ministère de l’Agro-industrie a confirmé que les exportations étaient encadrées par des permis et des inspections vétérinaires, mais sans détailler les contrôles effectués ni les résultats des suivis sanitaires. Les fermes d’élevage, de leur côté, défendent leur activité en avançant que toutes les normes réglementaires sont respectées.

Cette discrétion officielle alimente la critique des associations. Elles réclament plus de transparence, notamment sur les conditions de transport, les taux de mortalité et les retombées économiques réelles pour le pays. « Si tout est conforme, pourquoi ces informations ne sont-elles pas publiées ? », demande Mansa Daby.

 

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