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Les troubles alimentaires : un problème autant psychologique que physique

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Les troubles alimentaires, caractérisés par une perturbation de la relation avec la nourriture, peuvent entraîner des conséquences graves affectant à la fois la santé physique et mentale. Ils sont souvent mal compris et stigmatisés, mais une meilleure connaissance peut aider à reconnaître les signes et à chercher un traitement approprié. Le Dr Pouvani Cudian-Mathew, le psychologue Sarvesh Dosooye et la nutritionniste Yoshinee Dhunoo reviennent sur ces conditions débilitantes.

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Le Dr Pouvani Cudian-Mathew, médecin généraliste installée en Allemagne.

Les troubles de l’alimentation, aussi appelés troubles des conduites alimentaires ou trouble du comportement alimentaire (TCA), désignent des perturbations graves du comportement alimentaire. « Les troubles de l'alimentation sont un ensemble de syndromes comportementaux dont les présentations cliniques sont principalement axées sur le comportement alimentaire. Ils impliquent des dérèglements du comportement alimentaire, une fixation excessive sur la forme du corps entraînant une altération de la santé physique et mentale », explique le Dr Pouvani Cudian-Mathew, médecin généraliste. Cette dernière, qui habite en Allemagne, est actuellement en visite à Maurice.

Le plus courant est l'hyperphagie boulimique. Les autres syndromes comprennent l'anorexie mentale, la boulimie, les troubles de l'évitement et de la restriction alimentaire et certains troubles classés dans la catégorie « autres troubles spécifiques de l'alimentation et des repas ». 

Causes des troubles alimentaires

Le Dr Pouvani Cudian-Mathew souligne que les causes des troubles alimentaires sont multifactorielles. Elles comprennent des facteurs génétiques, biologiques, psychologiques et socioculturels. Les pressions sociales pour atteindre une minceur irréaliste, les antécédents familiaux de désordres alimentaires ou de santé mentale, ainsi que certains traits de personnalité, comme le perfectionnisme, peuvent tous jouer un rôle. « Des études ont montré que le fait d'avoir un parent ou tout autre proche de la famille souffrant d'un problème alimentaire ou même d'anxiété, de dépression ou d'addiction augmente le risque de trouble de l'alimentation », indique le médecin.

Ainsi, reconnaître les signes et symptômes des troubles alimentaires est crucial pour une intervention précoce. Ces signes peuvent inclure :

  • Une préoccupation excessive pour le poids, la nourriture et l'image corporelle
  • Des comportements alimentaires restrictifs ou des régimes extrêmes
  • Des frénésies alimentaires suivies de comportements compensatoires
  • Des fluctuations de poids significatives
  • Une utilisation fréquente des toilettes après les repas
  • Des changements dans les habitudes alimentaires ou sociales

Traitement et prise en charge

« La clé est la détection précoce des signes et des symptômes. L'éducation des enseignants et des parents sur les troubles de l'alimentation les aide à détecter les signes et les symptômes à un stade précoce », précise-t-elle. D’ailleurs, elle souligne que les répercussions physiques des troubles alimentaires sont nombreuses : elles vont de l'anémie légère à la stérilité, en passant par la défaillance de plusieurs organes et la mort en l'absence de traitement. 

Pour ce qui est de l’impact psychologique, le médecin estime que les troubles liés à la nourriture peuvent être associés à d'autres troubles mentaux ou les provoquer. « Par exemple, la dépression et les troubles de l'humeur. Les dysfonctionnements alimentaires ont le deuxième taux de mortalité le plus élevé parmi les maladies mentales, soit comme conséquence directe du trouble de l'alimentation, soit par suicide », ajoute-t-elle.

Le Dr Pouvani Cudian-Mathew insiste sur l'importance d'une approche multidisciplinaire pour le traitement des troubles alimentaires en impliquant des psychologues et psychiatres, mais parfois aussi des médecins dépendant du stade auquel le traitement est recherché. Une thérapie comportementale visant à une prise de poids progressive, psychothérapie individuelle et thérapie familiale peuvent être envisagées dans un premier temps. « Une combinaison de ces thérapies est généralement mise en œuvre », dit-elle.

Toutefois, à un stade avancé, une hospitalisation pour traiter ou prévenir les complications, ainsi que la prise de médicaments (antipsychotiques, antidépresseurs) peuvent être indispensables et ces médicaments sont associés à une psychothérapie. « Les perturbations alimentaires sont des conditions graves qui nécessitent une compréhension et une intervention appropriées. Il faut davantage sensibiliser le public à ces troubles et de promouvoir une culture de bienveillance et de soutien envers ceux qui en sont affectés. En reconnaissant les signes et en cherchant de l'aide, il est possible de surmonter ces maladies et de retrouver une relation saine avec la nourriture et le corps », conclut-elle.

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Anorexie mentale

L'anorexie mentale se caractérise par une restriction alimentaire sévère, une peur intense de prendre du poids et une perception déformée de l'image corporelle. Les personnes atteintes peuvent se voir comme étant en surpoids, même lorsqu'elles sont dangereusement maigres.

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Boulimie nerveuse

La boulimie nerveuse implique des épisodes récurrents de frénésie alimentaire suivis de comportements compensatoires inappropriés tels que les vomissements provoqués, l'usage excessif de laxatifs, le jeûne ou l'exercice exagéré.

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Hyperphagie boulimique

Les personnes atteintes d'hyperphagie boulimique (« binge eating disorders ») consomment régulièrement de grandes quantités de nourriture en un court laps de temps, souvent jusqu'à en éprouver un inconfort physique, sans comportements compensatoires ultérieurs.

Le premier livre du Dr Pouvani Cudian-Mathew

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Pouvani Cudian- Mathew est née et a grandi à Maurice. Cette ancienne lauréate (2012) a fait ses études de MBBS au SSR Medical College. Après son internat à l’hôpital Victoria, elle est partie à l’étranger pour poursuivre ses études. Elle est actuellement en Allemagne depuis près de trois ans. Elle s’est mariée et travaille actuellement en tant que médecin, tout en poursuivant sa spécialisation. 

Quelques années de cela, surtout pendant la pandémie de Covid-19, elle s’est mise à l’écriture et a publié son premier livre, « Mirror, mirror is that me ? ». Lancé le 2 février 2021, le livre est disponible en anglais et en français. L’ouvrage parle notamment des troubles alimentaires et, plus précisément, de l’anorexie mentale dont souffre le personnage principal de son histoire.


Troubles alimentaires - Une perspective psychologique

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Sarvesh Dosooye, psychologue, alerte sur l’alimentation émotionnelle.

Sarvesh Dosooye : «il nous faut encourager une culture de bienveillance et de respect de soi»

Les troubles alimentaires, qu'il s'agisse d'anorexie, de boulimie ou d'hyperphagie, représentent des problèmes de santé mentale complexes et dévastateurs. Pour les soigner, le psychologue Sarvesh Dosooye parle d’une approche intégrée.

Les troubles alimentaires ne sont pas simplement des comportements alimentaires dysfonctionnels, mais des symptômes d'un malaise psychologique profond. C’est l’avis du psychologue Sarvesh Dosooye. « Les perturbations alimentaires sont souvent des manifestations de problèmes sous-jacents tels que l'anxiété, la dépression, le traumatisme ou une faible estime de soi », explique-t-il. Selon lui, ces personnes utilisent la nourriture comme un « coping mechanism » pour gérer des émotions intenses ou des situations difficiles.

Les causes sont multifactorielles : génétiques, biologiques, psychologiques et socioculturels. Ceux-ci interagissent de manière complexe pour prédisposer une personne à développer un trouble alimentaire. « Les pressions sociétales pour atteindre des standards de beauté irréalistes jouent un rôle significatif », note Sarvesh Dosooye. « Les réseaux sociaux et les médias véhiculent des images de corps parfaits, ce qui peut exacerber le sentiment d'insuffisance et de comparaison chez les individus vulnérables ».

Le rôle du traitement psychologique

Le traitement des troubles alimentaires nécessite une approche intégrée, souvent impliquant une équipe multidisciplinaire composée de psychologues, nutritionnistes, médecins et autres professionnels de santé. La thérapie cognitivo-comportementale (TCC) est l'un des traitements les plus efficaces pour ces troubles. Elle aide les patients à identifier et à modifier les pensées et comportements dysfonctionnels liés à la nourriture et à l'image corporelle. « Elle les aide également à développer des stratégies de 'coping' plus saines pour gérer leurs émotions », ajoute-t-il.

Ensuite, il y a l’appui familial et social qui est crucial dans le processus de guérison. « Les proches peuvent jouer un rôle de soutien vital. Toutefois, ils doivent aussi être éduqués sur la nature des troubles alimentaires pour éviter des comportements involontairement nuisibles », insiste le psychologue puisque « la compréhension et la compassion sont essentielles pour créer un environnement de soutien ».

La prévention et l'éducation

La prévention des troubles alimentaires passe par l'éducation et la sensibilisation. Les programmes éducatifs dans les écoles et les communautés peuvent aider à promouvoir une image corporelle positive et des habitudes alimentaires saines. « Il est essentiel de pousser les jeunes à apprécier leur corps pour ses capacités et non pour son apparence. En outre, il nous faut encourager une culture de bienveillance et de respect de soi. Ainsi, nous pouvons réduire l'incidence des troubles alimentaires », explique-t-il. Du coup, il précise que les troubles alimentaires sont des maladies complexes qui nécessitent une approche globale et multidisciplinaire pour être traitées efficacement. « La compréhension psychologique de ces troubles et le soutien familial et social sont des éléments clés pour aider les personnes touchées à retrouver une relation saine avec la nourriture et leur corps », indique Sarvesh Dosooye.

Comprendre l’alimentation émotionnelle

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Les troubles alimentaires peuvent entraîner une altération de la santé physique et mentale.

Au-delà des troubles alimentaires tels que l’anorexie et la boulimie, le psychologue fait ressortir qu’il y a l’alimentation émotionnelle aussi appelée « emotional eating » en anglais. Ce phénomène prend de l’ampleur tant chez les jeunes que chez les adultes. « Il s’accentue avec le stress constant dans la vie de chacun et surtout la toxicité sur son lieu de travail », précise-t-il.

Ces conditions entraînent un malaise émotionnel et poussent les gens à retrouver du réconfort dans la nourriture. « On le voit avec le comfort food. Les personnes essaient de retrouver du confort dans ce qui peut procurer un peu de plaisir au lieu d’aller à la source du problème », dit-il.

 

 

 

 

 


 Alimentation

Une approche nutritive pour se soigner

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Yoshinee Dhunnoo parle d’une alimentation nutritive pour soigner progressivement le patient.

La gestion des troubles alimentaires nécessite une approche intégrée qui inclut des soins médicaux, psychologiques et nutritionnels. La nutrition joue un rôle crucial dans la réhabilitation et la récupération des patients atteints de ces troubles. Yoshinee Dhunnoo, nutritionniste, souligne l’intervention nécessaire pour se soigner.

Elle fait comprendre qu’il faut surtout commencer par une évaluation approfondie de l'historique alimentaire et médical du patient. « Cela inclut les habitudes alimentaires, les antécédents de poids, les comportements alimentaires désordonnés et les complications médicales liées au trouble alimentaire », explique-t-elle. Cela permet aussi de faire une analyse des carences nutritionnelles, des déséquilibres électrolytiques, de l'état des organes vitaux et de l'état général de santé.

Ensuite, il est nécessaire d’élaborer un plan nutritionnel individualisé, car il faut une restauration de la santé physique. « L’objectif est de corriger les carences nutritionnelles et de stabiliser la santé physique du patient », fait-elle comprendre. Cela passe souvent par l’introduction progressive d’une alimentation équilibrée et variée qui pourra fournir tous les nutriments essentiels.

L’éducation nutritionnelle

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Les aliments évités sont réintroduits graduellement.

Les aliments, notamment ceux qui ont été évités ou restreints, sont réintroduits de façon progressive et sécurisée. « Pour pouvoir le faire, il faut une planification de repas structurés et équilibrés, avec des portions contrôlées pour éviter la surcharge », précise-t-elle. Selon notre interlocutrice, l’éducation nutritionnelle est un autre aspect important du traitement. En effet, l’éducation nutritionnelle a pour but d’informer le patient sur les principes d'une alimentation saine et équilibrée. Cela va donc nécessiter des séances éducatives pour comprendre l’importance des macronutriments tels que les protéines, glucides, lipides et les micronutriments, dont les vitamines et minéraux.

Un soutien comportemental et émotionnel est également crucial pour développer une relation saine et positive avec la nourriture selon la nutritionniste. Dans certains cas, l’utilisation de techniques de pleine conscience et de thérapie cognitivo-comportementale pour aborder les pratiques alimentaires désordonnées est suggérée.

Comportements compensatoires

Le patient doit aussi être équipé de stratégies pour faire face aux crises alimentaires et éviter ainsi des comportements compensatoires. Pour la nutritionniste, cela se fait à travers l’enseignement de techniques de gestion du stress, de la faim émotionnelle et de l’envie de frénésie. Un plan de maintien permet d'assurer la continuité des progrès réalisés en établissant des stratégies de prévention des rechutes, une éducation constante et un soutien prolongé.

La gestion des troubles alimentaires par une nutritionniste implique une approche personnalisée et holistique. En combinant des plans nutritionnels individualisés, une éducation approfondie et un soutien comportemental et émotionnel, la nutritionniste joue un rôle crucial dans la récupération et le maintien d'une relation saine avec la nourriture. « La collaboration multidisciplinaire et la prévention des rechutes sont essentielles pour assurer un rétablissement durable et une meilleure qualité de vie pour les patients atteints de troubles alimentaires », fait comprendre Yoshinee Dhunnoo.

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