La Covid-19 laisse parfois des séquelles plusieurs mois après que le patient a été considéré guéri. Ceux qui en souffrent sont victimes de ce que l’Organisation mondiale de la santé appelle le « long Covid ».
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Selon les études cliniques effectuées jusqu’à présent, divers symptômes post-Covid ont été identifiés et font partie d’une liste non exhaustive de séquelles que subissent des personnes considérées guéries de la Covid-19. Ces patients se plaignent principalement de fatigue, d’une perte de l’odorat persistante, d’essoufflement, de palpitations, de pertes de mémoire et de douleurs musculaires. C’est ce que révèle le document Les effets cliniques à long terme de la Covid-19, publié par l’Organisation mondiale de la santé en collaboration avec EPI.WIN et Infodemic Management.
Selon le Dr Ramprakash Reesaul, consultant en charge en pneumologie au ministère de la Santé, le long Covid est observé chez des personnes ayant subi des complications après avoir été infectées par le coronavirus. « Il s’agit de complications respiratoires dans 30 % des cas, qui sont plus significatives chez les patients âgés, ceux qui ont une comorbidité ou qui ont été placés sous ventilation mécanique pendant leur traitement. Ils peuvent développer le long Covid », dit-il. Avec le temps, ces problèmes respiratoires peuvent provoquer une destruction du parenchyme pulmonaire (le tissu fonctionnel du poumon) et engendrer une fibrose pulmonaire.
En cas de fibrose pulmonaire, l’oxygène passe mal dans les alvéoles des poumons. Au moindre effort, le malade est donc essoufflé. Environ 5 % des patients ayant développé une forme grave de Covid-19 auraient ce problème dans le monde. Le Mauricien Kistnen Moutien en fait partie. Il doit être placé sous oxygène régulièrement après son séjour de plusieurs jours à l’unité des soins intensifs de l’hôpital SSRN à Pamplemousses en décembre dernier. Aujourd’hui encore, il vit avec les séquelles que la maladie lui a laissées.
Le Dr Reesaul affirme que la prise en charge du long Covid est assurée à Maurice. Ce sont les pneumologues des hôpitaux régionaux qui s’en occupent. Le bilan de santé effectué comprend un bilan sanguin, une radiographie des poumons et un test à l’aide d’un spiromètre pour évaluer la capacité respiratoire du patient. La distance que celui-ci peut parcourir en marchant et la baisse du niveau d’oxygène sont aussi vérifiées par le test dit Six minutes walk. « La prise en charge médicale dépend des symptômes et des pathologies des patients. Il y a aussi des neurologues, des physiothérapeutes, des nutritionnistes et des psychologues. Le service est disponible dans les hôpitaux depuis l’an dernier », précise le Dr Reesaul.
Traitement symptomatique
« Certaines personnes qui ont eu une forme sévère de la Covid-19, avec pneumonie et admission en soins intensifs, risquent de développer une fibrose pulmonaire, une péricardite ou une myocardite, voire une insuffisance cardiaque », explique le Dr Mita Ballysing. Les patients ayant subi des formes moins sévères de la maladie peuvent souffrir de symptômes qui perdurent, comme une fatigue chronique, un essoufflement, des difficultés de mémorisation et de concentration, ou des douleurs articulaires. Si certains symptômes s’installent durablement, d’autres sont transitoires. C’est le cas notamment de l’anosmie (perte de l’odorat), la plupart des patients retrouvant l’odorat (et le goût) au bout de quelques semaines.
Les personnes les plus à risque sont celles qui ne sont pas vaccinées, indique le Dr Ballysing. Le traitement, jusqu’à l’heure, reste symptomatique et pluridisciplinaire, car les médecins et les scientifiques sont encore en train d’étudier le long Covid.
Kistnen Moutien, 61 ans, de Sainte-Croix : la Covid-19 a détruit ma vie
Kistnen Moutien peut être considéré comme un survivant de la Covid-19. Quand il était hospitalisé en soins intensifs, en décembre dernier, il a vu partir plusieurs patients dans des sacs mortuaires. Ces scènes l’ont tellement choqué qu’il refusait de dormir. Aujourd’hui encore, il dit ressentir ce traumatisme, car il y a des jours où il croyait que ça allait être son tour de mourir.
À la fin du mois de novembre 2021, notre interlocuteur souffrait de fièvre et d’une bronchite. Il pensait avoir la grippe, vu que les tests de Covid-19 qu’il avait effectués s’étaient avérés négatifs. Mais quelques jours plus tard, quand il a consulté un médecin du privé parce qu’il se sentait affaibli, il a appris qu’il avait été infecté par le coronavirus. « Compte tenu de mon état, le médecin m’a conseillé d’aller à l’hôpital, où j’ai été admis. Après deux jours passés en salle, on a dû me transférer aux soins intensifs, car mon état s’était détérioré », explique-t-il. Là, il a été placé sous oxygène à haut débit.
N’ayant que peu d’espoir de sortir de l’ICU, il a eu la chance de quitter l’établissement hospitalier à la mi-décembre. Mais il constate qu’il n’est plus l’homme solide, affable et toujours prêt à aider les autres qu’il était. « Avant, je rendais visite aux personnes âgées et je m’occupais d’elles. Maintenant, j’ai moi-même besoin d’assistance », dit-il. Ses neveux l’aident dans son quotidien et il a aussi dû avoir recours à un garde-malade. « La fatigue fait que je dois me reposer constamment. Je ne peux plus faire des mouvements et m’adonner à mes activités comme avant. C’est difficile d’avoir une telle vie et de dépendre ainsi des autres. La Covid-19 a détruit ma vie, car je n’ai plus le même courage », déplore-t-il.
En plus de ses problèmes respiratoires, il suit un traitement psychiatrique, car le traumatisme qu’il a subi à l’hôpital est toujours présent. Aujourd’hui, la survie de Kistnen Moutien dépend d’un respirateur qu’il a pu obtenir après un appel lancé sur les ondes de Radio Plus, mercredi dans l’émission au Coeur de l’Info. « Je remercie tous ceux qui m’ont aidé à la suite de cet appel », dit-il.
Sandrine Emilien, 30 ans, habitante de l’Ouest : «Je ressens une fatigue inexplicable»
Sportive dans l’âme, Sandrine Emilien ne pensait pas que la Covid-19 allait autant avoir raison d’elle plusieurs mois après avoir été infectée par le virus en novembre dernier. « Étant très sportive, je sais faire la distinction entre une simple fatigue physique et un problème plus grave. J’avais aussi l’habitude de me sentir en forme après le travail. Mais là, même quand je ne fais rien, je me sens fatiguée et je ne peux pas résister au sommeil », assure-t-elle. Travaillant dans le tourisme, elle explique qu’avec le peu d’activité dans son domaine actuellement, elle ne travaille parfois que quelques jours par semaine. « Quand je suis à la maison, je peux dormir plusieurs heures d’affilée pendant la journée et bien dormir le soir également. Je ne souffre à aucun moment d’insomnie », explique-t-elle.
Avant la Covid-19, elle n’avait pas ce genre de problème, même si elle reconnaît avoir toujours été une grande dormeuse. Afin de se maintenir éveillée le plus longtemps possible, elle s’est mise à prendre des vitamines. Pour éviter l’excès, elle consomme également beaucoup de fruits. Cela ne semble pas suffisant, car elle a sommeil dès qu’elle n’est pas active. Ce qui fait qu’elle n’arrive pas à étudier, à lire ou faire autre chose quand elle est chez elle. Sandrine Emilien espère que cette situation va changer et qu’elle pourra vite retrouver l’entrain qu’elle avait avant.
Justine Lafontaine, 63 ans, de Goodlands : «Ma vie n’est plus comme avant»
Infectée par la Covid-19 en octobre 2021, Justine Lafontaine subit encore durement les séquelles de la maladie. « Après les premiers symptômes, j’ai eu des courbatures. Ces douleurs ne sont pas parties malgré la prise de calmants. Quand j’ai été testée positive à la Covid-19, j’ai dû prendre d’autres médicaments en plus de ceux de l’hôpital », explique-t-elle.
Plusieurs mois après, les douleurs sont toujours présentes et elle doit suivre un traitement à l’hôpital à cause de cela. Toujours très active à 63 ans, elle souligne qu’elle ne peut plus faire autant de travaux domestiques qu’avant. « Les tâches ménagères que je faisais en trois heures me prennent désormais une journée. Je dois aussi me reposer de temps en temps. Je n’ai plus le même punch », dit-elle.
À l’hôpital, on lui a dit que c’était sans doute dû à son âge. Mais elle est persuadée que ce sont les séquelles de la Covid-19. « Quand j’ai eu le chikungunya, j’ai pu faire les tâches ménagères sans problème. Depuis la Covid-19, c’est plus difficile. Il y a des jours où je ne peux rien faire du tout », souligne-t-elle.
Justine Lafontaine se dit peinée de se retrouver dans une telle situation. Elle a même perdu une certaine autonomie. Elle ne prend plus que très rarement l’autobus car elle a du mal à monter et descendre du véhicule. Et quand les douleurs la tenaillent, elle dit éviter autant que possible de prendre les calmants pour ne pas en devenir esclave : « Je préfère me reposer et passer un gel pour apaiser la douleur. »
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